Le prix Nobel de littérature sera connu aujourd'hui. Bien sûr, Assia Djebbar l'Algérienne n'a quasiment aucune chance d'obtenir la prestigieuse distinction. Bien sûr – aussi – que son nom a figuré dans une première liste de «nominés» comme cela est devenu une récurrence depuis des années. Elle n'est pas la seule à avoir l'«honneur» d'occuper une place dans cette salle d'attente sans issue. A tel point qu'un critique littéraire disait récemment que nominer un auteur deux fois sans lui attribuer la distinction est la manière la plus sûre et la moins élégante de lui signifier qu'il ne l'obtiendra jamais. Mais le critique en question, comme l'opinion… littéraire algérienne doivent tout de même savoir comment ça se passe. Et surtout comment ça ne se passe pas. En matière d'attribution du prix Nobel de littérature, il y a certainement eu de grandes injustices et de grosses frustrations. On peut toujours estimer que tel ou tel autre écrivain mérite la plus prestigieuse distinction littéraire. Par penchant personnel, donc forcément par subjectivisme, par «patriotisme» ou par prétention «objective». Et des voix pour les trois… critères de sélection – ou plutôt d'élection – au Nobel de littérature, ce n'est pas vraiment ce qui a manqué chez nous. Depuis de longues décennies, les noms de «nobélisables» algériens sont revenus avec plus ou moins d'enthousiasme et de (fausse ?) assurance. Tour à tour Yacine Kateb, Abdelhamid Benhadouga, Rachid Boudjedra, Mohamed Dib et enfin Assia Djebbar se sont succédé à une candidature parfois fantasmatique. Bien sûr, les auteurs qui ont obtenu le prix n'ont pas toujours convaincu, d'immenses hommes de lettres n'ont pas eu la chance d'être distingués, et d'hilarantes «surprises» ont parfois ponctué les décisions du jury. Mais il faut tout de même convenir que s'agissant d'injustice, ce ne sont pas les auteurs algériens qui ont été les victimes les plus flagrantes. On ne refait pas pour autant les subjectivités. Quant à l'objectivité, elle n'est pas le critère absolu des grandes distinctions et elle est presque l'antithèse de la littérature. En attendant la décision de l'académie suédoise – aujourd'hui – ceux qui rêvent encore de voir Assia Djebbar récompensée peuvent toujours faire valoir quelques… critères objectifs : les spécialistes estiment que la récompense du continent africain n'est pas loin, que la langue française aussi, du fait de la proportion du nombre de ses distinctions par rapport à l'anglais et du fait qu'on peut toujours pencher pour une femme venue d'un pays où il n'est pas évident d'être… femme et écrivaine. Quand on sait que la seule chance pour le grand Kundera d'obtenir la distinction est qu'on l'attribue à l'auteur le plus âgé, quand on sait que le Japonais Harruki Murakami n'a aucun suffrage des spécialistes, qu'Adonis ne se fait aucune illusion et que personne n'a cité Assia Djebbar comme possible lauréate…