La baisse des cours du pétrole à un niveau historique de moins de 30 dollars le baril porte un coup dur à l'Algérie. C'est tout le budget de l'Etat pour l'année 2016 qui est ébranlé et devient caduc. Celui-ci a été établi sur la base d'un prix de référence de 37 dollars. Depuis presque une quinzaine d'années, l'Algérie n'a pas vécu une telle situation économique et se retrouve désormais otage de sa dépendance de la rente pétrolière. Avec un baril en deçà du seuil fixé par l'Etat pour ses dépenses annuelles, il y a lieu de s'interroger sur la réaction du gouvernement. La loi de finances élaborée sur la base d'un prix de 37 dollars ne constitue plus une référence. Cette projection est désormais obsolète et dépassée par le prix enregistré vendredi sur les marchés boursiers de 29 dollars le baril. Et l'arrivée de l'Iran sur le marché pétrolier devra encore influer sur les prix. Certains experts n'écartent pas un baril à 20 dollars. Ces prévisions pessimistes rendent la tâche compliquée pour le gouvernement qui considère la dégringolade comme un effet conjoncturel. Or, tout semble s'inscrire dans la durée et ce qui va se produire risque encore de nous surprendre davantage. C'est toute la situation financière de l'Algérie qui est aujourd'hui menacée. Et les mesures prises par le gouvernement dans le cadre de la loi de finances 2016 s'avèrent désormais inefficaces et ne peuvent permettre de préserver les équilibres financiers, notamment les réserves de change déjà fragilisées et en baisse depuis plus d'une année, se situant à moins de 150 milliards de dollars, selon le bilan de la Banque d'Algérie. Il n'est pas exclu de voir certains projets publics gelés ou carrément abandonnés, comme ce fut le cas pour les projets de construction d'hôpitaux (CHU), de routes et de rails (train, tramway et métro). La baisse vertigineuse des revenus pétroliers, rappelons-le unique ressource financière en devises du pays, oblige le gouvernement à revoir toute sa politique budgétaire jusque-là basée à plus de 60% sur la fiscalité pétrolière. Il se trouve que même la fiscalité ordinaire n'est pas totalement assurée par les secteurs économiques, mais des recettes provenant d'impôts payés par le simple citoyen (vignettes automobiles, taxe sur les véhicules neufs…). La baisse des revenus pétroliers affectera donc de manière directe la fiscalité ordinaire, considérée par les autorités financières du pays comme une solution palliative en cette conjoncture peu favorable. Une LFC s'impose Tous les scénarios sont possibles et envisageables avec le recul des prix de l'or noir. Le gouvernement sera sous pression et va devoir donc trouver des solutions pouvant garantir le maintien des subventions des produits de première nécessité et de large consommation, assurer la disponibilité du médicament et des soins gratuits, financer les besoins de la défense nationale, de l'éducation et payer les salaires de la Fonction publique. Il n'est pas exclu dans ce contexte de voir la politique de soutien à l'appareil économique menée jusque-là par l'Etat totalement reconsidérée et revue afin d'orienter la dépense publique uniquement sur les secteurs stratégiques. Une loi de finances complémentaire s'impose d'elle-même, car les projections de la LF 2016 sont dépassées. Les importations qui devront atteindre 55 milliards de dollars en 2016 ne peuvent plus être assurées avec l'érosion des revenus pétroliers. Les autorités tablaient sur des recettes d'exportation de 26,4 milliards de dollars, sur la base d'un baril à 37 dollars et le déficit devait être financé par le Fonds de régulation des recettes. Mais ces prévisions ne tiennent plus la route du fait de la baisse du prix du baril enregistrée depuis le début de l'année. Une baisse qui risque d'ailleurs de s'accentuer avec l'arrivée de l'Iran sur le marché pétrolier et de la stagnation de la demande chinoise. En l'absence aussi d'une réaction de la part de l'Opep, les prix risquent de se maintenir à des niveaux très bas jusqu'à 2019, selon les estimations du Fonds monétaire international qui s'est appuyé sur les données de l'Agence internationale de l'énergie. Cette situation inédite remet en cause tout l'optimisme affiché jusque-là par le gouvernement. Abdelmalek Sellal avait soutenu à maintes reprises que la situation financière du pays était sous contrôle, critiquant ouvertement les analyses des experts. Maintenant que le prix de l'or noir est descendu à un niveau jamais supposé que dira le Premier ministre ?