C��tait dans une ambiance bon enfant que Hamid Ali-Bouacida a d�dicac�, jeudi dernier � Constantine, son premier recueil de nouvelles, intitul� Cinq dans les yeux de Satan, paru en mars 2007 chez Casbah Editions. L�auteur, natif des Aur�s en 1952, a v�cu la plupart de sa vie � Constantine. Avec modestie, il a tutoy�, deux heures durant, les lecteurs venant appr�cier de pr�s son temp�rament de journaliste talentueux. Cette attitude refl�te sa volont� de se familiariser avec ses lecteurs, et ce, en franchissant toutes les fronti�res qui le s�parent d�eux. Hamid Ali-Bouacida �tait toujours proche de son entourage. Et c�est ce qui lui a permis de �commettre� ce texte qui lui a valu la prestigieuse distinction de la fondation Mohamed-Dib en 2006. L�auteur a, d�embl�e, racont�, avec l�g�ret� et anecdote, la remise du prix. �Je me suis d�plac� � Tlemcen par route et r�serv� une chambre dans un h�tel modeste. La pauvret� n�est pas une honte, dit l�adage populaire. Lors de la c�r�monie, un extrait de la magistrale trilogie de l�Alg�rie de Mohamed Dib a �t� r�p�t�. J�ai v�cu une demi-heure tr�s intense. La m�me �motion m�envahit � chaque fois que je lis ce passage. Lala A�ni pleurait parce qu�elle n�avait pas de quoi nourrir ses enfants. Le jury, compos� de critiques litt�raires de renom, des universitaires de la Sorbonne, de l�universit� de Berlin� a d�cid� de m�offrir ce prix de 100 millions de centimes. Je ne m�attendais pas � �a. Enfin, c�est gr�ce � ce prix que j�ai pu loger mes enfants en me permettant un LSP�, d�clara-t-il. L�auteur de ces nouvelles, tr�s sensible � la mis�re, a indiqu� que le titre de l�ouvrage traduit la philosophie des histoires qui y sont racont�es, lesquelles sont puis�es du terroir populaire de l�Alg�rie profonde. Il pr�cisera que l�origine de cette expression ancr�e dans l�imaginaire des musulmans du Maghreb est la lecture de la derni�re sourate du Saint Coran, compos�e de 5 versets et o� Dieu maudit le diable. �Peu de gens le savent�. Ce talentueux journaliste raconte, � travers les 16 nouvelles qui constituent l�ossature du recueil, les enfants qui souffrent, les p�res qui ne peuvent nourrir leurs enfants, les ch�meurs ; bref, les pauvres et les d�munis de ce peuple. Il regrette son impuissance � venir en aide � ces gens. �Je ne suis arm� que d�une plume. C�est malheureux ! Les mots ne construisent pas des logements pour les sans-abri et n�assurent �galement pas la nourriture aux affam�s qui, d�ailleurs, ne lisent m�me pas mes �crits�, d�plora ce tailleur de vers. Hamid Ali-Bouacida, �conomiste de formation et exenseignant � l�universit� de Constantine, vers� accidentellement dans la presse, a parl� aussi du journalisme. Pour lui, c�est plus un �tat d�esprit ou un mode de vie qu�un m�tier ou une profession. �Cela fait 22 ans depuis que j�ai �pous� le journalisme. J��tais anim� par mon engouement pour la litt�rature. J�ai fait mes premiers pas dans l�hebdomadaire sportif El-Hadef. Cette exp�rience m�a appris une immense qualit� du sens de l�observation. J�ai r�alis� �norm�ment de reportages sur des clubs �voluant au plus bas de l��chelle du championnat et d�autres sur les contr�es les plus enclav�es de l�int�rieur du pays. Je suis constamment angoiss� et je d�bute chaque matin avec la crainte de faire feuille blanche car l�exp�rience du journaliste consiste dans le fait d�observer et non pas en l��criture elle-m�me. Je ne pr�tends pas devenir nouvelliste mais je continue � �crire. Le plus important est l�acte d��crire. Et puis, on peut aussi �crire sur la hausse des prix de la pomme de terre de mani�re po�tique�, a dit cet �crivain qui, d�ailleurs, a lanc� vers le d�but des ann�es 1990 l�hebdomadaire satirique El-Gantaraqui fut une sorte d�un Canard encha�n� � la constantinoise. Il qualifiera la jeune g�n�ration des confr�res de �pr�tentieuse�. �On ne devient pas grand du jour au lendemain. Il faut que ces jeunes apprennent � faire du journalisme de proximit�, autrement dit, faire des enqu�tes et des reportages au fin fond du pays. La presse alg�rienne est tr�s politique et cette pr�tention en est la cons�quence. Je ne suis pas un messager mais je leur dis qu�il faut commencer petit pour devenir grand. On ne peut pas contrecarrer la loi de la nature�, a-t-il conseill�. Hamid Ali- Bouacida s�est, quand m�me, f�licit� de la r�ussite de la presse dite priv�e. �Quoique le pouvoir de l�argent a hypoth�qu�, quelque part, son ind�pendance, elle demeure une presse qui a r�ussi � s�imposer. Gr�ce � cette presse, plusieurs scandales ont �t� �vent�s. Ce qui est aberrant est ce complexe de se soumettre dans le contexte tr�s restreint du monde arabe et dire que c�est la presse la plus avanc�e et la plus libre de la r�gion. Pourquoi ne pas la situer dans l�universalit� ? Je dis �galement � M. Jean-Daniel qui s�est autoproclam� juge de notre presse de s�int�resser aux scandales des m�dias fran�ais parce que les probl�mes de la presse alg�rienne ne le regardent pas�, s�est-il indign�. A propos du monde de l��dition en Alg�rie, l�auteur a soulign� que l��crivain ne peut pas y vivre de sa plume. �Sa part des ventes ne d�passe pas les 10%. De plus, il prend en charge les frais de la promotion de son livre. Qu�est-ce qu�il va gagner en fin de compte ?� s�interroge-t-il.