Les Etats-Unis et la Russie sont parvenus à un accord sur le démantèlement complet de l'arsenal chimique syrien d'ici la mi-2014, ont annoncé hier les chefs des deux diplomaties, John Kerry et Sergueï Lavrov, au cours d'une conférence de presse conjointe à Genève. À l'issue de presque trois jours de discussions, Washington et Moscou se sont entendus sur le nombre et le type d'armes chimiques pour lesquels la Syrie doit fournir une liste précise d'ici une semaine, a déclaré le secrétaire d'Etat américain. Les deux pays sont d'accord sur «la méthode à appliquer pour l'élimination des armes chimiques» et appellent Damas à autoriser les experts des Nations unies à inspecter tous les sites de stockage, a-t-il ajouté. Les inspecteurs de l'ONU chargés du désarmement, a poursuivi John Kerry, devront se trouver sur place d'ici la fin novembre, afin de permettre la destruction complète des stocks d'armes chimiques d'ici le milieu de l'année prochaine. Liant le démantèlement de l'arsenal chimique aux préparatifs de la conférence de paix dite de «Genève II», John Kerry a précisé que le régime de Bachar al Assad s'exposerait à des mesures prises sous le Chapitre VII de la Charte des Nations unies - possibilité de sanctions et de recours à la force - s'il ne respecte pas ses obligations sous la supervision de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC). Sergueï Lavrov a insisté pour sa part sur le fait que l'accord actuel, fruit de «consensus et de compromis», ne prévoyait rien sur un recours à la force ou sur des sanctions automatiques en cas de défaillance des autorités de Damas. «Le Conseil de sécurité de l'ONU va réagir si la Syrie viole ses engagements concernant les armes chimiques sur lesquels Moscou et Washington sont tombés d'accord à Genève», a déclaré le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov. «En cas de non-respect des exigences (dans le cadre de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques) ou en cas d'utilisation d'armes chimiques par qui que ce soit, le Conseil de sécurité de l'ONU va prendre des mesures dans le cadre du chapitre 7 de la charte de l'ONU sur le recours à la force», a-t-il dit. Tout en laissant entendre que la Russie pourrait dans l'avenir soutenir un recours à la force, M. Lavrov a prévenu que Moscou vérifierait minutieusement tous les rapports accusant le gouvernement syrien. Cela ne veut évidemment pas dire qu'on croira à tout cas de violation rapporté devant le Conseil de sécurité de l'ONU sans le vérifier, a souligné le ministre. «Il y a tant de mensonges et de falsifications dans ce dossier aujourd'hui dans le monde qu'il faut être extrêmement prudent», a-t-il ajouté. M. Lavrov a également dénoncé des tentatives de certains médias de miner les efforts visant à calmer la situation en Syrie, notamment ses pourparlers à Genève avec John Kerry. M. Lavrov a également estimé que l'objectif de mettre sous contrôle les armes chimiques syriennes fixé par les présidents Poutine et Obama avait été atteint au cours des discussions russo-américaines à Genève. L'objectif fixé en septembre par les chefs d'Etat russe et américain (...) pour mettre sous contrôle les armes chimiques syriennes a été atteint, a déclaré M. Lavrov. Les documents adoptés à l'issue de ces discussions sont ceux de consensus, de compromis et professionnels, a-t-il précisé. «Moi-même et (le secrétaire d'Etat américain John) Kerry avons confirmé notre adhésion à un règlement pacifique en Syrie», a-t-il souligné. Le chef de la diplomatie russe a souligné que les deux pays avaient trouvé une solution dans un délai record. «Avec la bonne volonté et les directives données par nos chefs d'Etat, la Russie et les Etats-Unis peuvent agir avec succès pour résoudre les problèmes mondiaux y compris en ce qui concerne les armes de destruction massive», s'est-il félicité. Londres et Paris approuvent l'accord de Genève L'accord conclu hier entre les Etats-Unis et la Russie sur le démantèlement complet de l'arsenal chimique syrien d'ici mi-2014 constitue «une avancée importante», a déclaré le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius. «La réunion du lundi 16 septembre à Paris avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni permettra d'en discuter le contenu ainsi que les conditions d'approbation et de mise en œuvre», a-t-il indiqué dans un communiqué. De son côté, le Royaume-Uni a salué hier l'accord entre les Etats-Unis et la Russie pour l'élimination de l'arsenal d'armes chimiques syrien, a déclaré le chef de la diplomatie britannique, William Hague, estimant que la priorité devait désormais être l'application rapide et complète du texte. Dans un communiqué publié hier, M. Hague, qui a qualifié l'accord d'avancée significative, a estimé que la priorité devait désormais être l'application rapide et complète du texte et de s'assurer que les armes chimiques soient placées sous contrôle international.La responsabilité incombe désormais au régime d'Assad de respecter cet accord dans sa totalité. L'opposition rejette Les ententes russo-américaines sur les armes chimiques en Syrie ne concernent pas les groupes armés de l'opposition syrienne qui continueront à se battre contre le régime de Bachar el-Assad, a déclaré hier le chef d'état-major du conseil militaire suprême de l'Armée syrienne libre (ASL), le général Selim Idriss. «Nous ne reconnaissons pas l'initiative russe [sur les armes chimiques] et croyons qu'il s'agit d'un jeu mené par la Russie et la Syrie en vue de gagner du temps pour le régime de Bachar el-Assad», a affirmé M. Idriss. «Nous continuerons à œuvrer pour le renversement d'Assad. Ces ententes [entre Washington et Moscou] ne nous concernent pas», a ajouté le général. M. Idriss avait auparavant rejeté l'initiative russe visant à placer les armes chimiques sous contrôle international. La Coalition nationale de l'opposition syrienne s'est également prononcée contre le projet russe, le qualifiant de «manœuvre politique inacceptable».