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Les uns réussissent, autres s'accrochent
L'art en Famille
Publié dans Le Temps d'Algérie le 04 - 05 - 2009

Beaucoup d'artistes croient que l'art est un royaume et que le don se transmet de père en fils. Une petite enquête nous a menés à conclure que le don ne se transmet pas automatiquement par hérédité et que beaucoup d'enfants d'artistes ont su profiter de l'opportunité d'avoir un professeur à domicile dès la naissance.
Record détenu par la famille Fergani
A Constantine, même si Mohamed Tahar Fergani qui est en train de céder sa place à son fils Salim, a réussi à régner sur le trône du malouf depuis une soixantaine d'années, la musique avait déjà touché la famille puisque Seddik Fergani (1913-1995) était déjà connu au début du siècle comme un virtuose du luth.
Aujourd'hui, une trentaine de musiciens, filles et garçons, issus de la famille Fergani jouent brillamment à divers instruments de musique et chantent le malouf. On pourrait affirmer que Salim, qui ne cesse de prouver ses capacités pour remplacer le grand maître, n'est pas l'arbre qui cache le forêt car dans cette famille productive, on trouve la quantité et la qualité.
Quand l'élève prend vraiment la relève
A Tlemcen, le plus bel exemple a été donné par Cheickh Larbi Bensari qui avait su former son fils Redhouane pour le remplacer et prendre une bonne place parmi les plus grands maîtres de l'andalou en Algérie. Le neveu de Cheickh Ghafour avait également fait une très bonne percée en tant que percussionniste et chanteur de hawzi et même de chaâbi.
On ne sait pas si le chanteur oranais Blaoui Houari qui a hérité l'art de son père Med Tazi qui était un virtuose de la kouitra a pensé à une relève pour perpétuer son nom dans le monde de la chanson.
A Annaba, Kamel, le fils de Hamdi Bennani, est sur la voie de son paternel et la fille de Laâyachi Dib a une voix sublime. A Alger, les enfants de Abdelhamid Ababsa, Nadjib, Naïma et Fella ont pu suivre la voie tracée par le père, mais les filles ont su rester sur le haut du pavé notamment Fella qui sait se mettre en valeur par son jeu de scène.
Le fils de Mehdi Tamache a également de fortes chances de gagner une bonne place parmi les vedettes de la chanson chaâbi. Dans le théâtre, Slimane Benaïssa risque fort d'être devancé par son fils Khaled qui a déjà prouvé ses capacités sur scène.
La concurrence au sein d'une même famille
Dans le style chaâbi, dès le début des années 1940, Hadj M'rizek avait su reprendre le flambeau tenu par son demi-frère Qhiwdji. Il faut noter que Hadj M'rizek était aussi le demi-frère du grand comédien Rouiched, également connu pour être parmi les meilleurs chansonniers comiques algériens. Le même Rouiched laissera ses deux enfants Mustapha et Rachid pour monter sur les planches du théâtre algérien.
Le comédien Mustapha El Anka avait également chanté et enregistré des disques, mais c'est El Hadi son cadet qui a suivi le chemin du grand Hadj M' hammed El Anka. Bien qu'il ait déclaré à l'un de ses intimes que El Hadi et H'sicen Saâdi étaient ses meilleurs élèves, selon de bonnes sources, le maître voulait faire de son fils le remplaçant de Skandrani au piano.
En tout cas, El Hadi a le double mérite d'être un maître du piano et un chanteur ne se cachant pas derrière l'image de son papa. Pour la chanson kabyle, on peut citer Djaâfer Aït Menguellat qui tient à suivre le chemin de son papa et qui chante et joue de plusieurs instruments dont la flûte. Par ailleurs, le comédien, acteur, poète et philosophe de La Casbah, Momo avait depuis fort longtemps décidé de la carrière de sa progéniture en l'inscrivant aux cours de musique d'El Mossilia. Depuis, le petit Mansour a grandi pour devenir un virtuose du banjo.
Il ne suffit pas d'avoir un nom
Les enfants de Boudjemaâ El Ankis et de Guerrouabi n'ont pu qu'attirer l'attention en profitant de leurs patronymes sans pouvoir se placer parmi les vrais professionnels. Bien qu'il maîtrise son art, Sid Ali Dris le neveu de Guerrouabi ne pourrait jamais fuir l'image d'El Hachemi car il est son sosie parfait. L'idéal pour lui, c'est qu'il joue un film retraçant la vie du grand chanteur.
Le fils de Dahmane El Harrachi est également un exemple d'échec, car le défi est trop grand, et il ne suffit pas d'avoir un nom connu sur la scène artistique pour être bon. Cela pourrait aider, mais il faut avoir de grandes qualités pour pouvoir s'imposer.
La discrétion
L'un des meilleurs exemples de transmission de l'art musical a été donné par El Hadj Ahmed Ezzornadji qui avait laissé tous les secrets de la ghaïta à son fils Boualem Titiche. Bien qu'assez discrets, les enfants du parolier et compositeur Mahboub Bati, seraient prêts à créer des surprises par leurs créations musicales et leurs arrangements.
Le regretté Ben M'rabet de l'association El Mossilia a su, pour sa part, inculquer à sa fille l'amour et la maîtrise du violon et léguer tous les secrets de la musique classique à son fils Nasreddine, devenu chef d'orchestre et dirigeant de cette légendaire association.
Le chanteur et professeur Mohamed Mazouni a formé tous ses enfants mais la place de maître revient à Bachir qui a innové en créant le premier et seul orchestre andalou sans percussionniste. Bachir Mazouni a déjà formé toute une génération de jeunes musiciens.
Il faut noter que dans le monde de la musique andalouse, on trouve souvent des descendances qui maîtrisent aussi bien le chant que la musique mais qui tiennent à rester à l'ombre des projecteurs et loin de la célébrité. Certains d'entre eux, tels que Anis M'Hamsadji, se sont consacrés à la formation de nouvelles générations de musiciens sans jamais courir pour être à la une des journaux.
Des filles sur la voie des parents
Les jeunes filles sont généralement les premières à suivre les parents artistes mais sont souvent interdites de passer au professionnalisme, notamment pour la chanson hawzi et la variété. Pour l'andalou, l'autorisation est permise pour l'accès aux associations, car on s'y retrouve en famille mais rares sont celles qui passent à l'enregistrement individuel.
Pour la chanson féminine algéroise, Dalila Naïm a su reprendre le flambeau de sa tante Fadhila Dziria. L'art est aussi un phénomène familial chez Warda El Djazaïria dont les frères sont d'excellents musiciens. Par ailleurs, selon un artiste des années 1940, le père de warda était un danseur de talent. Même s'il est doué pour la musique, Sofiane, le fils la chanteuse et actrice Fettouma Ousliha, a choisi une carrière de cameraman mais le petit-fils risque fort de se faire une bonne place dans le monde musical.
Le dur acteur Sid Ali Kouiret n'aurait pas d'héritier direct, mais sa nièce Selma (l'ex-chanteuse du groupe Mediterraneo) a sauvé la face en devenant l'une de nos meilleures chanteuses. L'art est aussi une affaire de famille chez les Driassa. Dans le domaine de la peinture, le chanteur Rabah Driassa, auteur du premier tableau vendu aux enchères après le cessez-le-feu, n'est pas seul à être contaminé par l'amour de l'art.
Les tableaux de son frère sont exposés à l'hôtel El Ansar de Blida, et la fille du chanteur serait également une bonne miniaturiste. Côté chanson avec sa belle voix, Abdou a déjà montré qu'il est digne de représenter son père en Algérie et à l'étranger. La fille de l'ancien chef d'orchestre Teyssir Aqla a aussi pu montrer ses capacités et ses dons à la télévision.
Des talents inconnus
Youcef Tayhi, le neveu du compositeur Saïd Bestandji, reste à l'ombre. On devrait faire appel à ce virtuose du piano pour se produire en public. Karim, le fils de Bestandji, qui aurait choisi de vivre en France, est aussi un bon musicien
Dans le domaine du théâtre, le neveu de Rachid Ksentini qui sait jouer tous les sketches et chanter toutes les chansons de son oncle avec brio aurait dû être appelé à jouer le feuilleton biographique du plus grand comique algérien et éviter le ratage du côté historique et artistique du film.
Cherif, l'enfant de Hassan El Hassani, qui a toutes les capacités pour prendre la place de son père, a préféré éviter la vie artistique mais n'a pu la déconseiller à son propre fils Abdelkader. Ce dernier qui est très doué n'attend que d'être distribué dans des pièces de théâtre aux côtés de professionnels. La jeune Samia Meziane qui vient d'obtenir un prix au festival du théâtre professionnel a également bien suivi la trace de ses parents Agoumi et Sonia.
Le fils de Tahar Foudhala a, quant à lui, suivi la voie de son père en optant pour le classique mais n'a pas réussi à convaincre par son manque de finesse. A Constantine, c'est le regretté comédien Touache qui a laissé sa place à son fils qui mène de beaux jours sur les planches des théâtres et à la télévision.
Bien que cette liste puisse être étoffée, on peut dire que les enfants des célébrités sont privilégiés pour se lancer dans une carrière artistique, mais il leur faut des qualités pour résister.


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