'En visionnaire qu'il est, Sadi plaide pour l'éloignement de l'institution militaire du jeu politique. Dans une conjoncture de confusion et surtout d'interrogations, sur le sort de la transition avec un processus constitutionnel décrié, à travers l'accession de Abdelakder Bensalah au poste de chef de l'Etat, même rejeté par le peuple, Saïd Sadi recadre le débat. L'ancien président du RCD estime que la démarche en question, met fin aux illusions de certains sur le rôle que veut jouer l'armée dans cette période. «Le congrès du parlement est convoqué. On peut supposer que c'est pour désigner le chef de l'Etat intérimaire, qui va conduire l'agenda électoral avec la bénédiction de l'armée. Bonne ou mauvaise nouvelle ?», s'est interrogé hier, le fondateur du RCD dans une contribution intitulée : «L'Armée, avec ou face au peuple?», publiée sur sa page facebook. Pour Saïd Sadi, «cette démarche évacue les supputations qu'entretenaient certaines voix naïves, intéressées ou simplement ignorantes des pratiques du sérail, pour entretenir l'illusion que l'armée est en phase avec le mouvement du 22 février qui en appelle, semaine après semaine, à la fin du système militaire qui a confisqué le pays symbolique et physique depuis 1962». La réunion du Parlement siégeant en deux chambres, demain, est la preuve selon lui, qu'il y a «divergences sur les méthodes et les buts» entre l'armée et la rue. Un «vicieux malentendu», a-t-il qualifié. Soutenant que «la vérité est la condition du salut» en ces heures d'incertitudes, Sadi rappelle les positions de l'armée, «ou plus exactement celui qui parle à sa place», dans une allusion au chef d'Etat-major, Ahmed Gaïd Salah, qui «a d'abord vanté le bilan de Bouteflika, pour vendre dans la foulée, le cinquième mandat», avant de parler des «ennemis intérieurs» et finir par «s'aligner sur la rue». «L'armée n'est donc ni l'initiatrice, ni même le soutien du mouvement populaire. Elle a fini par s'y résigner. Tant mieux», constate le fondateur du RCD. Et de soupçonner une volonté chez l'armée de limiter la transition à «organiser des élections». Une opération qui, dit-il, «revient à lustrer le système pour mieux le faire perdurer». C'est pour cela qu'en visionnaire qu'il est, Sadi plaide pour l'éloignement de l'institution militaire du jeu politique. Expliquant que sur le fond de cette démarche, il est vain de tenter une canalisation du mouvement citoyen dans des institutions obsolètes, discréditées et inefficientes, détritus de l'ancien régime, Saïd Sadi écrit : «il importe aussi de tenir l'armée éloignée des enjeux politiques», car, avertit-t-il : «le seul fait qu'elle soit impliquée dans le processus transitionnel est en soi problématique pour elle même et pour l'avènement de l'Etat civil.» Assemblée constituante L'auteur de la contribution ne manquera pas de cibler quelques acteurs politiques qui soutiennent presque la démarche de l'armée, notamment Ali Benflis, mais sans le citer nommément. Il dénonce sur ce, «des hommes qui se sont improvisés agents du service après-vente de cette tentative de détournement de la volonté du peuple, et expliquent qu'il est urgent de valider ce stratagème», sous prétexte qu'il faut rapidement donner au pays un chef de l'Etat élu pour éviter une vacance trop longue de la présidence qui serait préjudiciable à la nation. «Ces individus, pressés de se voir hélitreuillés par l'armée à El Mouradia, expliquent dans le même souffle, que l'Algérie est restée sans président depuis 2013 au moins!!», assène-t-il, dans une pique on ne peut plus claire au président de Talaie El Hourriyet. Pour ce, Saïd Sadi suggère que «la transition doit prendre le temps nécessaire pour éviter les raccourcis, et, surtout, garantir la mise en place et l'adoption des préalables démocratiques, sans lesquels aucune avancée n'est possible». Et c'est pourquoi il juge que «l'élection d'une assemblée constituante, ou l'organisation d'un référendum devant valider la nouvelle constitution doit impérativement précéder la présidentielle», donnant l'exemple des transitions réussies de l'Europe de l'Est, où «il a fallu plusieurs mois». Enfin, l'ex-président du RCD a estimé que «la mobilisation populaire doit continuer», tout en appelant à envisager «d'autres formes de luttes». «Il doit en être ainsi jusqu'à ce que l'armée comprenne que la volonté populaire, le temps et ses propres intérêts, lui dictent de rentrer dans les casernes», tranche-t-il.