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FACE � LA M�DIATISATION DES AFFAIRES DE CORRUPTION QUI GANGR�NENT LES GRANDS CHANTIERS PUBLICS Le ministre de la Justice pr�f�re le silence, la discr�tion et moins de tapage !
Dans l'�dition d'El Watan du 10 d�cembre 2009, la journaliste Salima Tlem�ani a publi� une s�rie d'articles explosifs sous l'intitul� g�n�ral �Les scandales du chantier de l�autoroute Est-Ouest/De hauts responsables, un colonel et� Falcon�, articles non d�mentis � ce jour et qui contiennent nombre d'informations sur les pratiques de corruption qui gangr�nent les grands chantiers publics, plus particuli�rement le projet de l�autoroute Est-Ouest. Le gouvernement a r�agi le m�me jour par l'interm�diaire de son ministre de la Justice qui � curieux hasard � s'est fait poser des questions lors d'une s�ance au Conseil de la nation (S�nat) : la r�ponse de ce ministre est un morceau d'anthologie : face aux nombreux scandales de corruption qui sont r�v�l�s par la presse, il pr�conise le silence, la discr�tion et moins de tapage ! A une premi�re question d'un s�nateur sur le sort r�serv� aux affaires de corruption en Alg�rie, le ministre a r�pondu que �les investigations et l'action judiciaire dans des affaires de corruption exigent d�agir dans le silence et de faire preuve d�impartialit� et de retenue� : visiblement, le ministre ne cachait pas son irritation suite � l'enqu�te publi�e le m�me jour par El Watan. Journalistes, taisez- vous ! Ce qui risque d'annoncer de nouvelles repr�sailles les prochains jours de la machine judiciaire aux ordres de l'Ex�cutif contre la presse �crite qui ose encore divulguer des affaires de corruption, notamment celles o� sont impliqu�s de hauts fonctionnaires proches du pouvoir. Toujours lors de la m�me s�ance au Conseil de la nation, le ministre de la Justice a oubli� ses fonctions pour remettre sa robe d'avocat en d�clarant qu'il fallait �pr�server la dignit� et la r�putation du pr�venu dans ce genre d'affaires et de respecter la pr�somption d'innocence �. Et les �victimes� de la corruption, monsieur le ministre ? Ce dernier ira jusqu'� rassurer la repr�sentation nationale en ajoutant que �les institutions de l'Etat �uvraient au mieux en mati�re de lutte contre la corruption, que la discr�tion qui entoure les affaires de corruption visait � �viter tout tapage pour permettre � la justice de suivre son cours dans le cadre de la loi�. Mais alors que deviennent les grandes affaires de corruption pendantes depuis des ann�es aupr�s de la Cour supr�me o� sont impliqu�s des ex-walis et des ministres ? Le ministre de la Justice s'est m�me permis de rappeler �la ferme et rigoureuse volont� politique du pr�sident de la R�publique de lutter contre la corruption qui a des effets n�fastes sur la soci�t� � qui il incombe de lui faire face�. Est-ce que l'annonce le 28 octobre dernier par le chef de l'Etat de l'installation prochaine d'une �Commision nationale ad hoc� pour lutter contre la corruption est un signe de cette volont� politique ? Mais au- del� des faux discours minist�riels, la commande publique est tr�s largement �clabouss�e par toutes sortes de pratiques de corruption impliquant de nombreux hauts fonctionnaires, le tout dans un climat d'impunit� g�n�ralis�e o� sont �trangement �pargn�s leurs chefs hi�rarchiques �ministres et walis. Cette main basse sur les gros contrats publics est une des r�sultantes de la �d�mocratisation� du gr� � gr� instaur�e � plusieurs reprises par le Conseil des ministres pr�sid� par le chef de l'Etat. Les pratiques de corruption dans les march�s publics... La passation et l�ex�cution des commandes publiques sont l�aboutissement de processus souvent longs qui donnent aux intervenants, � tous les stades de la proc�dure, de nombreuses opportunit�s de corrompre. Les pratiques malhonn�tes peuvent intervenir au cours des deux grandes phases du processus, lors de l�attribution puis de l�ex�cution du contrat. La phase de passation du march� donne lieu � des pratiques visant l�attribution ill�gitime du contrat ou sa �vente� au plus offrant. Au cours de l�ex�cution du contrat, les pratiques ont pour objectifs le recouvrement des sommes d�pens�es pour �l�achat� du contrat, le d�tournement de fonds en complicit� avec le contractant ou la simple extorsion lorsque le contractant n�est pas impliqu� dans les pratiques malhonn�tes. ...Pendant la passation du march�... Cette phase du processus se pr�te � de nombreuses pratiques malhonn�tes dont les plus courantes sont les suivantes : sp�cifications et lotissements orient�s des prestations ; limitation de l�information ; non-diffusion de l�information au m�me moment � tous les concurrents ; cr�ation artificielle d�ambiance d�urgence pour �viter la mise en concurrence ; non-objectivit� des crit�res de qualification ; dissimulation de crit�res de qualification ; formation d�ententes entre les fournisseurs ; effet de surprise dans le lancement des appels d�offres ; abus de la r�gle de l�entente directe ; fractionnement artificiel ; sur ou sous-�valuation de l�estimation ; non-respect de la confidentialit� des offres avant leur d�pouillement, etc. Et cette liste n'est pas exhaustive ! L�approche la plus directe consiste � s�arranger pour que le contrat soit attribu� au soumissionnaire pr�f�r� par le biais de n�gociations directes sans mise en concurrence. M�me dans le cas de proc�dures de passation avec mise en concurrence, il existe en r�gle g�n�rale des d�rogations qui permettent de n�gocier de gr� � gr� (situations d�urgence, monopole). Lorsque les raisons qui sont invoqu�es pour �viter une mise en concurrence ne sont pas fond�es, il faut soup�onner une manoeuvre de dissimulation visant � couvrir des actes de corruption. M�me s�il y a mise en concurrence, il est toujours possible de favoriser un soumissionnaire. Il suffit par exemple de limiter la publication de l�appel d�offres � un journal peu lu pour restreindre le nombre des fournisseurs inform�s du march�, pratique tr�s fr�quente en Alg�rie et qui r�duit la concurrence et am�liore les chances du candidat �favori�. ...Manipulations du cahier des charges... On peut aussi d�finir des crit�res de qualification de mani�re � ce que seul un petit nombre d�entreprises puissent y satisfaire. Il est possible par exemple d�utiliser des noms de marques ou de sp�cifier le mod�le d��quipement par des dimensions, des performances sp�cifiques ou des caract�ristiques mineures que seul le fournisseur pr�f�r� peut satisfaire. La violation du principe de confidentialit�, condition essentielle de l�int�grit� du processus, est �galement une pratique possible, surtout lorsque les candidats ne sont pas autoris�s � assister � l�ouverture des plis. La proc�dure d��valuation offre �galement beaucoup de possibilit�s de favoriser un soumissionnaire. Les personnes responsables de l��valuation et de la comparaison des offres sont en mesure d�introduire de nouveaux crit�res ou de les appliquer subjectivement pour obtenir le r�sultat d�sir�. Cette pratique est rendue particuli�rement ais�e par un dossier de consultation d�lib�r�ment vague et obscur quant aux crit�res � satisfaire et � la mani�re de les appliquer. Ces techniques ne sont qu�un bref aper�u des possibilit�s de manipulation des proc�dures de passation des march�s publics. Les acheteurs ne sont pas les seuls coupables. Ils sont tr�s souvent manipul�s par les fournisseurs, m�me s�ils ne r�sistent pas toujours avec beaucoup d��nergie. Pis encore, il arrive que les fournisseurs se mettent d�accord entre eux pour d�cider de l�issue de l�appel d�offres et �tablir leurs prix en cons�quence. Cette pratique, connue sous le nom d�entente sur appel d�offres, garantit une compensation p�cuniaire aux perdants. Cette man�uvre s�effectue � l�insu de l�acheteur et souvent sans �veiller ses soup�ons, � condition qu�elle ne se reproduise pas trop souvent et soit accomplie avec habilet�. Mais, dans tous les cas, elle reste difficile � prouver et � sanctionner. ...Pendant l�ex�cution du march� et � la r�ception Il existe �galement � ce stade du processus de nombreuses pratiques douteuses dont les plus courantes sont les suivantes : le non-respect des normes de qualit� et des sp�cifications du march� ; le non-respect des d�lais ; la surfacturation ; la facturation de prestations fictives ; le retard ou l�anticipation des r�glements ; l�abus de la pratique des avenants, etc. L�attribution d�un march� public selon les r�gles, au terme d�un processus transparent, ne garantit pas qu�il soit exempt de tout acte de corruption pendant son ex�cution. Mais il est clair que lorsque les vendeurs ont pay� des pots-de-vin ou propos� des prix tr�s bas durant l�appel d�offres, afin de se voir attribuer le march�, leurs chances de compenser leurs pertes se situent pr�cis�ment durant son ex�cution, en ayant recours � des pratiques frauduleuses. Au cours de la phase d�ex�cution, l�acheteur comme le vendeur peuvent prendre l�initiative de corrompre. Mais pour que la corruption ait lieu, il faut le consentement de l�autre partie, sa n�gligence dans l�ex�cution de ses obligations ou sa complicit�, voire sa collaboration active. Les fournisseurs sans scrupules peuvent substituer des produits ou des prestations de qualit� inf�rieure � celle exig�e ou pr�vue dans leur offre. Ils peuvent �galement falsifier les quantit�s de biens livr�s ou de services rendus, lorsqu�ils soumettent leurs demandes de paiement et soudoyer les personnes charg�es de contr�ler l�ex�cution du march�. Il est important de noter que la corruption pendant cette phase ne suppose pas automatiquement la complicit� �volontaire� du fournisseur. Celui-ci peut �tre soumis � des pratiques d�extorsion par le retardement de ses paiements ou la contestation de la r�ception des travaux pour des motifs infond�s, etc. Il est � craindre que ces pratiques g�n�ralis�es de corruption dans les grands march�s publics ne se poursuivent dans la gestion du nouveau programme de chantiers publics dont le budget d�gag� est de 150 milliards de dollars pour les 5 prochaines ann�es.