Djamel Allam, le précurseur de la chanson moderne kabyle, a été inhumé, hier, au cimetière Sidi Mhamed Amokrane. Djamel Allam, l'artiste qui a su harmonieusement marier les mélodies proprement kabyles avec les accords modernes pour donner d'inoubliables chansons comme «Tella», «Urettru» ou «Ma ara d-yughal» a été accompagné hier, à sa dernière demeure au cimetière central de sa ville natale par une impressionnante foule d'anonymes, d'amis, d'artistes et d'officiels. La dépouille du chanteur est arrivée à l'aéroport Abane Ramdane de Béjaïa à neuf heures, passant par le salon d'honneur, où l'attendaient des membres de sa famille, le ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi, le ministre de la Jeunesse et des Sports, Mohamed Hattab ainsi que le directeur général de l'ONDA Sami Bencheïkh El Hocine. Beaucoup d'artistes ont fait le voyage depuis Paris comme le musicien et compositeur Safy Boutella, Kamel Hamadi et Akli D. Après une brève halte au domicile familial sis à la cité des 600 logements à Ihaddadène, la dépouille a été transportée au Théâtre Régional Abdelmalek Bouguermouh où des milliers de personnes sont venues jeter un dernier regard sur l'auteur du mémorable «Gatlato». Emotion L'émotion a atteint son paroxysme lorsque le cercueil est posé délicatement dans le hall du théâtre régional. A ce moment, des youyous fusèrent de la foule. Images insoutenables pour ses nombreux amis qui ont cru qu'en dépit de sa maladie, que «Djamel allait s'en sortir, d'autant qu'il ne donnait jamais l'impression de quelqu'un qui luttait contre le mal qui le rongeait», raconte un ancien de ses camarades de conservatoire de Béjaïa. Les chanteurs étaient tous unanimes à souligner le talent de Djamel Allam. «Lorsqu' il était venu me voir à la radio, je n'ai pas hésité un instant à prêter une oreille attentive à ses mélodies. Je l'avais invité à une de mes émissions et l'ai encouragé à enregistrer en le recommandant aux éditions Oasis», dira Kamel Hamadi. Bélaid et Idir du groupe Tagrawla ont souligné l'apport de Djamel Allam à la chanson moderne kabyle. «Il faut être un génie pour produire des arrangements comme seul Djamel savait en faire. Ce n'était pas facile d'introduire des accords modernes et des arpèges dans la gamme musicale kabyle de l'époque, mais Djamel Allam a réussi et a ouvert la voie à d'autres chanteurs qui ont fait l'épopée de la chanson moderne», expliquera Belaïd Tagrawla. Le Mentor Le soliste du même groupe, Idir, avouera que tous les chanteurs modernes ont commencé par reprendre dans les galas et les soirées les chansons de Djamel Allam. «Il était en quelque sorte notre mentor», dira-t-il. Aveu que partage également Akli D. qui reconnaît avoir beaucoup appris avec Djamel Allam. «Je suis triste car nous sommes quelque part perdus car la chanson moderne kabyle est aujourd'hui orpheline». Khaled Louma, leader du mythique groupe rock T34, et animateur de l'émission Vibrato de la radio chaîne 3, qui est arrivé la veille d'Alger, est sans doute le plus touché. «Nous avons accompagné Djamel Allam pendant des mois lors de tournées mémorables à travers le pays. C'était quelqu'un de très attachant. Je perds en lui un grand ami», dira, très abattu, l'interprète de «Jamais doukh».