C'est M�duse ! Cet homme a une t�te de gorgone, visage rond grima�ant, aur�ol� d'une tignasse boucl�e et mang� par une barbe poivre et sel. Il en a aussi le pouvoir l�gendaire, ayant, semble-t-il, h�rit� sa capacit� � p�trifier l'adversaire. Depuis le 8 septembre, c'est toute la classe politique italienne que Beppe Grillo a fig�e d'effroi. Gauche et droite sont rest�es interdites devant le succ�s de son Vaffanculo Day. Une manifestation au titre plut�t grossier � �La journ�e va-te-faire foutre� � qui exprime un ras-le-bol destructeur dans un pays en pleine crise du politique. Ce jour-l�, tandis que 50 000 personnes acclamaient la harangue du comique sur une place de Bologne, partout dans le pays on faisait la queue pour signer sa p�tition en faveur d'une �politique vraie et propre�. En 24 heures, sa proposition de loi a recueilli plus de 330 000 signatures, beaucoup plus qu'il n'en faut pour �tre soumise au Parlement. De quoi s'agitil ? Un, interdire � un homme ayant �t� p�nalement condamn� de se pr�senter aux �lections. �Il y a 24 parlementaires dans ce cas actuellement�, rappelle Beppe Grillo. Deux, limiter les mandats � deux l�gislatures : selon ce crit�re, un parlementaire sur trois perdrait son si�ge. Trois, instaurer un �vote direct par les citoyens� au lieu de la repr�sentation par listes �fabriqu�es par les fonctionnaires des partis�. On comprend que les responsables des Chambres ne se pr�cipitent pas pour mettre la �loi Grillo� � l'ordre du jour. Elle aura d'autant moins de chances d'�tre adopt�e que, pour faire bonne mesure, l'artiste appelle � la disparition des partis, �une conception morte de la politique�. Il leur pr�f�re des �listes civiques�, comme celles qu'il va lancer, sous son label, pour les municipales de 2008. Le V-Day a provoqu� quelques autocritiques de dirigeants politiques, mais on a surtout cri� � la �d�magogie� et au �populisme�. D�nonc� comme le chantre de l��antipolitique�, Beppe Grillo est devenu un dangereux �gourou�, un �barbare�. La gauche est embarrass�e, car le �peuple de Grillo�, comme on appelle d�sormais le pan de soci�t� civile r�v�l� par le V-Day, constitue une part de son �lectorat. �Je ne suis pas un leader, mais un d�tonateur, se d�fend Beppe Grillo. Le probl�me vient d'en bas, je n'y suis pour rien, c'est un virus, c'est Ebola et la grippe aviaire r�unis, mais ils ne comprennent pas.� �Ils�, ce sont les hommes politiques italiens, accus�s de vivre hors de la r�alit�. Sa verve est parfois proph�tique, comme pour le krach du g�ant agroalimentaire Parmalat, qu'il est le seul � pr�dire, avec des semaines d'avance sur les banques et les experts financiers. Est-ce d� � sa formation de comptable ? Il n'a pas son pareil pour d�cortiquer les bilans, �plucher les comptes d'exploitation, transformer les assembl�es g�n�rales d'actionnaires en happenings d�lirants : il tenta �une OPA � la g�noise� sur T�l�com Italia � la t�te de petits porteurs. En gu�rilla permanente, Beppe Grillo est sur tous les fronts : des scandales bancaires aux combats �cologistes, en passant par le travail pr�caire qu'il stigmatise dans un livre, Schiavi moderni(Esclaves modernes).