Il y a quatre ans, jour pour jour, le centre du pays, plus particuli�rement la wilaya de Boumerd�s, a �t� �branl� par un fort s�isme dont l�amplitude avait soulev� � l��poque une vive pol�mique. La secousse tellurique situ�e au nord de la ville de Zemmouri � 7 kilom�tres en mer a touch� �galement les wilayas limitrophes, Tizi-Ouzou, Bouira, mais plus gravement celle d�Alger. Il �tait 19h44 ce 21 mai 2003, la journ�e allait se terminer paisiblement, notamment pour les fans du sport roi qui allaient suivre, sous une chaleur moite, la finale de la Coupe d�Europe sur leur petit �cran. Puis brusquement et pendant des secondes interminables la terre se mit � onduler comme la houle, � s��carteler et � l�cher des grondement terribles, les b�timents vacillaient, l�eau des puits remontaient subitement en surface et la mer avait recul� de plusieurs dizaines de m�tres. S�ensuivaient les destructions qui ont vu des b�timents tomber comme des ch�teaux de cartes. Des b�timents de plusieurs �tages ont �t� r�duits en �millefeuilles� mettant � nu le syst�me de malversations et de trafic dans le secteur de la construction dans notre pays. Des nuages de poussi�re ajoutaient leur p�nombre � la nuit qui commen�ait � tomber. 19h45, un long silence recouvre la r�gion. La Faucheuse passait pour prendre sa d�me. Brusquement, des cris de douleur et de terreur s��lev�rent. Des sc�nes apocalyptiques sont jet�es � la face des survivants. 80 personnes qui dansaient � Dellys pour partager le bonheur d�un couple ont �t� couverts, pour l��ternit�, par le manteau noir de la Faucheuse. Lekhal Louisa et son fr�re Zaky �taient beaux comme des anges et leur innocence n�avait d��gale que leur jeune �ge. Le 21 mai 2003 ils s�amusaient comme le font les enfants, dans le logement parental des 1 200-Logements de la ville de l�ex-Rocher noir. Ils ont laiss� une douleur incommensurable � leur maman. La terrible longue nuit du �mercredi� noir s�est abattue sur les villes de Boumerd�s, Dellys, Sidi- Daoud, Zemmouri, Th�nia, Boumerd�s, Corso, Boudouaou qui sont les plus touch�es. Apr�s quelques instants d�h�b�tement, les jeunes par centaines accoururent pour sauver des vies humaines r�v�lant ainsi la bravoure de ces jeunes Alg�riens. Les services de s�curit� dans toute leur composante, sans moyens, se sont �galement d�ploy�s d�s les premiers instants de la catastrophe. Cet h�ro�sme a �t� suivi quelques heures apr�s par un �lan de solidarit� instantan� du peuple alg�rien qui a manifest� sa pr�sence aupr�s des populations des localit�s martyris�es par la catastrophe. Les entreprises �tatiques ou priv�es et les services publics qu�on s��chine � casser ou � brader se sont rapidement mobilis�s pour r�tablir les r�seaux vitaux. Le corps m�dical et param�dical avait r�alis� des miracles pour soigner les bless�s et �viter des �pid�mies dans les camps de toile �rig�es pour h�berger des milliers de familles sinistr�es. Les nations �trang�res et les ONG ont exprim� concr�tement leur solidarit� par la pr�sence de leurs sauveteurs ou par des contributions en dons de secours et financiers. Pour ce quatri�me anniversaire de ce drame, � l�heure o� nous mettons sous presse aucun programme de comm�moration n�est pr�vu. Effectivement, l�attention a �t� accapar�e, ces derni�res semaines par ce qui �tait attendu comme un grand �v�nement, � savoir les �lections l�gislatives, mais ce fut un ratage du point de vue mobilisation populaire. Les uns continuent � compter le peu de voix exprim�es les autres � se consoler de la d�route. Seules les familles de victimes se souviendront des �tres chers perdus. Abachi L. BILAN DE LA CATASTROPHE Des chiffres effarants et le syst�me de corruption dans le secteur du b�timent mis � nu
La catastrophe du 21 mai a mis � nu de fa�on dramatique le syst�me, malheureusement toujours en cours, de passations de march�s publics, particuli�rement, dans le secteur juteux de la construction et de l�habitat. En effet, la majorit� des victimes a �t� ensevelie sous les d�combres des cit�s nouvellement �rig�es. Le b�timent qui s�est effondr� dans la nouvelle ville de Dellys, emportant plus de 80 victimes, n�est pas un cas isol�. En effet, un jeune couple venait juste de b�n�ficier d�un logement construit par un entrepreneur priv�. A ce qui devait �tre le premier heureux s�ajoutait la c�l�bration d�un mariage. Des centaines de convives �taient pr�sents quelques instants, avant le tremblement de terre, dans les appartements de ce b�timent. Le bilan on le conna�t. La liste macabre ne s�arr�te malheureusement aux seules 80 victimes cit�es plus haut. Selon le bilan officiel, le tremblement de terre du 21 mai 2003 s�est sold� par le d�c�s de 1 391 personnes et plus de 10 000 autres ont �t� bless�es. Une partie des bless�s tra�ne des handicaps lourds. A ce lourd bilan humain s�ajoutent les d�g�ts mat�riels �valu�s � l��poque � 5 milliards de dollars par le pr�sident de la R�publique, M. Abdelaziz Bouteflika. Effectivement, d�apr�s le d�nombrement fait par l�administration de la wilaya de Boumerd�s, 10 513 logements individuels ou collectifs ont �t� soit d�truits par la secousse soit d�molis parce que repr�sentant un danger. 82 939 autres habitations ont �t� �galement endommag�es � des divers degr�s (vert 2, orange 3 et orange 4). 11 �coles, 4 CEM, 1 lyc�e, 2 CFPA, 2 mosqu�es,1 polyclinique, une prison pour mineurs, 1 si�ge d�APC, 3 brigades de gendarmerie,� entre autres ont �t� compl�tement d�truits. Par ailleurs, des centaines pour ne pas dire des milliers de structures des secteurs de l��ducation, de l�enseignement sup�rieur, de la sant� dont les trois h�pitaux de la wilaya, de la formation, de la culture, des affaires religieuses, des r�seaux routiers, de l�AEP, de l�alimentation en �nergie �lectrique et celui du t�l�phone ont �t� gravement endommag�s. Les camps de toile Apr�s avoir �t� tant d�cri�s pour le retard mis pour la prise en charge des rescap�s et des d�cisions � la mesure de la calamit�, les services de l�Etat se sont par la suite fortement d�ploy�s pour s�curiser et h�berger les dizaines de milliers de familles sinistr�es. Le gouvernement avait engag� une v�ritable course contre la montre et fait appel � de nombreux pays pour trouver des tentes en vue d�abriter les familles. De plus, il avait pour obligation d��tablir un r�seau sanitaire pour prendre en charge les bless�s et suivre quotidiennement en plus de la population traumatis�e environ 120 000 personnes en situation de pr�carit� qui plus est �tait sous la menace d��pid�mies pouvant d�couler d�un �t� caniculaire. 94 sites pour 18 296 tentes ont laborieusement �t� install�es entre le d�but de la prise en charge et juillet 2003. Ces camps de toile �taient occup�s par environ 120 000 personnes sinistr�es qui avaient pass� de longs mois avant de regagner les chalets qu�ils occupent d�ailleurs pour la majorit� faute de relogement d�finitif. Reconstruction et relogement Le gouvernement, de M. Ouyahia, qui �tait, rappelons-le, soumis � l�imp�ratif de faire r��lire en 2004 et sans contestation le candidat du pouvoir, avait d�gag� un budget colossal (144 milliards de dinars) pour faire face aux d�penses qui seront induites par la prise en charge des s�quelles de la catastrophe. Par le biais du fameux d�cret ex�cutif num�ro 03/227, une manne a �t� ouverte pour distribuer des indemnit�s aux propri�taires des logements d�truits ou endommag�s. Cette op�ration qui n�a pas �t� men�e, au d�part dans la transparence requise, avait donn� lieu � de pressions populaires pour l�obtention de la part du g�teau. Des abus ont, en outre, �t� relev�s. Selon l�administration qui m�ne, nous dit-on, une op�ration d�assainissement de ce dossier, 3 601 d�cisions d�aide ont �t� annul�es tandis que 680 b�n�ficiaires, toujours selon les chiffres de la wilaya, ont d�ores et d�j� rembours� l�argent qui leur a �t� injustement attribu�. Mais combien d�attributaires ont �chapp� � ce contr�le ? L�urgence de la reconstruction avait �t� �galement une opportunit� pour certains entrepreneurs v�reux qui n�ont pas h�sit� � surfacturer des services et des r�parations effectu�s apr�s le s�isme. S�agissant du relogement d�finitif des 8 140 familles qui ont opt� pour la prise en charge par l�Etat un programme de r�alisation de 8 452 logements a �t� lanc� fin 2003. Le pari de M. Mohamed Nadir Hamimid, le ministre de la Construction et de l�Habitat de reloger d�finitivement ces familles avant la fin 2005 n�a pas �t� tenu. A ce jour, seules, d�apr�s les statistiques fournies par le cabinet du wali, 4 287 ont repris les logements en dur qui leur ont �t� affect�s. En d�pit des appels pressants des autorit�s, des facilit�s accord�es et de la contribution de l�entreprises chinoise, ce programme n�a pas �t� r�alis� dans sa totalit�. Cela d�note malheureusement que notre pays souffre du manque d�un potentiel industriel pouvant construire de logement en grandes quantit�s dans un laps de temps d�termin�.