� 20:35 (Japon, 1954, 193mn, VOSTF) R�alisateur : Akira Kurosawa Acteur : Daisuke Kato, Minoru Chiaki, Seji Miyaguchi, Takashi Shimura, Toshiro Mifune, Yoshio Inaba En 1652 au Japon, un groupe de brigands souhaitent piller les r�coltes d'un village de paysans. Alert�, le sage du village d�cide d'engager des samoura�s afin de se prot�ger de cette menace... Monument du cin�ma japonais mais aussi mondial, Les sept samoura�s (Lion d'argent au festival de Venise en 1955) r�alis� par Akira Kurosawa (Ran, Vivre, Kagemusha...) fait indubitablement partie des chefs d'�uvre universels enfant�s par le septi�me art. Plus qu'un simple film, il s'agit d'une exp�rience � vivre, de simples mots ne suffisant pas � caract�riser la richesse de cet objet d'adoration. B�n�ficiant de moyens colossaux pour l'�poque, tourn� pendant une ann�e enti�re, ce film consacra la supr�matie du cin�ma japonais sur le cin�ma asiatique durant les ann�es 50 � 70 et fit �merger deux figures de proue, qui 50 ans plus tard, rayonnent toujours de la m�me intensit� : le r�alisateur Akira Kurosawa et l'acteur Toshiro Mifune. Cette �uvre �pique, si elle l'est dans l'intensit� de sa narration, alternant les sc�nes de combats (assez sauvages pour un Kurosawa d'ailleurs) � celles dramatiques et humoristiques, l'est aussi dans sa dur�e : en effet Les sept samoura�s, c'est avant tout 3h15 de bonheur. Une dur�e assez cons�quente qui demande une certaine attention, mais l� o� le r�alisateur prouve son incontestable talent, c'est qu'il parvient � faire para�tre son tr�s long m�trage presque trop court. Un rythme endiabl�, guid� par des acteurs tous magnifiques et un sc�nario passionnant, finissent par convaincre quiconque aurait quelques pr�jug�s n�gatifs quant � la dur�e (qui coupl�e au noir et blanc et au son mono ne sont pas des atouts s�ducteurs). Concr�tement, si le film se laisse suivre aussi bien, c'est surtout parce qu'il a b�n�fici� d'un d�coupage intelligent, trois parties distinctes, toutes aussi int�ressantes : la premi�re partie concerne le recrutement des protecteurs, les villageois ayant eu vent de l'arriv�e d'une bande de brigands d�cident d'engager des samoura�s dans le but de d�fendre leur village, leurs femmes et leurs r�coltes. Cependant, pauvre sans un sou, ils ne peuvent payer leurs protecteurs que par un bol de riz � chaque repas. D�sesp�r�s, ils finissent par rencontrer un d�nomm� Kambe� qui accepte de les aider au p�ril de sa vie, mais pour vaincre l'ennemi, ils devront �tre sept (il ne s'agit pas d'une superstition due au chiffre sept mais uniquement d'un besoin strat�gique). Une premi�re partie, d'un r�alisme stup�fiant, on est projet� 300 ans en arri�re, � l'�poque o� les r�nins couraient les villages � la recherche de travail, o� les paysans subissaient les dures lois des brigands et vivaient mis�rablement. Kambe� choisit d'aider ses pauvres paysans, par compassion envers cette population d�sarm�e et qui n'a d'autres choix que de subir la loi du plus fort. Altruisme et humanisme, les deux vecteurs de leur d�vouement pour cette cause qui ne leur portera ni gloire ni r�tribution. L'�panouissement personnel, la recherche de ses limites et de son courage seront les motivations int�rieures � chacun ! La deuxi�me partie concerne toute la pr�paration pour la d�fense du village mais aussi l'arriv�e des samoura�s aux villages, l'appr�hension des villageois et la connaissance en profondeur de chaque personnage, les personnalit�s prenant toute leur envergure ici m�me. Le r�alisateur met l'accent sur le foss� culturel existant entre le monde rural et citadin. Offrant leur vie pour cette cause, les samoura�s n'en sont pas moins accueillis de bien pi�tre mani�re, le village se d�sertant � l'annonce de leur arriv�e. La peur provient souvent de l'ignorance, et l'image des samoura�s qu'ils ont est celle de violeurs, profiteurs, d'o� l'appr�hension de recueillir de tels personnages dans leur village. Les filles sont cach�es ou v�tues � la gar�onne afin d'�viter toute s�duction. Pourtant, les liens vont petit � petit se tisser, et la d�fense du village ainsi que les rep�rages du camp ennemi vont pouvoir d�buter. Jouissif, l'aspect strat�gique d�ploy� au sein du village passionne, la fibre aventuri�re, disparue depuis longtemps des nouvelles productions, est ici plus pr�sente que jamais. Enfin, la derni�re partie, in�luctable, celle que l'on attend depuis les premi�res minutes du film : l'attaque des brigands. Doucement violente (le noir et blanc adoucit la violence), elle est en tout point de vue parfaite, film�e de main de ma�tre, avec en prime la tomb�e d'une averse durant le combat donnant lieu � une sc�ne d'anthologie (dont Takeshi Kitano s'inspirera dans Zatoichi). Une bataille plac�e sous le signe du courage et de l'honneur (� l'image de Kikuchiyo mourrant comme un samoura�, et sauvant honneur et dignit� en tuant d'un dernier �lan son meurtrier). Un final apocalyptique d�bouchant sur une question existentielle devant ce lourd bilan : qui sont les gagnants de ce conflit finalement. Techniquement, Les sept samoura�s se laissent toujours autant appr�cier 50 plus tard, c'est dire si, lors de sa r�alisation, le niveau atteint par Akira Kurosawa �tait tout simplement hallucinant. L'image en noir et blanc est tout � fait appropri�e, contribuant � l'immersion dans le Japon f�odal et rajoute une touche �pique ind�niable � l'�uvre (le cin�ma de Kurosawa en noir et blanc se distingue d'ailleurs de celui qu'il pratiquera par la suite en couleur, beaucoup plus th��tral). Ses plans sont cadr�s au millim�tre pr�s et le souci de perfection (que l'on peut retrouver aujourd'hui dans les �uvres de Wong Kar Wai) qui s'en �mane n'en est que plus palpitant. L'�uvre poss�de une dimension irr�elle tellement elle est exempte de reproches. Une perfection que l'on retrouve m�me dans le casting o� tous les acteurs, sans exception, livrent une interpr�tation exemplaire, avec un Toshiro Mifune sensationnel, extraordinaire, incroyablement charismatique dans le r�le d'un paysan devenu samoura�. D'une justesse incroyable, son jeu � mi-chemin entre la brute impulsive et le h�ros au grand c�ur est parfait, un r�le de composition, le r�le de sa vie. La renomm�e plan�taire qu'il conna�tra suite au film est amplement m�rit�e, et Akira Kurosawa en fera son acteur f�tiche puisqu'on le retrouvera dans nombre de ses �uvres dont Yojimbo, Sanjuro ou encore Le ch�teau de l'araign�e. Culte et exemplaire, Les sept samoura�s est une �uvre incontournable du cin�ma asiatique et mondial, un chef d'�uvre universel passionnant qui se doit d'�tre vu et revu. Cinquante ans apr�s, le film n'a pas pris une ride, et se laisser d�courager par sa relative longueur serait regrettable tant il s'agit l� d'un authentique moment de cin�ma. (Allocin�).