C'était prévisible, les partisans du boycott ont crié à la fraude massive. Ils l'ont fait depuis 1999, surtout en 2004, et pourquoi donc pas en 2009. Peu surprenante aussi aura été l'attitude non éthique de certains confrères d'ici et de l'autre côté qui se sont rangés à ces «arguments», après avoir misé sur l'abstention massive. Aucun mot, par contre, de ces salles pleines à craquer à chaque meeting du président Abdelaziz Bouteflika. Pas même le moindre des commentaires sur l'afflux des citoyens dans toutes les villes du pays pour saluer le Président. Tout comme ces milieux politiques et leurs relais avaient fait l'impasse sur ces mouvements populaires spontanés, rarement vécus ailleurs, ils ont passé sous silence les manifestations de joie de leurs compatriotes qui ont tenu à saluer comme il se doit ce ras de marée électoral. Cette leçon de démocratie. Cette Algérie profonde qui s'exprime massivement pour son candidat, c'est, à leurs yeux, de la fraude électorale massive. Lorsqu'elle sort dans la rue, donnant une idée claire sur la véritable configuration du scrutin, c'est de la manipulation. Mais quand le ministre de l'Intérieur demande des preuves de ces accusations, qui relèvent en réalité du fantasme politique ou du manque de fair-play, c'est le silence. Pas un seul témoignage sur ces prétendus dépassements dans les 42 000 bureaux de vote où les six candidats avaient, eux-mêmes, proclamé devant les millions d'Algériens qu'ils avaient des représentants sur place, de l'ouverture des bureaux jusqu'à la fin des opérations de dépouillement. En fait, des dépassements il y en a eu, et pas mal. Des bureaux de vote ont été assaillis par les partisans du boycott lorsque ces derniers ont vu les gens de leur propre village se rendre aux urnes. Des menaces aussi, sans quoi le taux de participation à Tizi aurait été encore plus élevé. Plus que les menaces, le terrorisme a donné un coup de pouce aux adversaires de la démocratie qui craignaient de voir leurs compatriotes leur mettre sous le nez leur véritable implantation. Un policier est mort, d'autres citoyens ont été blessés. Voilà un climat qui arrange certains cercles. Celui de l'instabilité où ils ont puisé leurs arguments. Celui de l'abstention pour pouvoir crier à l'absence de légitimité des institutions politiques et avoir un président mal élu. Démocrates dites-vous !Dans tous les cas, les professionnels du boycott et leurs amis auraient trouvé toujours des choses à redire, que ce soir avec un taux de participation de 74%, en 2009, ou avec 37% lors des dernières législatives. Dans le cas du scrutin du 9 avril c'est la «fraude massive» et dans celui des législatives «c'est la sanction populaire». La question est de savoir pourquoi l'Etat frauderait-il aux présidentielles en se gênant de le faire aux législatives. Le tout est de savoir - selon la logique de ces milieux - à quel pourcentage il faudrait arrêter les comptes pour qu'un scrutin soit crédible. Ce qu'ils ignorent, en fait, c'est ce que leurs propres compatriotes ont enduré depuis le temps où les institutions politiques nationales ne fonctionnaient pas et alors que le pays cherchait un président, un vrai «patron» capable de faire la paix, de redonner à ses compatriotes le sens citoyen, d'engager des décisions difficiles pour réconcilier les Algériens entre eux, de faire de leur pays une nation prospère, une voix écoutée sur la scène internationale. Les Algériens savent ce qu'il leur en a coûté de ne pas voter en 1991, malgré toutes les raisons qu'ils avaient de rester chez eux. Ils savent maintenant qu'ils sont revenus de loin. De très très loin. Que le désespoir n'a pas d'avenir. Leurs enfants si. Rien d'étonnant donc qu'ils aient refusé, massivement, de se laisser entraîner sur un terrain miné, surtout qu'ils ont eu tout le temps de juger, ces dix dernières années, de ce qu'ils ont vu de leurs propres yeux. Si on sait pourquoi les jeunes de 1991 n'avaient pas voté, on sait aussi pourquoi ceux de 2009 ont pris massivement le chemin des urnes, ignorant pressions comme menaces.