Le r�tablissement des �quilibres macro�conomiques, � la faveur de l�embellie financi�re, semble remettre les compteurs � z�ro sans garantir un impact durable, au-del� de trois-cinq ans (selon les sources) sur les d�terminants de conjoncture (contexte international et crise financi�re, demande sociale, pression sur les importations, notamment alimentaires). Pour l�instant, le barom�tre n�affiche rien de grave, mais jusqu�� quand et, surtout, � partir de quel seuil de prix du p�trole ? En termes de leviers, les liquidit�s mon�taires sont en hausse (+ 27% de 2007 � 2008), avec toutefois des risques inflationnistes non n�gligeables et l��pargne int�rieure repr�sente 40% du PIB. Ces liquidit�s sont affect�es par une inflation qu�on a de la peine � chiffrer avec exactitude. Des sources concordantes l��tablissent � 4,8% � 4,2%, selon M. Laksaci � (contre un taux projet� de 3,5% par la loi de finances 2008), du fait de l�augmentation des d�penses publiques et de l�inflation import�e (par les biens alimentaires et d��quipements). Elle est sup�rieure de 1% par rapport � son niveau de 2006 et reste, de l�avis du ministre des Finances, M. Djoudi, �contenue � parce que l�Etat intervient pour amortir l�emballement des prix. Pour avoir une id�e de l�impact de l�inflation import�, le discours officiel met en �quation les prix des m�mes quantit�s import�es il y a un an : plus 10% en volume et 20% en valeur. Il se manifeste �galement une tension sur les prix des produits alimentaires de base (+9,3%). Les cr�dits � l��conomie ont cr� de 5,15% au cours du premier semestre 2008 (contre 12,16% en 2006 et 15,22% en 2007). Ces cr�dits atteindraient 2.324 milliards de dinars. Les banques publiques en sont le principal allocataire. Leurs fonds propres ont connu une croissance en hausse du fait de leur assainissement, de la r��valuation de leurs actifs et des r�sultats positifs qu�elles ont enregistr�s en 2007 : le retour sur capital ou investissement a ainsi �volu� de 3% en 2003 � 25% en 2007 (de 25 � 27 pour les banques priv�es). Les grands projets (eau, �lectricit�, transport, p�trochimie) sont financ�s par des groupements de banques. La situation du Tr�sor est �troitement li�e � celle du Fonds de r�gulation des recettes (FRR) qui, de l�avis du gouverneur de la Banque d�Alg�rie, exprime �la capacit� d��pargne financi�re nette du Tr�sor, donc de l�Etat (�), apporte des disponibilit�s de financement et permet d�envisager le moyen terme avec s�r�nit� �. Il est constitu� des exc�dents p�troliers (au-del� du seuil de 37 dollars le baril). D�un montant de 4047 milliards de dinars � fin juin 2008, il finance la r�duction de la dette interne et le d�ficit du Tr�sor. En effet, il est essentiellement utilis� pour la r�duction de l�endettement public, ramen� � un niveau �soutenable�. Si le prix du baril descend � son niveau actuel de p�r�quation (37 dollars) sur une p�riode de quatre ans, M. Djoudi anticipe �un statu quo avec un m�me niveau de d�penses et de financements �. A 65 dollars, il assurerait le financement total des �quilibres actuels sur une p�riode de cinq ans, sans affecter le montant des r�serves du FRR. Pour une fourchette large, de 78 � 100 dollars le baril de p�trole, il recommande �une expertise financi�re�. Par ailleurs, on ne souligne pas assez deux trends, m�me s�il reste � mesurer leur impact r�el, le premier pour freiner l��rosion des couches moyennes, le second pour consolider la stabilit� sociale : - Au titre des d�penses de fonctionnement, les r�mun�rations absorbent la part du lion (1000 milliards DA), suivies du soutien des prix de premi�re n�cessit� (200), du financement des h�pitaux (176), des EPICEPA, r�duction dette publique. - Les transferts sociaux participent � la formation du taux de rigidit� budg�taire (compos� des salaires et de la dette publique). Ils sont de 1083 milliards de dinars en 2008, soit 13,60% du PIB (contre 7,85% en 1999) et 22,15% du budget de l�Etat. Une gestion lourde qui invite l�Etat � r�occuper les hauteurs dominantes de l��conomie. M. Sid Ahmed Boukrami, commissaire g�n�ral au plan et � la prospective �conomique, plaide pour l�existence d�une vision dynamique jumel�e avec une politique �conomique, avec des objectifs hi�rarchis�s de long terme et des modalit�s �convenues � de mise en �uvre. Son appel s�accorde parfaitement avec d�autres lectures empreintes de lucidit� comme celle de l�ancien gouverneur de la Banque d�Alg�rie, Abderrahmane Hadj Nacer, ou de l�ancien ministre des Finances du gouvernement des r�formes, Ghazi Hidouci. Le premier constate, dans un entretien avec notre confr�re d� El Watan, El Kadi Ihsane, que la crise financi�re mondiale a mis � nu la faiblesse de �l�anticipation strat�gique� de l�Alg�rie. M. Hadj Nacer d�plore que l�Alg�rie ne se soit pas donn�, depuis trois ou quatre ans, les instruments financiers pour profiter des opportunit�s qui se sont ouvertes avec la d�valorisation des patrimoines, prendre des actifs technologiques � l�international et �acheter du temps en transf�rant les capitalisations de savoir-faire que nous avons perdues�. Il propose qu�une r�flexion strat�gique soit organis�e dans le pays face � �la guerre de position que la crise annonce�. �Nous achevons probablement un cycle long de Kondratieff. Au-del� de la ren�gociation internationale en cours, il nous faut une r�flexion strat�gique sur le long terme. L�Etat doit impulser un cadre pour cela. Nous devons donner un territoire � la nouvelle croissance et un nouveau contenu.� L�ancien ministre des Finances (1989-1991) dans le gouvernement Hamrouche, Ghazi Hidouci, est tout aussi sceptique. Dans un r�cent �change avec Fay�al Anseur, pour le nouveau site www.algeriefocus. com, il estime que �le discours, rare, mais surtout l�agitation de terrain, se manifestent par un m�lange h�t�roclite de recettes toutes faites sans id�es directrices et sans coh�rence, autoritarisme s�nile et capricieux bloquant tout d�bat, toute perspective de mouvement et ruinant la confiance des acteurs �conomiques n�cessaire � la production et au fonctionnement des march�s (...) �R�sultats : aucune lisibilit�, donc absence de cr�dibilit� interne et externe et perte de confiance des acteurs �conomiques ; c�est ce que les Alg�riens traduisent par �conomie en panne : une industrie publique et priv�e moribonde, des activit�s agricoles contrari�es par un environnement commercial et financier hostile, le pouvoir d�achat des revenus fixes d�truit par des prix align�s sur l�importation et une monnaie anormalement d�valu�e, tout cela se traduisant par l�affairisme nocif, le creusement des in�galit�s et la multiplication des drames sociaux� l�accumulation de mauvaises r�serves� Je ne per�ois l�existence ni d�un mod�le �conomique lib�ral, ni dirigiste, ni par cons�quent des signes de changement. J�ai dit qu�on faisait n�importe quoi dans le d�sordre et qu�il est difficile d�y discerner du sens. J�ai plut�t le sentiment que nous nous �loignons, ce faisant, de plus en plus du monde en mouvement, ces pays �mergents qui se mettent � compter aujourd�hui et dont nous aurions pu faire partie. Quant au monde dominateur en crise, nous nous y amarrons, plut�t comme une colonie docile, fournissant du p�trole et sous-traitant sa gestion �conomique, mais aucunement comme partenaire. On est donc loin du risque que cela puisse nous faire du mal comme dans la Russie d�Eltsine. Le mal de ce type est d�j� fait, et � l�inverse de la Russie de Poutine, qui s�en sort plut�t bien, nous continuons de nous enfoncer dans la r�gression.� Et elle risque de ne pas �tre f�conde cette fois.