L'œuvre du comédien, dramaturge, écrivain et maître de conférences, le Dr Salah Lombarkia, est introuvable sur les étagères de la bibliothèque, de la maison de la culture et des centres de la culture de la wilaya de Batna. L'œuvre de Salah Lombarkia n'est même pas lue et pas du tout étudiée même à la faculté où il avait passé toute sa vie à enseigner et à encadrer (1984-2015). Point n'est besoin de rappeler que c'est le même sort qui est réservé à tous ses prédécesseurs hommes de lettres de la ville de Batna, à l'image de l'écrivain et dramaturge Chebbah El-Mekki (1894-1990), l'essayiste et penseur Hamouda Bensaï (1902/1998) et l'écrivain El-Hachemi Saïdani décédé en 2005) et d'autres. La liste pourrait être plus longue, si nous nous mettions à citer tous les hommes de lettres de la ville de Batna, marginalisés de leur vivant et oubliés après leur mort. Certains vous disent que c'est une culture dans cette ville, ancienne caserne de l'armée française où l'on s'ingénie à rogner les ailes aux écrivains de leur vivant pour qu'ils n'écrivent pas, à les étouffer, les marginaliser pour qu'ils ne les dérangent plus et à faire tout pour les faire oublier. Pourquoi ? C'est vrai qu' «il est plus difficile d'être apprécié ou reconnu chez soi qu'à l'étranger». Salah Lombarkia avait à son compte une œuvre dramatique d'une dizaine d'écrits dont la plupart avait été publiée à compte d'auteur en 2005, sans compter les écritures collectives, les adaptations et les opérettes, qui étaient en voie de publication. Une œuvre très riche Cette œuvre se compose des publications théâtrales telles que Ethaoura, Ennar Ouennour, El-Falaqa, Madani Fi Qaria, El-Qadhia, El-Hamama (pièce pour enfants) et Fatima (pièce théâtrale du patrimoine populaire), Benboulaid. Il a également écrit deux opérettes parues dans le magazine Amel et montées sur scène plusieurs fois par le théâtre régional de Batna et les associations théâtrales de la même ville. Salah Mombrakia a également laissé plisuers ouvrages notamment La Construction de la personnalité dans le théâtre d'Alfred Farag et Le théâtre en Algérie en deux tomes, le premier intitulé Naissance et les pionniers algériens, le deuxième Etudes des textes. L'œuvre de Salah Lombarkia dépeint la réalité véritable sans se cacher ou argumenter à l'aide d'artifices et autres illusions ou idées imaginaires et les principaux thèmes qui sont approchés dans ce mouvement sont l'influence de leur milieu sur les individus, les différences entre une vie urbaine et provinciale ainsi que les misères et les ascensions sociales. Ces écrits représentent le monde contemporain, social et national et critiquent fortement les conditions sociales ou la société de son temps. Sensibilisation Dans ses ouvrages, Salah Lombarkia dépeignait la réalité ou le quotidien vécu avec réalisme. Il s'était fixé de montrer à son contemporain, les défauts, les travers et les vices de la période des années 1970 et 1980, dans le but de les sensibiliser, les éclairer et l'amener à une prise de conscience. Tous les comédiens de son époque et quelques lecteurs de ses pièces théâtrales interrogés s'accordent à dire que les écrits de Salah Lombarkia ne sont pas polémistes et pamphlétaires, mais qui agissent dans l'intérêt de la construction, l'édification, le développement, le changement social et politique du pays. A ce sujet, l'animateur et metteur en scène Chouaïb Bouzid, explique : «L'œuvre de Salah Lombarkia n'avait pas pour vocation de susciter la révolution sociale ou la rébellion contre le régime de l'époque, mais elle était considérée comme un instrument d'analyse et de réflexion propre à remettre en question la société où il vivait pour corriger les tares et les vices, qui paralysaient la région et à rejoindre le train des pays développés et civilisés». Les intrigues des écrits de Salah Lombarkia sont tirées essentiellement des faits divers, du quotidien vécu où de ce qui se racontait dans son milieu, dans sa ville, dans sa région, dans son pays tout en restant fidèle à un langage approprié à chaque personnage et à son milieu, et ayant l'amour du «fait vrai». Le dramaturge avait cherché, non pas à nous montrer la photographie banale de la vie, mais à nous en donner la vision plus complète, plus saisissante, plus probante que la réalité même. Les œuvres de Salah Lombarkia racontent le quotidien tout cru. Il dénonçait les maux qui le tenaient le plus, le favoritisme, les pots de vin, l'injustice. Il avait tenté de protéger le peuple, de l'avertir sur les conséquences des méfaits sociaux et politiques de son époque. Marginalisation Certes, cet homme de théâtre et de lettres n'avait pas souffert de l'exil et de la prison pour avoir exprimé haut et fort ses opinions et pour avoir simplement rêvés de liberté, mais il avait été mis à l'écart d'une manière plus douce, pour le détourner de ses écrits et de ses idées. Très en avance sur son époque, Salah Lombarkia avait cherché juste à améliorer une société aux inégalités flagrantes et aux mœurs injustes et abusives. Ses témoignages sont de nos jours les récits poignants des vestiges du passé. A travers ses écrits, le lecteur devine que cet homme avait participé à l'évolution des mentalités et était le porte-parole de la liberté d'expression les années 1970 et 1980. Ses opinions et ses combats se reflètent dans ses œuvres et les actes qu'il a accomplis. Que ses détracteurs le veuillent ou non, Salah Lombarkia avait l'esprit de ces grands hommes qui sont les gardiens, les portes paroles et les précurseurs de la liberté d'expression en Algérie et essentiellement dans les Aurès. A quand verrons-nous ses écrits sur les étagères de nos bibliothèques ? C'est un autre combat à mener.