L'image fait désormais partie du décor en Kabylie : des dizaines d'enfants, filles et garçons, empruntent à pied chaque matin et soir la route de Oued Falli, au sud de la ville de Tizi Ouzou, afin de rejoindre leur école située au quartier Sud-Ouest, soit à 4, voire 6, km de leur domicile, de petites fermes situées dans la périphérie sud de la ville traversées il y a 5 ans par la rocade. L'école primaire est plus proche des collège et lycée, et le spectacle de ces enfants faisant du stop dès le matin est saisissant. Par manque de bus, la commune de Tizi Ouzou étant submergée par les demandes émanant des dizaines de villages qu'elle a sous sa coupe, la trotte est le seul moyen pour ces bambins en majorité âgés de moins de 10 ans. Et les dangers guettent, notamment celui de la route, car la marche se fait sur la voie de circulation. Les parents ont le ventre noué par la crainte de l'irréparable lorsque leur progéniture prend le chemin de l'école. Même constat dans les communes rurales où les demeures sont souvent éloignées des établissements scolaires, du primaire notamment. Là aussi, les déplacements se font à pied, quels que soient les caprices du temps. Les communes ont certes reçu des aides (wilaya, ministère de la Solidarité ou carrément sur fonds propres en faisant appel aux transporteurs privés), mais la priorité est que, sur certaines lignes, seules les filles sont transportées vers les établissements, les autres sont obligés d'avoir recours au transport privé, grevant de ce fait le budget familial. Le phénomène est accentué par l'éparpillement de l'habitat rural, l'agrandissement des zones urbaines avec le boom que connaît l'immobilier et une carte scolaire pensée pour accueillir les élèves au centre-ville ou au chef-lieu de commune afin de ne léser personne. A Timizar, située à une trentaine de kilomètres du chef-lieu de wilaya, le seul lycée de la «ville» accueille à lui seul tous les lycéens des multiples villages environnants, situés entre 1 et… 10 kilomètres. Et là encore, la débrouille aussi fait son œuvre, car les maigres moyens de transport de la commune suffisent juste pour faire face au quart de la demande. Les exemples ne manquent pas à travers toute la wilaya et si les déplacements sont acceptés avec stoïcisme durant une partie de l'année scolaire, ils le sont moins en période hivernale où le froid et parfois la neige rendent la scolarisation plus ardue, notamment pour les plus petits.