L'annonce, attendue officiellement pour demain, renversera définitivement les rapports de force. Hier, au début de la nuit, le bureau national du mouvement Wafa a entamé une réunion-marathon en vue de se prononcer sur les choix stratégiques à prendre lors de la prochaine présidentielle. Selon des sources proches de ce parti, «le débat a commencé au sein de notre parti depuis l'élimination politique et illégale de notre parti». Ainsi, est-il apparu, dès les premiers moments, que les cadres et les militants, qui continuent à faire face à des pressions énormes de la part de l'administration et des comités de soutien du président-candidat, «ont clairement signifié vouloir prendre une part active à ce prochain scrutin». Or, le meilleur moyen de le faire ne peut consister qu'à cautionner une candidature, sur la base de conditions primordiales. Nos sources, qui précisent «ne rien avoir de commun avec Abdallah Djaballah, et encore moins avec les autres candidats, ont tout naturellement opté pour le candidat du FLN, un parti avec lequel Wafa partage beaucoup de points communs, Ahmed-Taleb Ibrahimi étant lui-même issu des rangs de cette formation politique». Nous apprenons, dans le même temps, qu'«un sondage a été réalisé dans les rangs de Wafa, a permis de conclure que la tendance lourde est pour le soutien à la candidature du FLN, sous la ferme condition que soit levé le joug illégal qui pèse sur le parti d'Ahmed-Taleb Ibrahimi depuis quatre longues années». L'objectif recherché, donc, par les dirigeants du mouvement Wafa est de décrocher enfin leur agrément. L'on croit savoir, à ce propos, que les contacts préliminaires qui ont eu lieu en ce sens auraient permis à Benflis de faire cette promesse. Celle-ci, au reste, se devine à la lecture des premiers de sa centaine d'engagements. Les numéros 1 et 2, en effet, précisent que «l'état d'urgence sera levé. (...) La loi sur les partis sera révisée dans le sens d'une garantie des voies de recours contre tout arbitraire administratif.» Nul doute que ce message, déjà, s'adressait à une grosse pointure comme Taleb dont le renfort promet de basculer irrémédiablement les rapports de force en défaveur du candidat-président. Pour revenir à la rencontre qui a duré toute la nuit de lundi à mardi, nos sources ajoutent que «les partisans du boycott, même s'ils représentent une force non négligeable dans les rangs de Wafa, partant du principe que Taleb lui-même avait décrété que les jeux étaient faits depuis le début, il n'en demeure pas moins que leur thèse sera difficilement défendable lors de cette rencontre». Et pour cause. Nous apprenons, à ce propos, que le fameux groupe des dix, lors d'une de ses séances, avait décidé qu'aucun de ses membres ne ferait publiquement campagne en faveur du boycott. C'est pour cette raison, croit-on savoir que les partisans de cette thèse ont fini par être mis en minorité, puisqu'elle n'aurait signifié rien moins que la disparition tant politique que médiatique du mouvement Wafa. Ce n'est pas tout. La cohésion des rangs de ce parti, dont le leader a été privé d'une victoire certaine lors de la présidentielle de 1999, passe sans aucun doute par la décision de soutenir le candidat qui est le plus proche d'eux, celui du FLN en l'occurrence. Militants, cadres et sympathisants éprouvent un besoin inextinguible d'agir, de se trouver au coeur de cette campagne qui s'annonce décisive pour l'avenir de la démocratie et du pluralisme en Algérie. Il est en effet vrai que l'entrée en scène d'une grosse pointure comme Taleb aux côtés de Benflis va renverser définitivement la vapeur en faveur de ce dernier. Cela, a fortiori que le retrait de l'Armée, allié à une surveillance commune aux autres candidats des bureaux de vote, empêchera toute fraude massive et devrait permettre à la souveraineté populaire de s'exprimer assez librement. Cela est d'autant plus vrai, indiquent nos sources, que les tendances lourdes indiquent que le niveau de popularité du président a nettement chuté et que les électeurs voteront forcément en faveur du changement. Même si beaucoup d'amertume subsiste dans les rangs de Wafa après l'élimination arbitraire de son candidat, la vie n'en continue pas moins, disent philosophiquement nos sources, qui pensent aussi bien à l'avenir du pays, qu'à celui du programme politique de ce parti dont les trop nombreux sacrifices ne doivent en aucune manière s'avérer vains.