Le nationaliste hindou Narendra Modi va être investi lundi Premier ministre de l'Inde pour des débuts marqués par la présence inédite de son homologue pakistanais à sa prestation de serment et la promesse de constituer un gouvernement restreint. L'accession au pouvoir de Modi, qui a remporté une victoire écrasante avec son parti nationaliste hindou, marque un net basculement à droit de l'Inde dirigée depuis dix ans par le parti du Congrès de la dynastie Nehru-Gandhi. Le dirigeant du Bharatiya Janata Party (BJP), âgé de 63 ans, s'est rendu lundi matin au mémorial du héros de l'indépendance, le Mahatma Gandhi, avant de rencontrer Atal Bihari Vajpayee, l'unique autre leader du BJP à avoir été Premier ministre de l'Inde (1998-2004). La composition de son gouvernement devrait être annoncée avant la cérémonie d'investiture, prévue à 18H00 (12H30 GMT). Le nouveau Premier ministre a promis de composer une équipe resserrée. "Fidèle à notre engagement d'un "gouvernement minimum et d'une gouvernance maximale, nous avons opéré un changement positif sans précédent dans la formation" du gouvernement, a-t-il dit sur son compte twitter officiel. Modi, fils d'un vendeur de thé, a obtenu la majorité au parlement la plus forte depuis 30 ans, évinçant le parti du Congrès sur la promesse de création d'emplois et de relance de la croissance. Le nouveau Premier ministre a insisté lors de sa campagne sur son parcours personnel, son origine modeste et son travail comme chef de l'exécutif de l'Etat du Gujarat depuis 13 ans, assurant avoir rendu son administration plus efficace et peu corrompue. Ses critiques ont assuré qu'avec Modi au pouvoir, la majorité hindou serait favorisée au détriment des autres minorités, en particulier les 150 millions de musulmans, mais cette attaque a été peu entendue. Les musulmans restent très méfiants envers le nouveau Premier ministre depuis que des émeutes sanglantes ont éclaté en 2002 dans le Gujarat, faisant plus de 1.000 morts, essentiellement des musulmans sans que les forces de l'ordre soit intervenue. Modi se défend en expliquant que la justice ne l'a pas mise en cause. L'invitation du Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif à sa cérémonie d'investiture est considérée comme une marque d'ouverture envers son voisin musulman. Sa présence est une première pour une cérémonie d'investiture depuis l'indépendance de 1947. Sharif, qui a salué "l'impressionnante victoire" de Modi, a accepté samedi l'invitation indienne adressée à l'ensemble des dirigeants des pays d'Asie du sud. Il est apparu souriant lundi matin à son arrivée à Delhi. Attentes très fortes Modi va devoir répondre aux attentes très fortes des Indiens à la tête d'un pays abritant un sixième de l'humanité et encore marqué par la pauvreté et des infrastructures déficientes. Des réformes considérables seront nécessaires pour relancer la croissance, passée sous les 5% depuis deux ans, selon les analystes. Le dirigeant indien sera officiellement investi lors d'une cérémonie au Rashtrapati Bhavan, le palais présidentiel, à laquelle au moins 3.000 personnes assisteront, selon les médias indiens. Outre Sharif, le Président afghan sortant Hamid Karzai, celui du Sri Lanka Mahinda Rajapakse et le Premier ministre népalais Sushi Koirala seront également présents. Modi doit s'entretenir mardi avec son homologue pakistanais pour tenter de relancer le dialogue entre les deux pays, au point mort depuis l'attentat de Bombay en 2008 par des hommes armés pakistanais qui a fait 166 mots. L'Inde et le Pakistan se sont livré trois guerres depuis 1947 et la méfiance domine entre les deux pays en dépit d'un léger réchauffement au cours de la fin du mandat du Premier ministre indien sortant Manmohan Singh. M. Sharif, qui avait aussi été Premier ministre dans les années 1990, avait entretenu de bonnes relations à l'époque avec Atal Bihari Vajpayee. En 1999, Vajpayee avait signé un accord de paix à Lahore (est) qui avait fait brièvement revivre le rêve d'une normalisation entre les deux puissances nucléaires rivales.