Les tortures pratiquées durant la Révolution par l'armée coloniale ont constitué l'essentiel des témoignages recueillis lundi par l'APS dans la localité Zighoud-Youcef (Constantine), à l'occasion de la commémoration du 57ème anniversaire de la mort du martyr dont cette commune porte le nom. "Les mots ne peuvent pas décrire à eux seuls la monstruosité des supplices endurés par des Algériens suspectés d'entretenir des liens avec l'Armée de libération nationale", souligne Ahmed Zaer, moudjahid, ancien détenu au centre de torture de Condé-Smendou, ancien nom de cette ville. Agé de 72 ans mais encore très alerte, Ahmed se souvient que l'on entassait nus, à même le sol, une moyenne de 70 Algériens à la fois dans une sorte de cave obscure, non aérée et ne dépassant pas les 5 m2, dans une bâtisse isolée qui servait, avant le déclenchement de la Révolution, de caserne de la gendarmerie française. avant de la transformer, en 1956, en un endroit régional de torture", a-t-il affirmé. "Les Algériens arrêtés étaient jetés sans ménagement dans cet espace exigu où l'on ne pouvait même pas s'allonger, en attendant les séances tant redoutées des interrogatoires à l'issue desquelles on était soit libéré, soit enfermé dans une prison ou interné dans le centre de concentration d'El Djorf (M'sila) ou d'Ain Oussera, ce qui a été mon cas", affirme le vieil homme. L'arrachage des ongles, la privation de sommeil, le poivre dans les zones sensibles, la fixation de la tête dans des cuves remplies d'eau et la "gégène" de sinistre mémoire étaient les principales méthodes de torture dans ce centre. Un centre pour la réhabilitation duquel des fonds publics sont prévus, selon les responsables de la wilaya de Constantine présents à la cérémonie de commémoration de la mort au combat du chahid Zighoud-Youcef. Né le 18 février 1921, ce héros de la lutte armée a adhéré dès l'âge de 17 ans au Parti du peuple algérien (PPA) dont il fut, en 1938, le premier responsable, à Smendou. Il fit partie, en 1947, de l'Organisation spéciale (OS) qui devait préparer la Révolution qui sera déclenchée, dans les Aurès, le 1er novembre 1954. Arrêté en 1950 et incarcéré à Annaba, il s'évadera en avril 1954 pour entrer dans la clandestinité et s'engager dans l'action militante du Comité révolutionnaire pour l'unité et l'action (CRUA). Le 1er novembre 1954, il est aux côtés de Didouche Mourad, responsable du Nord-Constantinois qui devait devenir la wilaya II historique. Lorsque Didouche fut tué en janvier 1955, Zighoud Youcef le remplaça à la tête de la région pour diriger peu après la fameuse offensive du 20 août 1955 qui fut une éclatante démonstration de la mobilisation populaire pour la liberté. Zighoud Youcef tomba au champ d'honneur dans une embuscade de l'armée française à Sidi Mezghiche, dans la wilaya de Skikda, le 25 septembre 1956, à l'âge de 35 ans.