C'est les vacances scolaires depuis quelques jours. On a beau dire, il y a quand même une sacrée dose d'ironie que les cours reprennent au moment où ils devaient... s'arrêter pour que les enseignants et les élèves se reposent d'un effort plus ou moins mérité. Il y a de l'ironie mais il y a surtout du cynisme. Sortir d'un long et controversé – restons gentils dans le choix des mots – débrayage pour partir en vacances pousse un peu plus loin le ressentiment populaire envers une corporation dont les termes et la durée de la contestation n'étaient déjà pas faits pour leur valoir beaucoup de sympathie. Aux appréciations de fond s'est donc greffée une coïncidence -enfin si c'en est vraiment une – qui, par sa symbolique morale, compromet encore plus le lien social dont la nature est d'une extrême sensibilité. A quelques jours près, voici ce qu'on avait écrit dans ce même espace, dans un contexte quasi similaire : «Bien sûr, formellement, les enseignants avaient de quoi expliquer et le début et la fin d'un débrayage monstrueux qui a soulevé l'indignation des plus paisibles, y compris au sein de leur propre corporation. Certains d'entre eux, qui avaient pourtant partagé l'essentiel de leurs revendications et à un degré moindre la manière d'exprimer leur colère, ne comprenaient pas en effet qu'on puisse aller aussi loin dans le chantage et être à ce point sourds aux appels à la responsabilité. De leurs propres rangs et à leur périphérie, des voix qui n'en pouvaient plus face à l'outrage fait à l'école se sont même élevées, avec parfois des «révélations» qui laissent perplexes. Beaucoup des enseignants grévistes les plus enflammés n'ont pas été vus une seule fois dans l'enceinte de leurs établissements. Au piquet de grève, ils ont préféré vaquer à d'autres occupations. La cueillette des olives comme en Kabylie, le petit business partout ailleurs et parfois suprême fumisterie, les «cours de soutien» dispensés dans de sordides garages contre rémunérations sonnantes et trébuchantes... à leurs propres élèves dans l'école publique ! Dans cette grève dont on n'entrevoyait pas la fin, la tutelle n'est évidemment pas au-dessus de tout reproche. Sinon, on le saurait et l'école ne serait pas au point où elle en est. Mais on pensait naïvement qu'une école déjà si mal en point pouvait faire l'économie, non pas de la grève, c'est un droit, mais de la folie furieuse. Mais pour en arriver à ce niveau de décrépitude, il fallait bien une «conjugaison d'efforts» dont on vient de vivre l'un des épisodes les plus caractéristiques. Un mois de débrayage plus tard, le ministère de l'Education nationale nous apprend que les dégâts pour les candidats au bac n'étaient pas si graves que ça puisqu'ils pouvaient être réparés par des cours de rattrapage. Depuis, ça n'a pas beaucoup changé. Même les petites «coïncidences» et d'autres petits détails sont encore là.