Après les grandes largesses dont ont bénéficié les concessionnaires, le secteur automobile semble échapper au contrôle du gouvernement qui a décidé d'abord de soumettre les concessionnaires à un cahier des charges puis à des licences d'importation à partir de 2016 et enfin à l'obligation de la déclaration de l'IBS. Les concessionnaires automobiles seront tenus, à partir de 2016, de déclarer l'impôt sur le bénéfice des sociétés (IBS), a indiqué mardi soir à Alger le ministre du Commerce, Amara Benyounes. A l'occasion de la cérémonie de remise du «Trophée Export 2014», le ministre a expliqué que cette mesure s'inscrit dans le cadre de la mise en place des licences d'importation. «Nous nous sommes rendus compte d'une chose qui est quand même incroyable : c'est parmi les plus grands vendeurs de voitures en Algérie qu'il y a moins de déclarations d'impôts. Cela veut dire que leurs marges (bénéficiaires) sont faites à l'étranger», croit comprendre Benyounes, cité par l'APS. «Nous sommes le seul pays au monde où nous pouvons importer autant de voitures que nous voulons. Les concessionnaires algériens ne sont jamais limités dans le nombre de leurs importations», a-t-il observé. Selon le site électronique TSA, ce sont les concessionnaires des constructeurs automobiles français qui sont visés principalement. «Renault, Peugeot et Toyota sont particulièrement ciblés. Ces trois réalisent d'importantes ventes en Algérie, mais leurs bénéfices restent dérisoires, année après année. Les multiples contrôles fiscaux auxquels ils ont été soumis ont éveillé les soupçons», selon le site. En revanche, le ministre a mis à nu certaines pratiques qui ont fait du marché algérien de l'automobile un espace qui manque de régulation et est non contrôlé. «Tous les concessionnaires automobiles, sans aucune exception, sont astreints par les constructeurs à importer (pour le marché algérien) un certain nombre de véhicules», ce qui a permis, parfois, d'introduire sur le marché national des véhicules avec de fausses dates de fabrication. «Il est possible que vous achetiez une voiture en 2015 alors qu'en réalité, elle a été fabriquée en 2014 ou en 2013», explique encore le ministre. Durant les dix dernières années, l'Algérie a importé entre 350 000 et 400 000 véhicules en moyenne annuelle pour une facture estimée à plus de 5 milliards de dollars/an. «Notre pays est devenu une très grande aire de stockage de voitures. Aucun pays au monde ne fait ça», a déploré le ministre.
Les importations au peigne fin Benyounes a rappelé que les licences d'importation prévues par le projet de loi sur le commerce extérieur, qui sera présenté en plénière, dimanche prochain à l'Assemblée populaire nationale (APN), seront appliquées exclusivement sur «les gros chapitres qui touchent d'une manière sérieuse la balance commerciale du pays». Même si Benyounes s'attend d'ores et déjà à des résistances de la part des «lobbies» d'importation, il a affiché une détermination pour appliquer la loi. «Nous allons toucher de très gros intérêts. Nous allons toucher des lobbies importants, qui sont installés dans le commerce extérieur et qui sont dans l'importation depuis une quinzaine d'années avec des chiffres d'affaires absolument astronomiques», a-t-il poursuivi, ajoutant que ces importateurs n'ont jamais daigné investir dans l'industrie pour, au moins, créer des emplois. Parmi les produits qui feront l'objet de licences, Benyounes a cité les véhicules ainsi que les produits électroménagers dont la facture a atteint plus de 500 millions de dollars en 2014, ainsi que le ciment qui a été importé pour 600 millions de dollars l'année dernière. «On veut nous orienter vers des petites bricoles du commerce extérieur (comme le kiwi et les bananes) pour faire oublier l'essentiel», a-t-il fait remarquer. D'autres produits importés, dont la facture est élevée, seront concernés par les licences d'importation. Ainsi, les importations d'aliments de bétail, dont la facture annuelle est de 1,6 milliard de dollars, seront aussi soumises à une licence d'importation. Selon Benyounes, le marché d'importation de ce produit est détenu par 4 ou 5 opérateurs qui réalisent une moyenne annuelle d'importation estimée à 400 millions de dollars pour chacun. «Personne ne les connaît ou entend parler d'eux. Le plus gros employeur d'entre eux emploie 32 personnes», critique-t-il, déterminé à mettre un terme à cette situation en poursuivant qu'«objectivement, nous ne pouvons plus laisser le commerce extérieur dans cet état, ce n'est pas possible».