Si certains témoins ont affirmé jeudi devant le tribunal criminel de Blida que les gestionnaires d'entreprises choisissaient de déposer l'argent chez Khalifa Bank à cause de l'intérêt attractif de l'époque, d'autres ont indiqué avoir choisi cette banque sous la pression. En effet, devant le juge Menouar, les ex-directeurs d'entreprises publiques appelés à la barre en tant que témoins ont affirmé avoir subi des pressions de leurs tutelles pour procéder à des dépôts au niveau des différentes agences de la défunte Khalifa Bank. Ils ont précisé qu'ils ont vu par la suite leurs carrières compromises du fait d'avoir endossé seuls la responsabilité suite au retrait d'agrément à l'ex-banque privée en 2003. Ces ex-responsables ont déclaré avoir déposé de l'argent au niveau de la banque Khalifa «sous pression et instruction de leurs tutelles», citant le conseil d'administration et la direction générale pour les uns et le holding dont ils dépendaient pour les autres, à l'instar de l'ex-directeur régional de l'Entreprise de l'élevage avicole à Béjaïa, Yaïssi Djebbar. Ce dernier a affirmé qu'il a vu sa carrière compromise alors qu'il n'avait fait que suivre des instructions de la direction générale, ajoutant, toutefois, qu'il «aurait été sanctionné s'il n'avait pas exécuté». Yaïssi a reconnu avoir procédé à des dépôts à termes de 50 millions de dinars d'abord et de 30 millions de dinars ensuite. De son côté, l'ex-président-directeur général d'Avicat (Avitaillement et Catering), dépendant du groupe Gema (générale maritime), Kettab Aïssa, a indiqué qu'en procédant aux dépôts de 166 millions DA dans une première opération puis 58 millions DA une seconde fois, il n'a fait que mettre «en œuvre une instruction du Holding service, chimie-pharmacie dont son entreprise dépendait». Il a expliqué qu'il avait reçu une instruction stipulant «la diversification des placements bancaires et des instructions verbales venues d'en haut pour traiter avec Khalifa Bank». Cet ex-gestionnaire a mis en évidence dans son témoignage l'attractivité des taux d'intérêts appliqués par Khalifa Bank au moment où ceux proposés par les banques publiques, dont la BEA avec laquelle ils avaient des relations, et qui leur proposait un taux frôlant 21% avant 1998, a revu ce taux à la baisse pour le fixer à 6% à partir de 2002 alors que Khalifa offrait 12,25%». Par ailleurs, certains témoignages ont fait ressortir que des entreprises publiques ont pu récupérer leurs placements à termes ou par remboursement par anticipation. L'entreprise nationale des travaux de forage de Hassi Messaoud et l'entreprise de l'approvisionnement en bois, dont les ex-directeurs, respectivement Kacemi Azzedine et Akhrouf El Hadj, ont affirmé avoir «retiré outre les intérêts mais aussi l'argent placés au sein de Khalifa Bank», ce qui a fait dire au juge Antar Menouar «que cela constitue un fait rare dans cette affaire». En outre, le président-directeur général de l'OPGI de Dar El Beida, Maamar Boumediene, a précisé devant le tribunal que le taux pratiqué par les banques publiques avant 1998 était de l'ordre de 18%, puis «il a baissé pour arriver à 6% après 1999». Celui qui était considéré comme l'un des plus gros clients de Khalifa Bank avec 116 milliards déposés, a affirmé que sa «démarche était motivée par les taux attractifs de cette banque, et non pas par l'interférence d'une quelconque partie», apportant un démenti aux «témoignages d'employés de cet organisme qui avaient indiqué que les placements se sont faits suite à une instruction d'un membre du conseil d'administration de la direction générale des OPGI (Bir Mourad Raïs)». Il faut noter que plusieurs témoins ne se sont pas présentés à l'audience de la 21e journée du procès, ce qui a conduit le président du tribunal Antar Menouar à la lecture de leurs dépositions dont celle de l'expert comptable, Bachir Bouitra, désigné par le tribunal de Bir Mourad Raïs, qui a procédé à l'expertise de Khalifa Airways mais qui a traité aussi de Khalifa Bank, suite à quoi la défense de l'accusé Rafik Abdelmoumène Khelifa est intervenue pour demander «la présence de l'expert».