Quand un rocher tombe, il emporte souvent dans sa chute tous les rochers qui gravitent ou ont gravité à ses côtés. Il en va ainsi du président de la Fédération internationale de football, Sepp Blatter, qui va s'en aller mais qui, en partant, veut emmener avec lui certains de ceux qui ont partagé le miel avec lui durant des années, puis ont choisi de se mettre contre lui et de briguer même sa place. Le Comité d'éthique de la Fifa vient de suspendre pour trois mois le président de cette instance mais dans le même temps il a infligé la même sanction à celui qui le combat depuis quelques mois et a déclaré qu'il se portait candidat au poste de président de cette Fédération internationale, à savoir Michel Platini. Ce dernier, président de l'Union européenne de football, va devoir se mettre en berne durant 90 jours. Un véritable coup de massue sur la tête du Français qui se voyait président de la Fifa dès que Blatter avait annoncé son départ. Le Suisse partira, c'est sûr, mais son remplaçant ne sera certainement pas le Français. Ainsi en a-t-il décidé et il a tout fait pour. Bien sûr, certains diront que trois mois de suspension n'empêcheront Platini de se présenter le 26 février prochain à l'élection à la présidence de la Fifa. Ils ont tout intérêt à tempérer leur optimisme. D'abord, l'affaire serait loin d'être close et Platini est susceptible de prendre 45 jours supplémentaires de suspension. Ensuite, après tous les scandales qui ont agité le monde de la Fifa, ce serait un comble, sinon une humiliation que de voir les votants porter leur choix sur quelqu'un que la commission d'éthique a suspendu pour affaire frauduleuse. Cela voudrait dire que le monde du football n'entend pas se débarrasser des casseroles à scandales qu'il traîne. Platini a été un grand footballeur mais du point de vue gestion il n'est pas un saint. On lui a reproché pas mal de choses quand il marchait aux côtés de Blatter et le soutenait dans ses démarches. Andrew Jennings, le journaliste écossais qui a dévoilé le scandale de la Fifa, regrettait l'autre jour que Platini n'ait pas démissionné quand il s'est aperçu de toutes les affaires louches du football international. «Il est resté en poste et a même soutenu Blatter», a-t-il fait remarquer avant de conclure : «lui aussi n'est donc pas propre.»Pour revenir à l'élection à la présidence de la Fifa, on sait qu'elle se déroulera le 26 février 2016 et que c'est le 26 octobre prochain que sera close l'opération de dépôt des candidatures. Platini a d'ores et déjà annoncé qu'il maintenait la sienne, ce qui veut dire que son dossier, qui sera traité par la commission électorale, va être transmis à la commission d'éthique qui vient de la suspendre pour trois mois. C'est cette dernière qui se prononcera sur son cas et dira si cette candidature doit être rejetée ou non.Pour assurer l'intérim de la présidence de la Fifa, on a nommé le premier-vice président, Issa Hayatou lui-même président de la Confédération africaine de football. sur les remous que connaît cette instance, il a assuré «n'avoir jamais trempé dans des affaires douteuses et être clean». Il a simplement oublié d'évoquer qu'en 2011, il avait reçu un blâme du CIO (le président de la Fédération internationale d'athlétisme de l'époque, Lamine Diack, avait écopé de la même peine) pour avoir perçu de l'argent de la société de marketing ISL.Toujours est-il que l'affaire de la Fifa est loin d'être close, avons-nous écrit plus haut. Il faut, en effet, s'attendre à d'autres rebondissements, d'autres révélations et d'autres sanctions. Le Procureur général de la Suisse l'avait bien dit : «nous n'en sommes qu'à la mi-temps de cette affaire.»