Pendant que la nouvelle ministre de l'Education «menaçait» les tricheurs potentiels aux examens, les élèves, eux, amélioraient leurs méthodes dans le sens de la performance. Manifestement plus au fait de la situation que la ministre fraîchement installée, ils ont continué, le plus «normalement» du monde, à parfaire les modes opératoires qu'ils ont eu déjà loisir d'expérimenter lors des examens blancs ou de contrôles réguliers qu'ils ont eu à subir tout au long de l'année. Une année scolaire qui, pour certains parmi «les terminales» ou les collégiens de 4e année, est vécue comme un stage de longue durée ponctué par des matches de préparation. Des matches de préparation où ils peuvent mettre en application non pas ce qu'ils ont assimilé comme connaissances mais ce que leur génie «créatif» en matière de tricherie leur a permis d'accumuler. Et de pousser l'audace – ou le culot – jusqu'à son paroxysme. N'est-ce pas que les «matches amicaux» servent surtout à cela ? Tout tenter. Et quand on tente tout, on réussit beaucoup de choses. Surtout que les arbitres, qu'on sait déjà ni très vigilants pour dénicher les irrégularités ni très courageux et motivés pour les sanctionner en «matches officiels», ne vont certainement pas en rajouter quand ils ne sont là que pour des «rencontres d'application». Un peu trop naïve, Madame Benghebrit ? Certainement, sinon elle aurait peut-être pu s'y prendre autrement. Tenter un discours de fermeté, histoire de marquer son territoire et de consacrer une marque de fabrique peut se comprendre, surtout que les velléités en la matière, ce n'est pas vraiment ce qui a manqué dans l'histoire récente de l'éducation nationale. Mais faire preuve d'autant d'angélisme fait tout simplement sourire. On voudrait bien voir sa tête quand elle découvrira, enfin, si c'est vraiment une découverte pour elle, qu'au plus haut niveau de la responsabilité d'Etat, on «gère» là où il est question de sévir, on «dialogue» là où il s'agit d'… agir ! Est-ce que Madame Benghebrit a vécu ce qui s'est passé l'année dernière dans son pays, plus précisément dans le secteur qu'elle dirige maintenant ? Sait-elle que des candidats au bac n'ont pas eu à parfaire leurs méthodes de triche, n'avaient pas besoin de «Bluetooth» ni d'internet, ni même de téléphone portable, puisqu'il suffisait de… tirer un couteau ? Sait-elle que des surveillants au bac, faute de surveiller les candidats, veillaient plutôt à ce qu'ils trichent tranquillement, en… surveillant l'arrivée éventuelle d'un contrôleur ou d'un tout autre «collègue» qui ne serait pas «dans le coup» ? Sait-elle que des «manifestations» ont eu lieu dans la cour de centres d'examen où l'ordre n'est revenu qu'après d'âpres… négociations ? Sait-elle qu'on peut revendiquer l'annulation d'une épreuve sous prétexte qu'elle a porté sur des sujets qui n'ont pas été étudiés pendant l'année ? Ou pire encore, crier au scandale, demander à refaire une autre épreuve parce qu'elle serait tout simplement… difficile ? Si elle sait tout ça et a usé d'un ton aussi ferme, il faudra peut-être compter avec cette ministre. Si elle n'en sait rien, il serait difficile de comprendre pourquoi elle est là. [email protected]