L�aversion visc�rale de notre clerg� pour les questions �conomiques est inversement proportionnelle � l�int�r�t quasi obsessionnel qu�il porte aux restrictions des droits de la femme. Les th�mes favoris de la litt�rale religieuse touchent davantage aux libert�s individuelles qu�� l�organisation de la vie socio�conomique. Sinon comment expliquer que la finance islamique ne p�se aujourd�hui que 320 milliards de dollars dans des th�ocraties qui engrangent sans compter des recettes p�troli�res qu�il serait laborieux de comptabiliser. Voyons les choses de plus pr�s ! Les produits obligataires islamiques sont repr�sent�s par les Sukuk qui sont � la finance �hallal� ce que les Asset Backed Securities (ABS) sont � la finance �conventionnelle �. Il a fallu attendre 1998 pour voir le groupe financier saoudien Dallah Albaraka �mettre le premier Sukuk ! Le march� des Sukuk avoisinerait aujourd�hui les 10 Md$. Autant dire, une goutte d�eau licite fra�chement d�barqu�e dans un oc�an d�interdits ! Nous avons ici en main un produit qui a une �ch�ance fix�e d'avance et est adoss� � un actif permettant de r�mun�rer le placement en contournant le principe de l'int�r�t. Il est alors structur� de telle sorte que ses d�tenteurs courent un risque de cr�dit et re�oivent une part de profit et non un int�r�t fixe et convenu � l�avance. Au titre des instruments de dette, la finance islamique compte la mourabaha, le salam, l�istisna�a et le qard al hassan. La Mourabaha est un contrat d�achat et de revente dans lequel la banque ach�te � un fournisseur un bien corporel � la demande de son client, le prix de revente �tant fond� sur le co�t plus une marge b�n�ficiaire. Plus simplement, le client demande � sa banque de financer une op�ration en achetant un bien. La banque le lui revend ensuite avec des paiements �chelonn�s, incluant un profit d�cid� � l'avance. Ici, la banque ou l�institution financi�re �mettrice joue le r�le d�un interm�diaire commercial, achetant des marchandises n�cessaires � ses clients et les leur revendant en diff�r� moyennant profit. On se rapproche des produits bancaires classiques que sont la titrisation ou du portage. Avec l�Ijara � cr�dit bail �, la Murabaha repr�sente 68% des produits consomm�s en 2005. Contrairement � la Mourabaha, utilis� surtout pour le financement de l�agriculture, le Salam est un contrat d�achat comportant la livraison diff�r�e des marchandises. C�est un accord � court terme par lequel une institution financi�re verse d'avance les montants correspondant � la livraison future d'une quantit� d�finie de marchandises. Il est semblable au forward o� la livraison s�effectue � une date future en �change du paiement au comptant. L�Istisna�a, ou contrat de traitance, est un instrument de financement avant livraison et de cr�dit-bail utilis� pour le financement de projets � long terme. C�est un contrat d�entreprise en vertu duquel une partie (Moustasni�i) demande � une autre (Sani�i) de lui fabriquer ou construire un ouvrage moyennant une r�mun�ration payable d�avance, de mani�re fractionn�e ou � terme. Il s�agit d�une variante qui s�apparente au contrat Salam � la diff�rence que l�objet de la transaction porte sur la livraison, non pas de marchandises achet�es en l��tat, mais de produits finis ayant subi un processus de transformation. L� Istisna'a fournit donc un financement � moyen ou long terme pour couvrir les besoins de financement pour la fabrication, la construction ou la fourniture de produits finis. Enfin, beaucoup plus rare (!), le Qard al-Hasan, ou pr�t gracieux, est un contrat de pr�t sans int�r�ts g�n�ralement adoss� � une s�ret�. Les instruments de quasidette sont l�Ijara et ses diff�rentes variantes. L�Ijara est un contrat de cr�dit-bail par lequel une partie loue un bien pour un loyer et une �ch�ance d�termin�s. Le propri�taire du bien (la banque) supporte tous les risques li�s � la propri�t�. Le bien peut �tre vendu � un prix n�gociable, ce qui entra�ne la vente du contrat Ijara. Ce contrat peut �tre structur� sous forme d�une locationvente, dans laquelle chaque loyer vers� comprend une partie du prix du bien convenu, et il peut porter sur une �ch�ance qui couvre la dur�e de vie pr�vue du bien. C'est l'�quivalent du leasing. Sur le plan pratique, la banque acquiert un bien (automobile, �quipement, immeuble). Le client lui paie un loyer mensuel fixe n�goci�. Il a, �ventuellement, une option d'achat en fin de contrat. Cette formule peut remplacer le cr�dit hypoth�caire pour une acquisition immobili�re. L�Ijara peut prendre la forme d�Ijara-wa-Iqtina (cr�ditbail avec promesse d�achat). Ce contrat est similaire � l�Ijara mais inclut une promesse d�achat du bien de la part du client � la fin du contrat. Enfin, une troisi�me variante de l�Ijara est l�Ijara avec Musharaka d�croissante. Ce contrat peut �tre utilis� pour l�achat d�immobilier. La part de l�institution financi�re dans le bien lou� diminue avec les paiements de capital que le client effectue en sus du paiement des loyers, l�objectif �tant, � terme, le transfert de propri�t� du bien au client. Outre les instruments de dette ou de quasi dette, la finance islamique comporte une troisi�me cat�gorie de produits : les contrats de partage des b�n�fices et des pertes que sont la Moucharaka ou la Waqala. La Moucharaka, ou association, est un contrat de prise de participation dans lequel la banque et son client participent ensemble au financement d�un projet. Le droit de propri�t� est r�parti en proportion de la contribution de chaque partie. L�institution financi�re et son partenaire partagent donc les profits et les pertes selon des proportions pr�d�finies. C�est un partenariat entre une institution financi�re et une entreprise sur la base duquel l�institution financi�re comme l�entreprise investissent dans le projet. On est proche du concept de tour de table avec des industriels et des financiers largement utilis� dans le monde des affaires pour monter nombre d�affaires. Il existe une deuxi�me forme de Musharaka : la Musharaka d�croissante par laquelle l�entreprise consent � racheter la part de l�institution financi�re apr�s une p�riode donn�e. L� on se rapproche du portage. La Moudharaba, ou commandite, est un contrat de fiducie par lequel une partie fournit le capital pour un projet, et l�autre, le travail. Le partage des b�n�fices est convenu entre les parties, et les pertes sont support�es par le fournisseur des fonds, sauf s�il y a faute ou n�gligence. C'est le contrat-type des fonds d'investissements islamiques. L'investisseur fournit les fonds, le g�rant l'expertise et le client re�oit une partie des profits des placements. En cas de moins-values, le g�rant assume les pertes en capital, l'investisseur ne gagne rien. Ici, l�institution financi�re agit comme bailleur de fonds �commanditaire� et l�entreprise comme manager �commandit� �, pour investir dans une activit� ou une classe d'actif pr�d�termin�e qui octroie � chacun une part du r�sultat d�termin�e lors de l�investissement. Le commandit� ne partage pas les pertes, la perte financi�re incombe au bailleur de fonds seulement ; la perte du manager �tant le co�t d�opportunit� de sa propre force de travail qui a �chou� de g�n�rer un surplus de revenu. Chasse le naturel, il revient au galop : parce qu�ils des produits risqu�s pour les institutions financi�res, la Mudharaba � commandite �, et la Musharaka � participations minoritaires �, ne repr�sentent que 17% des produits hallal en 2005. La Wakala, ou agence, est un contrat d�agence incluant, g�n�ralement, des frais d�expertise. Les banques l�utilisent souvent pour les grands comptes de d�p�t : le client poss�de les capitaux investis, il nomme une banque islamique comme agent et paye une commission d'expertise pour r�mun�rer le travail de gestion des fonds par la banque. Enfin, le Takaful et Retakaful, �quivalents de l'assurance et de la r�assurance, sont bas�s exclusivement sur le mutualisme. Ainsi, le principe juridique de base de la finance islamique repose sur la foi que le caract�re fixe, pr�d�termin� et d�connect� de la rentabilit� de l�actif financ� est nuisible et, donc, interdit. En d�autres termes, elle pr�conise pour toute transaction financi�re qu�elle se fonde sur un actif tangible afin de permettre le partage des pertes et profits que cet actif g�n�re. En th�orie, cela devrait permettre le r�gne des capitaux propres puisque l�emprunteur sait qu�en cas de difficult�s sa dette et sa r�mun�ration n�ont pas le caract�re d�exigibilit� qu�on leur conna�t habituellement. Les co�ts fixes financiers n�existent pas, puisqu�en cas de conflit, ils deviennent des co�ts variables. L�effet de levier est ici inexistant, ce qui devrait se traduire par moins de faillite d�entreprises, m�me si la rentabilit� �conomique est plus faible : les acteurs les moins efficaces, n��tant pas �limin�s par la faillite, peuvent poursuivre plus longtemps une activit� avec des marges faibles qui tirent vers le bas la rentabilit� des secteurs. A l�inverse, la possibilit� de faire fortune en tant qu�entrepreneur para�t plus limit�e.