Constantine s'est mise au diapason du jazz depuis quelques années, grâce au Dimajazz qui, pour son deuxième concert samedi soir à la salle Ahmed-Bey du Zénith, a hissé haut, très haut, le niveau des concerts, avec trois grosses pointures de la scène, jazz, blues, soul et africain contemporain. L'époustouflante Oum, les très distingués Malted Milk en compagnie de l'étourdissante Toni Green ont assuré une soirée haute en couleur. «Je suis très heureuse de me produire en Algérie, ce pays si cher à mon cœur, et de présenter mon nouvel album ici à Constantine qui, j'espère, m'ouvrira les portes d'Alger et d'Oran», dira Oum au début du concert. Accompagnée du virtuose Yasser le Cubain Inor Sotolongo percussionniste, Oum a gratifié le public fidèle du Dimajazz en chantant les titres de son nouvel opus Zarabi, sorti récemment en France et au Maroc, ainsi que certains titres de son précédent album Soul Of Morocco. Oum El Ghait Benessahraoui, alias Oum, est une chanteuse de soul aux sonorités maghrébine et africaine contemporaine d'origine marocaine. Elle ne s'enferme pas dans un seul style. «La musique pour moi est un espace de liberté, j'ai opté de ne pas m'enfermer dans un genre et ne faire que du jazz ou que du chaâbi. Nos peuple et culture ont été traversés par tellement de courants qu'au final, toute cette divergence est «une richesse» que d'autres ne possèdent pas ; il faut en tirer profit et rester ouvert à tous les horizons». Truffé de sonorités maghrébines et africaines sur fond de jazz tressé à la soul, Oum introduit dans ses chansons de l'arabe dialectal ainsi que des phrases en hassanya qu'elle souhaiterait apprendre. Oum chante l'amour, la paix, la plénitude à travers Nia, Lila, Hna, Jini, Wali, N'nay, Veinte Anus… Cette jeune femme d'une beauté mystérieuse incarne parfaitement le brassage culturel maghrébin et africain. Son regard de braise ardente, jumelé à sa voix suave et chaleureuse telles les dunes du désert associées à sa tenue saharienne et africaine qu'elle revendique, a complètement ensorcelé, hypnotisé le public de la salle Ahmed-Bey. Une belle découverte pour certains, une redécouverte pour d'autres. Toute en légèreté, une présence scénique non égalée, la beauté de sa musique qu'elle compose elle-même relaxe les âmes et apaise les tensions. Zarabi est un album plus épuré et naturel que Soul Of Morocco. Un fabuleux show venu de Memphis «Il contient moins d'instruments, moins d'effets, on n'est plus dans une performance musicale, mais plus dans un style accessible au grand public», nous dira l'artiste en marge du concert. Soulignons que l'album Zarabi a été enregistré en plein air dans le sable au cœur de la ville Hamid-Ghizlane au sud-est du Maroc, à quelques kilomètres de la frontière algérienne. Les micros ont été implantés en plein air, sans casque ni autre artifice. L'idée étant d'accepter les imperfections et ce que peut imposer le climat du désert qui inspire et impose l'humilité. Dès les premières notes musicales des Malted Milk, le public se lève comme un seul homme pour l'applaudir et l'acclamer. Les six musiciens et chanteurs du groupe offrent un pur concentré de Great Black Music qui a pris une ampleur magistrale en live dans la salle Ahmed-Bey. Après une chanson interprétée par Arnaud Fradin, le leader et fondateur du groupe, l'entrée fabuleuse de Toni Green sur scène a littéralement renversé le public, donnant le tempo très hot de la suite de la soirée. Venant directement de Memphis dans le Tennessee (USA), ville considérée comme «le berceau mondial du blues», Tony Green, vêtue d'une scandaleuse robe dorée pailletée et ornée d'une coiffure style années 1930, elle assure en diva le show à l'américaine. Une voix puissante semblable à celle de Tina Turner, le rythme dans la peau à la James Brown, il n'aura pas fallu plus que ça pour que certains jeunes du public montent sur scène en plein concert et s'approchent de la sensuelle Tony Green. Juste call me, All that this felling, Sexy love machine… des titres de l'album Milk & Green enregistrés par le groupe en 2014, dont le titre est un jeu de mots, trait d'union entre le nom du groupe et celui de la show-woman. Cet album fait trembler les amateurs de groove en tous genres avec son cocktail explosif de blues, de funk et de soul. La collaboration entre le groupe Malted Milk et la chanteuse Toni Green titille la corde sensible des amoureux de blues, avec une fidélité et une sensibilité tout bonnement hallucinantes. Les notes de piano du saxophone, de la batterie, de la basse et de la trompette embrasaient les sublimes voix de Tony Green et d'Arnaud Fradin. Malgré son âge avancé, la belle reste jeune par son enthousiasme, son rythme et son humour qu'elle décline à la perfection sur scène. Drôle et capricieuse, Tony joue avec le public et les membres du groupe, notamment en interprétant la chanson Sexy love machine, où elle titille une belle conversation avec son public qui le lui renvoie bien. How what you want, i like that… elle pousse et poursuit à la perfection son humour américain des grands soirs. Un projet novateur et audacieux Quand le producteur Sebastian Danchin décide de jumeler le talent incontestable des «Malted Milk», le groupe français originaire de Nantes créé en 1996 par Arnaud Fradin (guitare et chant) et Emmanuel Frangeul (harmonica), à Toni Green, représentante éclairée de l'héritage soul de Memphis est loin d'être une débutante. En effet, elle a été choriste pour les plus grands noms de la soul comme Al Green, Isaac Hayes ou encore les Bar-Kays, le groupe qui accompagnait sur scène Otis Redding. Tony Green a à son actif une demi-douzaine d'albums solo et autant de prix internationaux. Cette rencontre entre la chanteuse de Memphis et le groupe nantais donnera naissance à un album ahurissant, «Green & Milk». Cette formation se produit pour la deuxième fois en Algérie. De notre envoyée spéciale