"Vu l'urgence, j'ai décidé d'agir immédiatement": un an après l'intervention militaire au Mali où François Hollande avait gagné ses galons de chef des armées, le président de la République, au comble de l'impopularité en France, est reparti sur le sentier de la guerre en Centrafrique à la veille d'un sommet sur la paix et la sécurité en Afrique. A peine le Conseil de sécurité avait-il donné son feu vert à une intervention de la France dans son ex-colonie, plongée dans le chaos, que, déjà, il réunissait autour de lui un conseil de défense à l'Elysée. Et dans la foulée, François Hollande a annoncé, martial, dans une brève et solennelle intervention télévisée depuis l'Elysée, le déploiement "dans les prochains jours" de 1.200 soldats français en Centrafrique. Au plus bas dans les sondages, avec seulement 24% des Français qui lui font confiance, selon un sondage CSA de jeudi, le chef de l'Etat sait pouvoir marquer des points sur la scène internationale et, singulièrement, sur le terrain militaire. Celui qui s'était révélé en chef de guerre après avoir déclenché une opération militaire française au Mali le 11 janvier avait été accueilli quelques semaines plus tard en "libérateur" lors d'une visite triomphale dans Tombouctou libérée et à Bamako. En juin, l'Unesco lui avait décerné son Prix pour la paix en présence des principaux dirigeants ouest-africains, venus lui exprimer leur "gratitude" pour l'action militaire de la France au Mali. Le jour même cependant des combats reprenaient dans le nord, opposant l'armée malienne aux rebelles touareg. "Le combat n'est pas fini", reconnaissait le président Hollande. Il ne l'est toujours pas. Un an plus tard, la France est contrainte d'y maintenir des troupes en nombre (2.800 actuellement), tant la situation semble fragile. "Il peut paraître paradoxal de recevoir une récompense pour la recherche de la paix après avoir porté la responsabilité d'une guerre", avait reconnu le chef de l'Etat français. "Bulle de sécurité" autour de Hollande Son leitmotiv, sans cesse réaffirmé et qui le sera plus que jamais lors du Sommet de l'Elysée sur la paix et la sécurité vendredi et samedi : les Africains doivent assumer leur propre sécurité même si la France restera à leurs côtés. En attendant, Paris reste sur le pied de guerre même si le président Hollande s'était illustré d'emblée, à sa prise de fonction, par une autre décision : le retrait accéléré des troupes d'Afghanistan. Dès le début de son quinquennat, accusé d'être incapable de trancher sur les questions intérieures, il s'était ainsi montré capable de prendre des décisions difficiles dans le domaine de la défense, où il n'était pas particulièrement attendu. Le dispositif élyséen repose sur les bonnes relations du président avec les principaux chefs militaires, notamment avec son chef d'état-major particulier, le général Benoît Puga. Mais la présidence Hollande s'est aussi traduite par une reprise en main du pouvoir civil sur le ministère de la Défense, avec un ministre, Jean-Yves Le Drian, un des proches du chef de l'Etat, qui fait le lien avec les armées. Depuis que la France est partie en guerre, la vie quotidienne de François Hollande est bouleversée. Voiture blindée, communications sécurisées, conseils de défense ou déplacements quasi systématiques en avion s'imposent. Et le président a dû renoncer à son domicile privé du 15e arrondissement de Paris pour résider en permanence à l'Elysée. Il doit être joignable à tout moment et pouvoir appeler quiconque "sans délai", selon son entourage. Plus que jamais aussi, le Service de protection des hautes personnalités (SPHP), qui assure nuit et jour sa sécurité est sur les dents, pour former une "bulle de sécurité" autour de lui. Dans ces circonstances, le chef de l'Etat est encore plus menacé. Déjà, il l'était explicitement par les mouvements islamistes armés que les forces françaises s'efforçaient de déloger du Nord-Mali.