Apr�s le brouillard, la pluie puis une mini-temp�te la canicule revient. Temps chaud, tr�s chaud et sec et les jeunes me parlent d�un incendie � Chr�a. Les feux de for�t me peinent beaucoup. Non seulement parce que, comme vous, j�aime la for�t mais je me souviens imm�diatement des campagnes de reboisement. Mais avec quel entrain, quel plaisir, quel enthousiasme nous nous rendions vers Larbatache pour y replanter les arbres br�l�s au napalm. Ado, je d�couvrais la montagne et les noms de Zbarbar ou Bouzegza, de Chr�a ou de Sacamody, de Tamesguida ou de Palestro r�sonnait encore des combats que, en ville, des ados comme moi r�vaient de rejoindre. Je d�couvrais aussi l�horreur de nos campagnes, les gourbis, les vrais, faits de terre et de diss, souvent � moiti� enfouis sous terre. Et je d�couvrais ces regards � la fois curieux et pudiques des enfants de la campagne, des regards souriants comme un bonheur � recevoir des gens, � les accueillir et dans ma t�te d�ado, s�est, � jamais, inscrite l�image de cette fillette, pieds nus, de ces gar�onnets courant sur les sentiers caillouteux sans souliers. Dieu, je d�couvrais l�atroce mis�re ! La mis�re ultime et, sans y r�fl�chir, je faisais la diff�rence avec la pauvret� que nous connaissions en ville et que je prenais pour la situation extr�me des Alg�riens, rendue, encore plus dure, il est vrai, par la constante proximit� des pieds noirs. Je sentais confus�ment que cette guerre terrible que nous venions de mener et de gagner �tait aussi une promesse de tirer tout le monde de cette condition de pauvret� et de mis�re. Cette guerre a sonn� comme un serment pour ces paysans compl�tement d�munis qui ont accueilli, veill�, nourri, prot�g� les combattants. Il n��tait pas question, je crois, de la froide et inhumaine �conomie de march� mais de justice sociale, d��galit�, de r�paration des pr�judices que nous infligeait le colonialisme, de droit � l��cole, � la m�decine etc... le chemin parcouru n�est pas beau depuis cette guerre et depuis les premiers enthousiasmes de l�ind�pendance et du reboisement. Et chaque feu de for�t me rappelle le grand incendie de la guerre et le serment de solidarit�. Avoir fait tout cela pour h�riter de notre condition actuelle. Est-elle si vraie la phrase qui nous pr�venait que l�oppression par nos fr�res serait pire que l�oppression coloniale ? Je finirais par le croire.