La campagne électorale pour le second tour de l'élection présidentielle en Tunisie, prévu dimanche, prend fin vendredi, après dix jours de compétition ardue entre les deux candidats, Béji Caïd Essebsi et Moncef Marzouki. Samedi, candidats, partis politiques et médias doivent observer un total silence, avant que les électeurs se rendent dimanche aux urnes pour choisir leur premier président élu démocratiquement. Engagés dans un marathon ardu pour la mobilisation d'environ 5,3 millions de votants depuis le début, le 9 décembre, de la campagne électorale pour le second tour de la compétition pour l'entrée au Palais de Carthage, le chef de Nidaa Tounès, Béji Caïd Essebsi et le président sortant Moncef Marzouki, ont tenté de conquérir les électeurs notamment les indécis. Les deux rivaux ont multiplié tout au long de la campagne meetings, rassemblements, joutes aratoires et même débats télévisés, qui ont été marqués par une confrontation entre deux conceptions. Sorti vainqueur des législatives, Nidaa Tounès défend une concentration des leviers du pouvoir entre les mains d'un seul parti, alors que Moncef Marzouki, qui se représente en tant que candidat indépendant, prône le rééquilibrage du paysage politique, en mettant en garde contre l'"hégémonie" si les deux têtes de l'exécutif, présidence et gouvernement et le Parlement venaient à être présidés par un seul parti. Côté thématique de la campagne, les deux candidats, se sont emparé, chacun à sa manière, des défis majeurs que la Tunisie aura à confronter lors du prochain quinquennat, à l'instar des questions économiques épineuses, la lutte contre le chômage, les problématiques sociales, la sécurité et la lutte contre le terrorisme ainsi que les disparités régionales. La campagne électorale à été également accompagnée d'une certaine animosité entre les deux candidats, c'est pourquoi plusieurs appels ont été lancés pour réussir cette élection, étape importante dans le processus démocratique en Tunisie. Le président de l'Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE), Chafik Sarsar, à appelé les deux candidats à accepter les résultats et à ne pas les remettre en cause, ou à faire appel. Abondant dans le même sens que l'ISIE, le mouvement Ennahdha, qui n'a pas présenté de candidat, a appelé les partis politiques et les composantes de la société civile à "faire réussir" le scrutin. Béji Caïd Essebsi: "chantre du prestige de l'Etat" Béji Caïd Essebsi, 88 ans, avocat de formation, était ministre de l'Intérieur, de la Défense et des Affaires étrangères sous le premier président tunisien Habib Bourguiba, puis président du Parlement en 1990-1991 sous le 2e président Zine Elabidine Ben Ali. Nommé Premier ministre provisoire en février 2011, M. Essebsi a à son actif le fait d'avoir mené le pays vers les premières élections libres de son histoire en octobre 2011, remportées par le Mouvement islamiste Ennahdha. Son parti Nidaa Tounès, créé il y a seulement deux ans, s'est rapidement imposé sur la scène politique comme le principal adversaire d'Ennahda et a remporté les élections législatives du 26 octobre dernier. M. Essebsi devance son concurrent M. Marzouki de par le nombre de partis qui ont d'ores et déjà annoncé un franc soutien dont les partis issus du parti du président déchu et dirigés par ceux qui faisaient partie du staff gouvernemental outre le soutien d'autres partis comme l'Union patriotique libre (UPL) et le Front populaire qui compte onze partis et le mouvement Afaq Tounès sans compter les micro partis. Il se réclame de la pensée de Bourguiba qu'il qualifie de "fondateur de l'Etat moderne" et pendant sa compagne pour la présidentielle, il s'est fait le chantre du "prestige de l'Etat". Moncef Marzouki: l'"enfant du peuple" Moncef Marzouki, 69 ans, un opposant historique à l'ancien régime tunisien, avait été élu à la présidence provisoire du pays fin 2011 par l'Assemblée Constituante suite à une alliance de son mouvement, le Congrès pour la République (CPR), et du mouvement Ennahdha, vainqueurs des élections d'octobre 2011. Ce médecin neurologue se décrit toujours comme un "enfant du peuple au service du peuple", attaché dans ses discours à "la préservation de l'expérience démocratique". Il a prôné aussi lors de sa campagne de donner la priorité en matière de développement aux régions marginalisées. M. Marzouki bénéficie, du soutien de plusieurs partis de droite qui ne pèsent pas lourd sur la scène dont le courant démocratique, le mouvement Wafa, le parti al Bina, dissident du mouvement Ennahdha, et d'autres petits partis islamistes sans représentation parlementaire. Classé en 2013 par TIME Magazine parmi les 100 personnalités les plus influentes au monde, M. Marzouki considère la "troïka" comme sa plus grande réussite.