La procession humaine est immense. Parmi la foule qui scande des slogans anti-système, beaucoup de femmes et des familles entières ayant pris part à cette marche. Ils sont venus de partout. Une véritable marée humaine ! Des foules imposantes ont envahie, hier, toutes les rues principales de la capitale. Ce 1er mars 2019 est un véritable moment historique pour le pays. Des centaines de milliers de citoyens ont marché pacifiquement à Alger, contre un 5e mandat du président sortant, Abdelaziz Bouteflika. De la place du 1er mai à la rue Hassiba Ben Boulaid, vers la rue Colonel Amirouche, de la Grande Poste en allant vers la place Maurice Audin, de la rue Didouche Mourad, ou encore venant du Boulevard Mohammed 5, des centaines de milliers de manifestants de différents ages et sexes, ont donné une véritable leçon de civisme au monde entier. Emblème nationale et pancartes à la main, des jeunes et des moins jeunes ont scandé «Non au 5e mandat», et d'autres slogans hostiles à Bouteflika et à son régime. La procession humaine est immense. Parmi la foule qui scande des slogans anti-système, beaucoup de femmes et des familles entières ayant pris part à cette marche. Contrairement à la marche du 22 février, la réussite de celle de ce vendredi 1er mars a été remarquable. Les marches de ce 1er mars sont beaucoup plus imposantes que celles du 22 février, qui avaient déjà émerveillé l'Algérie et le monde. À 14h00, au tout début des marches, la rue Hassiba-Benbouali, l'une des plus longues d'Alger, la rue Didouche-Mourad et tous les environs de la Grand-poste, étaient déjà pris d'assaut par des dizaines, peut-être des centaines de milliers de citoyens. Toutes les générations, corporations, et couches de la société, hommes, femmes, enfants, moudjahidine, chômeurs et hommes d'affaires, sont tous sortis dire non à une mandat et demander un changement pacifique. Bouhired, Oughrout, Djabellah, Laskri… Plusieures personnalités emblématiques connues sur la scène nationale ont pris part à cette marche pacifique. On citera entre autre, la présence de l'icône de la Guerre de libération nationale, Djamila Bouhired parmi les manifestants. Des politiciens, comme les responsables du parti du FFS, Ali Laskri et d'autres membre de son instance. Djabbellah, président du parti FJD, Ali Benflis également. Des avocats et militants des droits de l'homme étaient aussi présent : Maître Bouchachi, ou encore Mokrane Aït Larbi. «Le peuple est dans la rue. Personne n'a le droit de voler la victoire du peuple», ont-il dit. Des journalistes de la télévision publique comme Soraya Bouamama, et des comédiens, comme le célèbre Salah Oughroute, la comédienne, Farida Krim «Khalti Boualem» et le jeune chanteur Amine du Groupe Babylone, ont brillé notamment, pour leur présence dans cette marche contre le 5e mandat de Bouteflika. La mobilisation a été au rendez-vous. Toutes les franges de la société étaient présentes, même Issad Rebrab était sur Alger. Même celles restées chez elles ont participé aux marches à leur manière, en lançant des youyous à partir des balcons, en brandissant l'emblème national et en balançant des bouteilles d'eau aux manifestants. Quelques heurts… C'est aussi avec satisfaction qu'a été relevé que le caractère pacifique de la contestation. Tout ce monde dans la rue en même temps et pas un seul incident majeur. Hormis quelques échauffourées enregistrées sur la place 1er Mai, à la sortie de Bab El oued et Bab Azoune, où les agents de l'ordre public ont usé de lacrymogènes pour disperser les foules devenues de plus en plus compactes et difficiles à quadriller. Des heurts ont éclaté avec les forces de l'ordre, qui ont fait usage de gaz lacrymogènes, contre les manifestants se dirigeant vers le palais d'El Mouradia. Mais dans l'ensemble, les manifestations se sont déroulées sans heurts. Les manifestants ont répondu de la plus civilisée des manières à ceux qui, la veille encore, brandissaient l'épouvantail du chaos et du retour aux années de braise. «En Syrie aussi, ça avait commencé avec des roses…», avait déclaré le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, jeudi devant les députés.Ce dernier a eu sa part de contestation de la part des manifestants. «Ouyahia, l'Algérie n'est pas la Syrie», a-t-on scandé. Tout au long des marches de ce vendredi 1er mars, les jeunes ont tenu à préserver le caractère non partisan de leur mouvement. Le candidat à la candidature, Rachid Nekkaz, a appris que la seule chose qui lui est permise dans ce genre d'événement, c'est de se fondre dans la foule. Sa tentative de s'adresser, à partir du balcon de sa permanence à Alger-centre, aux manifestants, a donné lieu à une colère saine de ces derniers. Si les choses n'ont pas dégénéré ce vendredi, il en sera ainsi dans les «prochains jours et semaines», avant l'élection présidentielle prévue pour le 18 avril prochain.