Alternance au pouvoir avec la limitation à deux mandats de cinq ans, renforcement des prérogatives du Premier ministre et du rôle du Parlement, consécration du principe de l'indépendance de la justice, lutte contre la corruption, protection de l'économie nationale, promotion des libertés individuelles et collectives, ce sont là les principales nouveautés inclues dans le projet de révision constitutionnelle. Dévoilés ce jeudi par la présidence de la République, les amendements proposés dans ce cadre prévoient en outre l'intégration la charte pour la paix et la réconciliation parmi les constantes nationales, la concrétisation d'une parité homme-femme, une révision des conditions de garde à vue ainsi qu'une prise en charge de l'Etat des enfants abandonnés, handicapés et sans ressources. En somme, les amendements proposés réaffirment ainsi cette volonté du président Bouteflika d'aller vers la construction d'un véritable Etat de droit. Ceci à commencer par la révision de l'article 47 où il est proposé que le président de la République soit éligible une seule fois. «L'amendement proposé dans ce cadre porte sur la constitutionnalisation de l'alternance démocratique, dans le préambule et sa traduction dans le corps de la Constitution par une limitation du nombre de mandats présidentiels (art.74)», peut-on lire dans la présentation des nouveaux amendements publiés sur le site de la présidence de la République. De nouvelles prérogatives pour le Premier ministre sont prévues par ailleurs dans le projet de la révision constitutionnelle. «Le Premier ministre peut recevoir du président de la République, dans les limites fixées par la Constitution, une délégation de pouvoir réglementaire». Il est également en mesure de signer des décrets exécutifs par délégation du chef de l'Etat. Pour ce qui est de la réorganisation de l'activité parlementaire, le nouveau projet de révision constitutionnelle prévoit la cessation de ce qui est communément appelé «nomadisme politique». L'amendement proposé en ce sens concerne l'article 100bis qui prévoit l'interdiction pour les élus de l'APN et du Sénat de changer d'appartenance politique durant l'exercice de leur mandat. En termes de renforcement des prérogatives de l'APN, il est prévu entre autres dans le nouveau projet la consécration d'une séance par session «au contrôle de l'action du gouvernement en présence obligatoire du Premier ministre» ainsi que la programmation d'une séance mensuelle pour débattre de l'ordre du jour de l'opposition. L a nouvelle Constitution confère aussi «à chacune des deux chambres parlementaires la possibilité de créer des commissions temporaires d'information sur tout le territoire national, d'instituer un délai pour la réunion de la commission paritaire à l'initiative du Premier ministre en cas de désaccord entre les deux chambres, et de fixer un délai de réponse pour le gouvernement sur une question d'actualité et sur une question écrite posée par les membres du Parlement.
La lutte contre la corruption constitutionnalisée Dans son chapitre relatif au peuple, il est proposé dans le nouveau projet de révision de la Constitution «de renforcer la protection de l'économie nationale en constitutionnalisant, à la fois, le principe de la lutte contre la corruption active et passive et le mécanisme de la déclaration de patrimoine et en prévoyant la confiscation de tout bien, quelle que soit sa nature, acquis par suite de corruption». Sur un autre volet, les amendements proposés portent également sur la promotion des libertés d'expression, d'association, de réunion et de manifestation pacifique. En ce sens, il est prévu que la liberté de la presse est garantie et qu'elle n'est restreinte par aucune forme de censure préalable. Cette liberté ne peut être, toutefois «utilisée pour attenter à la dignité, aux libertés et droits d'autrui». S'agissant toujours du chapitre lié aux libertés individuelles, l'on retrouve également parmi les amendements proposés le droit à un procès équitable, l'interdiction d'emprisonnement dans des lieux non prévus par la loi, le droit pour les personnes gardées à vue de contacter leur famille et l'examen ainsi que obligation d'un examen médical pour les mineurs gardés à vue. Dans la nouvelle constitution, il est proposé par ailleurs de consacrer le principe d'égalité des personnes devant les impôts et de réprimer ceux qui ne s'acquittent pas de leurs impôts.
Protection des juges et réorganisation du Conseil constitutionnel Dans le domaine judiciaire et en vue de consacrer l'indépendance de la justice, le nouveau projet constitutionnel prévoit entre autres la protection du juge contre toute forme de pressions, d'interventions ou manœuvres en lui reconnaissant le droit de saisir le Conseil supérieur de la magistrature lorsqu'il est confronté à l'une de ces situations. «L'exercice de ce droit constitutionnel est de nature à renforcer l'indépendance du juge», explique-t-on. Il est également prévu de revoir l'organisation du Conseil constitutionnel, notamment sa composition dans le sens d'une augmentation du nombre de ses membres en vue d'assurer une représentation équilibrée des trois pouvoirs au sein de cette institution et en créant la fonction de vice-Président en vue d'assurer la stabilité et la pérennité de l'institution. Il est également inscrit parmi ces amendements d'allonger le mandat des membres du Conseil constitutionnel qui seront soumis à l'obligation de prêter serment devant le président de la République avant leur entrée en fonction. L'autonomie financière et administrative du Conseil constitutionnel est également prévue dans le cadre de la révision constitutionnelle. Telle que projetée, cette révision «sera menée à son terme suivant une démarche qui se veut résolument participative, fondée sur une concertation ouverte aux forces politiques, aux principales représentations de la société civile ainsi qu'aux personnalités nationales. Cette concertation conduira à l'élaboration d'un texte consensuel qui sera soumis, au regard de son contenu, à la procédure de révision constitutionnelle appropriée», précise-t-on.