Il y a des chiffres auxquels personne ne fait attention, comme celui-là par exemple : 400 millions de documents administratifs sont exigés chaque année des Algériens pour la constitution de leurs dossiers divers. Que les dossiers soient destinés à une candidature professionnelle, à une transaction commerciale, à un investissement ou simplement pour la vie de tous les jours, ils ont ceci de commun dans notre pays : ils sont volumineux, lents à confectionner, contraignants, parfois décourageants, et pour tout dire, anachroniques. Vous avez votre carte nationale d'identité, votre passeport et votre permis de conduire qui le prouvent, mais on vous demande quand même un «certificat de nationalité». Pour nous convaincre que «ça va s'améliorer», il aurait été plus simple de supprimer le certificat de nationalité, mais on a trouvé mieux : «alléger» les conditions de sa délivrance, ce qui n'est jamais évident, les choses étant au point où elles sont. Depuis quelques années, vous pouvez obtenir l'extrait de naissance «ordinaire» là où vous vivez, sans avoir à vous déplacer dans votre commune de naissance. Le problème est que sont rares les dossiers qui se suffisent d'un extrait de naissance ordinaire, il y a le numéro 3, le numéro 12 et, depuis quelque temps, le 12 S. Il était question de supprimer ce 12 S qui ne sert à rien sinon à pourrir la vie du citoyen ordinaire qui veut obtenir un passeport, voilà qu'on nous «rassure» : il a encore de belles années devant lui, il y aura seulement un «aménagement» dans la procédure de son obtention et il pourra servir à autre chose que ce qui a motivé sa création, avec des… copies qui n'ont plus besoin d'être légalisées. L'écrasante majorité des Algériens est sédentaire, mais on fait toujours comme s'ils étaient d'éternels vagabonds. Le certificat de résidence n'est valable que pour trois mois. Au lieu de revoir de fond en comble les conditions de son utilité, on y apporte un petit «lifting», pour porter sa durée de validité à six mois. Pendant ce temps, on ne peut pas prétendre à une résidence si on… réside à l'hôtel. On ferme les yeux sur les propriétaires qui ne veulent pas entendre parler de contrat quand ils louent leurs maisons, mais on sanctionne les locataires à qui on refuse le statut de résidents… là où ils habitent ! Et on crée des sous-résidents avec des titres d'«hébergés» ! La durée de validité de votre passeport a expiré ? Vous devez refaire le même dossier, qui n'est pas un cadeau du ciel, pour le renouveler. Pour nous dire que la procédure a été allégée en la matière, il aurait peut-être fallu faire en sorte que le vieux document suffise. Au lieu de cela, on y apporte un «changement» qui ne… change rien au calvaire du demandeur. Il arrive même que la «nouveauté» consiste à changer le numéro de l'extrait de naissance. Les numéros, ça semble tellement important que personne n'est pressé d'en finir. Autre chiffre auquel on ne fait pas attention : Il paraît que la moitié des documents exigés des Algériens pour leurs dossiers administratifs n'est pas nécessaire. Seulement la moitié ? Voyons, on pensait que c'était beaucoup plus que ça ! Mais comme le ministère de l'Intérieur vient d'adresser des instructions aux collectivités locales pour alléger les procédures administratives, nous voilà renseignés sur les proportions de notre calvaire quotidien. A défaut d'une réforme profonde en la matière, nous voilà soulagés de 50% du douloureux parcours du combattant. Et ce n'est pas évident, les choses étant toujours au point où elles sont. Slimane Laouari