Taoufik Makhloufi pouvait-il faire mieux à Pékin ? Relégué à la 4e place de la finale du 1500m des Mondiaux d'athlétisme, le champion algérien a raté l'objectif qu'il s'était fixé en début de saison, remporter la médaille d'or de cette compétition. Il avait même prédit plus que cela, puisque dans des interviewes accordées à des confrères, il avait révélé qu'il ambitionnait de battre un jour le record du monde de la distance, qui est la propriété du Marocain Hichem El Guerroudj. C'est bien d'avoir autant de volonté mais l'expérience a toujours démontré que ce sont ceux qui parlent le moins dans le sport qui finissent par réaliser de grandes performances. Makhloufi est champion olympique, en titre, du 1500m. Il n'a jamais été champion du monde. Il peut le devenir car il n'a que 27 ans mais il faut qu'il apprenne à être plus stable et surtout à se montrer moins loquace sur ce qu'il vise. Quand on parle de stabilité, on ne croit pas se tromper. Makhloufi, en tant que sportif, n'est pas un exemple dans ce domaine. Il avait quitté Souk Ahras sur les conseils de son coach Ali Redjimi pour venir à Alger se placer sous les ordres d'Amar Brahmia au sein d'un groupe qui comprenait de sacrés coureurs du 1500 m, chacun d'eux valant les 3:30. Des coureurs comme Tarek Boukensa, Antar Zerguelaïne et Kamel Boulahfane. Après une période qui lui a permis de s'aguerrir, il a choisi d'aller, en janvier 2012, s'entraîner sous la direction de l'Américano-Somalien Adem Jama. C'est avec celui-ci qu'il a réussi à devenir champion olympique du 1500m aux Jeux de Londres en 2012. Tombé malade en 2013, il a raté sa saison de compétitions cette année-là et une bonne partie de celle de 2014. En avril 2014, il a décidé de rompre avec son coach Adem Jama mais aussi avec son manager, le Suédois Ulf Salleti. Il avait, pourtant, demandé à la Fédération algérienne d'athlétisme de signer, en octobre 2012, avec Jama, un contrat de deux ans. En rompant prématurément, il a dû pousser la même Fédération à payer, rubis sur l'ongle, tout le dû de Jama car il nous étonnerait fort que ce dernier, fort du contrat qu'il avait sous la main, contrat auquel il y avait encore 7 mois à respecter, ait accepté de partir sans demander son reste. Il s'entraîne, alors, tout seul avec son sparring-partner, un certain Nacer Hellil. Makhloufi refait, par la suite, appel à son coach originel, celui qui l'avait découvert à Souk Ahras, Ali Redjimi. Mais cette nouvelle union n'a pas duré. Redjimi est remisé sur le côté et Makhloufi opte pour la méthode de s'entraîner tout seul au début de la présente saison. Une situation pour le moins cocasse pour un athlète de sa renommée. Quand des journalistes ont demandé au président de la Fédération algérienne d'athlétisme ce qu'il pensait de cette situation, il a répondu : «C'est un athlète ingérable.» En avril 2015, alors que les Mondiaux de Pékin approchent à grands pas, il consent à se placer sous la coupe de l'entraîneur français Philippe Dupont. Un coach qui reconnaîtra que l'échec de son athlète à la finale des Mondiaux de Pékin était dû à son mauvais début de préparation saisonnière lorsqu'il s'entraînait seul. Ce même Dupont déclarera, à partir de la capitale chinoise, juste après la finale de dimanche, que Makhloufi et lui n'avaient pas arrêté de stratégie pour cette course. Absolument effarant venant de la bouche d'un technicien que les Français présentent comme quelqu'un de très compétent. Cette aveu du coach français donne plus de valeur à l'avis d'un Noureddine Morceli qui a déclaré à un de nos confrères que Taoufik a failli dans cette finale parce qu'il n'avait pas de tactique précise. On voit, donc, combien l'athlète algérien est instable. Nous avons connu Noureddine Morceli du temps de sa splendeur. Il disposait d'un groupe solidaire, uniquement composé d'athlètes algériens, avec lequel il est resté fidèle jusqu'au bout ainsi qu'avec son coach de frère Abderahmane et son manager Amar Brahmia. Voilà comment s'explique l'extraordinaire réussite de cet athlète. Makhloufi se doit de suivre cet exemple d'autant qu'il ne dispose ni du talent ni de la vélocité d'un Morceli qui dominait, de la tête et des épaules, les 1500m dans lesquels il était aligné. On verra bien, ce jeudi, au meeting de la Diamond League de Zurich, où il s'alignera dans le 800m, s'il a retrouvé un peu de moral, dans une course où il sera confronté à cinq des huit finalistes de Pékin dont le vainqueur, le champion olympique et recordman du monde, le Kenyan David Rudisha, le médaillé d'argent de Pékin, le Polonais Adam Kszczot et le quatrième de cette même finale, le Kenyan Ferguson Rotich Cheruiyot.