L'annonce du vice-ministre de la Défense, le général major de l'Armée nationale populaire (ANP), Ahmed Gaïd Salah, faisant état de la destitution de Bouteflika en se référant à l'application de l'article 102 de la Constitution, ne fait pas l'unanimité chez les constitutionnalistes. Des chercheurs en droit constitutionnel de l'Université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou qualifient cette initiative d'«anticonstitutionnelle et de saisine politique du Conseil constitutionnel». Pour la simple raison qu'«ils estiment que l'institution militaire n'est pas garante de la Constitution, mais que cette prérogative revient au chef de l'Etat», tout en appelant l'institution militaire à ne pas s'ingérer dans les affaires politiques si elle a une bonne intention d'accompagner le soulèvement populaire, comme cela été promis par Gaid Salah. «Il faut que cette institution reste dans sa mission protectrice de la sécurité du pays, et de laisser la politique à qui de droit», estime Mohamed Oumayouf, chercheur en droit constitutionnel au niveau de l'Université Mouloud Mammeri, invité de la radio locale. «Si on applique cet article de loi, cela veut dire que le peuple doute de la maladie du Président, qui est en convalescence depuis 2013, et qu'il était incapable de mener à terme son 3e mandat». Pour l'application de l'article 07 Par ailleurs, Oumayouf, qui s'exprimait sur les ondes de la radio locale, a rejeté la nomination du président du Conseil de la Nation, Abdelkader Bensalah, comme chef de l'Etat, du fait qu'il est l'une des figures incarnant le système en place. Une décision qui sera inévitablement le mot d'ordre de la sixième marche de ce vendredi du mouvement populaire. «Le peuple demande le départ non seulement du Président, mais des figures incarnant ce régime», dira Ouamayouf. «Cet homme n'a pas la nationalité algérienne d'origine, qu'il a acquise depuis 1964». Ceci dit que le président du Conseil constitutionnel n'est pas apte à conduire le pays pendant cette impasse. M. Oumayouf a pointé du doigt la défaillance du Conseil constitutionnel, qui n'a pas accompli sa mission en 2013. «La maladie du président a été remarquée par les Algériens depuis 2013, mais aussi son incapacité à mener sa prestation de serment après avoir brigué le 4e mandat en 2014. C'est à ce moment-là que le Conseil constitutionnel devait intervenir pour déclarer l'incapacité et l'empêchement légal du président de la République, mais malheureusement, cette institution n'a pas joué son rôle légal et a préféré s'abstenir». Parmi les propositions faites par M. Oumayouf pour une sortie évidente de cette crise, il a plaidé pour l'application de l'article 07, qui se résume à ce que le peuple est la source de tout pouvoir, et que la souveraineté nationale appartient exclusivement au peuple. Ainsi, il a proposé qu'après le départ du président de la République, l'institution militaire demandera à l'opposition politique de prendre en considération les revendications du peuple, et ce, par la mise en place d'une période de transition durant laquelle il y aura la création d'une instance collégiale présidentielle pour éviter une impasse plus radicalisée à l'avenir. «Les mécanismes de sortie de crise ne se traduisent pas par l'organisation de l'élection présidentielle en se référant à l'application de l'article 102 de la Constitution, mais par l'application de l'article 07».