Mutation - Si dans le passé les étudiants tricheurs étaient mal considérés et mal vus, aujourd'hui, un tricheur avoue son méfait sans honte. Outre toutes les lacunes qu'on ne cesse de signaler dans nos universités, comme celles liées à la dégradation de la qualité de l'enseignement et la baisse du niveau des étudiants, générées par les manques sur les plans pédagogique et administratif, voilà qu'un autre phénomène, la tricherie aux examens, vient éclabousser plusieurs de nos universités. Certes, on peut dire que ce phénomène n'est pas nouveau, cela est vrai, néanmoins, ce qui est triste quand même c'est sa banalisation et l'ampleur sans précédent qu'il prend depuis quelques années. Et si dans le passé l'étudiant tricheur ne pouvait pas déclarer devant ses camarades qu'il trichait, puisque ce comportement était nullement apprécié, aujourd'hui, au contraire, certains étudiants affirment avoir triché aux examens sans se soucier du regard et du jugement des autres. Pis encore, certains étudiants fraudeurs vont plus loin en justifiant leurs dépassements. Et quand on en arrive à oser justifier l'injustifiable, parfois avec une curieuse fierté, il y a de quoi s'inquiéter. Cela pour dire que ce phénomène prend des proportions inquiétantes aujourd'hui. Mais pourquoi justement l'étudiant en arrive-t-il aujourd'hui à ce stade de mépris de toute éthique ? On peut admettre peut-être l'inconscience des élèves dans les paliers inférieurs et ce jusqu'au lycée, mais on ne peut aucunement prétendre qu'à l'université l'étudiant ne soit pas en mesure de connaître la gravité de tels comportements. Certains étudiants fraudeurs interrogés sur ce sujet et qui ont voulu répondre à nos questions sous le couvert de l'anonymat, ont avancé certaines causes qui les poussent à opter pour la tricherie pour réussir aux examens, bien qu'il faille signaler qu'aucun de ces motifs avancés ne peut tenir vraiment la route. Parmi ces étudiants tricheurs, il y a ceux qui trichent par nature. Car «le copiage» pour eux est devenu un vice pratiqué depuis les paliers inférieurs. Il y a aussi la peur de l'échec aux examens, la «hantise de la feuille blanche» notamment pour ceux qui ne se préparent pas convenablement à ces épreuves. Pour ceux-ci, il semble que la fin justifie les moyens, l'essentiel est d'avoir des notes leur permettant d'avancer dans leurs cursus. Un autre motif qui mérite bien d'être signalé et qui semble le plus impressionnant, est celui lié à l'entourage. Certains étudiants ne font pas la différence entre la rue et l'établissement universitaire, entre les pratiques qu'on trouve dans les marchés et celles propres au milieu universitaire. «L'université reflète ce qui se passe dans la société. S'il n'y avait pas la corruption, (chipa) dans d'autres domaines, même à l'université il n'y aurait pas de tricherie et vice-versa», remarque un étudiant en sciences politiques.