L'interview accordée par le président de la République de Syrie, Bachar Al Assad, à la chaîne française France 2, et diffusée avant-hier, a concerné surtout la politique étrangère française au Moyen-Orient, décriée et présentée comme «favorable au terrorisme» dans son pays. Le président de la Syrie a confirmé que des contacts ont lieu entre les services de renseignements syriens et français en dépit de la rupture des relations diplomatiques bilatérales décidées par le président de la République française François Hollande. «Il y a des contacts mais il n'y a pas de coopération», a expliqué le président syrien. «Nous sommes toujours intéressés par le dialogue avec quiconque», a aussi indiqué le président syrien en réponse à une question sur une relance des relations avec la France. «Mais comment peut-on établir un dialogue avec un régime qui soutient le terrorisme dans notre pays ?», s'est-il interrogé. «Les fers de lance contre la Syrie ont été la France et le Royaume-Uni», a aussi déploré le président Bachar al Assad, jugeant que «personne ne prend plus au sérieux les déclarations des responsables français». «Pour une simple raison : c'est que la France est devenue en quelque sorte un satellite de la politique américaine dans la région. Elle n'est pas indépendante et n'a aucun poids. Elle n'a plus aucune crédibilité», martèle-t-il. A une question portant sur sa responsabilité dans l'émergence du groupe Etat islamique (Daech), le président syrien a souligné que l'EI a «été créé en Irak en 2006 sous la supervision des Américains». «Je ne suis pas en Irak. Je n'y ai jamais été. Je ne contrôlais pas l'Irak. C'était les Américains qui contrôlaient l'Irak. L'EI est venu d'Irak vers la Syrie, car le chaos est contagieux», a-t-il ajouté. Concernant la coalition internationale menée par les Etats-Unis, qui opère des frappes contre l'Etat islamique, le président syrien estime que les pays composant cette coalition ne sont «pas sérieux jusqu'à présent» et «n'aident personne dans cette région». «Si vous comparez le nombre de frappes aériennes effectuées par les forces de la coalition composée de 60 Etats à celles que nous avons effectuées, nous, petit Etat, vous constaterez que nous bombardons parfois dix fois plus que la coalition en une journée», a-t-il argumenté. Sur les armes chimiques, le président syrien a démenti l'usage par l'armée de gaz de chlore en mars contre des secteurs rebelles de la province d'Idleb (nord-ouest), répondant ainsi aux accusations de l'organisation des droits de l'homme Human Rights Watch (HRW). «Non, c'est un autre faux récit donné par des gouvernements occidentaux», a répondu Bachar al-Assad. «Nous n'avons pas utilisé le chlore, et nous n'en avons pas besoin. Nous avons nos armements classiques, et nous pouvons atteindre nos objectifs sans y avoir recours». Interrogé pour savoir s'il considère que son pays est un pays démocratique, Bachar al Assad a répondu : «ça dépend avec qui vous nous comparez. Si vous nous comparez à des pays occidentaux, comme les Etats-Unis ou la France, je dis que ces pays sont davantage démocratiques que nous, et c'est dû à certains aspects et circonstances, mais si vous nous comparez à des pays de la région qui sont vos amis, comme l'Arabie saoudite, je dis que oui nous sommes un pays démocratique». La France a rompu ses relations diplomatiques avec la Syrie en mai 2012, accusant le président Bachar al Assad d'avoir «réprimé une manifestation pacifique» au début des tragiques évènements survenus dans ce pays. La France compte, d'après l'Union européenne, près de 1500 djihadistes aux côtés d'organisations terroristes, dont l'Etat islamique sévissant en Syrie. Chiffre qui inquiète les autorités françaises, notamment après l'attentat terroriste qui a ciblé le siège de «Charlie Hebdo». D'où l'intérêt accordé par ce pays à la coopération avec Damas en matière de renseignements. La France cherche à se protéger contre ses djihadistes qui pourraient perpétrer des attentats une fois rentrés dans leur pays. Le président François Hollande, lui, veut obtenir des renseignements de la part des services secrets syriens sans être contraint de rétablir les relations diplomatiques avec la Syrie. Ce que le président Bachar al Assad refuse, conditionnant la coopération entre les services de renseignements des deux pays au retour des relations diplomatiques et au changement de la politique française envers son pays.