Six avions d'Air France sur 10 sur le tarmac mardi, idem pour mercredi: la grève très suivie des pilotes semble partie pour durer, après la fin de non-recevoir du principal syndicat à une première proposition de la direction. Après avoir assuré moins de 50% des vols lundi, le groupe prévoit de faire décoller mercredi 40% de ses avions, comme mardi. Les pilotes appelés en renfort les premiers jours devant se reposer, les syndicats prédisent, eux, davantage d'annulations. La grève lancée par trois syndicats de pilotes a été aussi massivement suivie mardi que la veille, par 60% des pilotes selon la direction, 75% selon le SNPL AF Alpa, dont le préavis court jusqu'au 22 septembre. Le Spaf (deuxième syndicat) et Alter (non représentatif) ont allongé de deux jours leur préavis et appellent désormais à la grève jusqu'au 20. A Roissy, près de 400 vols ont été annulés (60%), 140 à Orly (50%), de source aéroportuaire. Sur l'ensemble de la journée, "aucune annulation à chaud" n'a été signalée, les deux aérogares sont restées "très calmes", selon la source. A Toulouse, presque tous les vols Air France avaient été annulés le matin, comme à Lille, alors qu'à Nice le taux d'annulation grimpait à 90%, de même qu'à Marseille. Air France a recommandé aux clients ayant un vol d'ici au 22 de reporter leur voyage ou changer leur billet sans frais. Les trois syndicats s'opposent aux conditions de développement de la filiale low cost du groupe, Transavia. Mercredi, à 13H00, ils organiseront ensemble une assemblée générale des pilotes. Il s'agira d'une réunion d'information, a priori sans vote, pour "montrer à la direction qu'on ne lâchera pas", explique Julien Duboz, porte-parole du Spaf. 'Pas encore' d'issue "Contrairement à ce que veut faire croire la direction, nous ne sommes pas opposés au développement de Transavia, tout dépend des conditions", dit-il. Pour l'heure, selon lui, la direction "ne propose rien" de nature à rassurer les pilotes. Les syndicats disent redouter que le projet du groupe AF-KLM n'ouvre la voie à du "dumping social" au sein du groupe et à des "délocalisations" d'emplois, alors qu'un plan de départs volontaires a été ouvert en août pour 200 des 3.760 pilotes d'Air France. Une nouvelle réunion de négociation devait démarrer mardi en fin de journée avec le SNPL. La précédente, lundi soir, n'a rien donné et Frédéric Gagey, PDG de la compagnie, ne voyait mardi matin "pas encore" de sortie de crise. La direction poursuivra mercredi matin les discussions, cette fois avec les deux syndicats représentatifs, lors d'une nouvelle séance plénière. La proposition d'Air France de limiter la taille future de sa filiale à bas coût Transavia en France (à 30 avions d'ici 2019 au lieu de 37 prévus) va "dans la mauvaise direction", a estimé mardi Jean-Louis Barber, président du SNPL AF Alpa. "Plus on limitera le développement de Transavia France, plus on accélèrera celui de Transavia Europe avec ses contrats sociaux moins-disants", cette proposition est "un trompe-l'œil", argue M. Barber. Pour reconquérir les lignes concurrencées par les compagnies low cost (Ryanair, easyJet), le groupe mise sur l'ouverture de nouvelles bases en Europe en 2015, avec des pilotes sous contrats locaux. Selon une source interne d'Air France, le coût horaire des pilotes est 40% plus élevé chez Air France que chez Transavia, où le salaire annuel brut oscille entre 87.000 et 180.000 euros, contre une rémunération comprise entre 75.000 et 250.000 euros chez Air France, selon le grade, l'ancienneté et l'affectation. Le groupe rejette la principale revendication des syndicats de réserver aux pilotes d'Air France les avions de plus de 100/110 places, quelle que soit la compagnie du groupe (Air France, Transavia, Hop!). Un mouvement d'une semaine serait le plus long conflit mené par des pilotes d'Air France (groupe Air France-KLM) depuis 1998. La direction évalue son coût de 10 à 15 millions d'euros par jour hors mesures de dédommagement. Deux syndicats toutes catégories, la CFE-CGC et la CFDT, ont dénoncé un mouvement "corporatiste", qui sapent les efforts réalisés par l'ensemble des salariés depuis 2012. Et les soucis d'Air France font le bonheur du rail: la SNCF a noté une hausse des ventes de billets de 3% depuis le début de la grève, et augmenté ses capacités.