Zoria Odette Telaïche est une femme attirée par l'art pictural depuis sa prime enfance. Son amour des couleurs avec lesquelles elle savait «murmurer» des choses exquises qu'elle gardait dans sa mémoire pour les faire resurgir un jour dans des œuvres que beaucoup apprécient. Nous l'avions rencontrée dans une exposition et c'est là, également, que nous avons connu sa peinture. Cette artiste puise son inspiration du quotidien, du réel et de ce qui nous échappe pour le transformer en rêves où ses sujets évoluent dans un monde féerique. Zoria Telaïche s'exprime plutôt par les couleurs dont la maîtrise est un véritable bonheur. Elle sait conjuguer la spontanéité que demande ce langage et la rigueur graphique. Son esprit de synthèse très développé lui permet de saisir l'instant, la lumière, qui donnent à son œuvre tout son intérêt en y ajoutant ce petit plus qui reflète sa personnalité. L'œuvre de Zoria est un moment d'émotion qu'elle nous offre. «J'étais toujours passionnée par les arts, en premier lieu par l'art culinaire. J'avais des projets dans ce domaine, mais ils n'ont pu être réalisés. Je sais apprécier les choses. L'odorat pour sentir les herbes, la décoration des plats… la dégustation. Alors toutes les couleurs que je n'ai pu mettre dans une assiette, j'essaie de les immortaliser dans un tableau avec la couleur et la joie. L'Algérie Zoria Telaïche nous parle aussi de ses peintres préférés tels que Matisse, Bracke et d'autres. «Matisse ! Ce nom à deux syllabes qui a fini par signifier la couleur et la joie, la lumière, le luxe et la splendeur.» Avec modestie, Zoria nous dit : «Je me situe entre le figuratif et le naïf. Je me remets toujours en question.» C'est en 1964 que Zoria s'installe en Algérie, elle «plonge» dans ses couleurs et se «baigne» de ses lumières. Avec un amour chaleureux, elle s'adapte au pays. Elle suit son chemin d'artiste sans se soucier des modes et des courants pour atteindre son but. Elle croit aussi avec sincérité à l'art. Comme disait Wagner : «Je crois à un jugement dernier où seront condamnés à des peines terribles tous ceux qui en ce monde auront osé trafiquer de l'art sublime et chaste, tous ceux qui les auront souillés et dégradés pour la bassesse de leurs sentiments, par leur vile convoitise pour les jouissances matérielles…» Zoria a cette croyance, cet humanisme qu'on retrouve dans ses œuvres. «Je cible les gens sensibles à la couleur. Je peins avec mon cœur, c'est pour cette raison que je veux approfondir mes tableaux.» Avec spontanéité, Zoria utilise des couleurs chaudes puisées par son regard et qui reflète son tempérament de femme sereine et dévouée à ce qu'elle aime. C'est aussi ce ciel bleu, cette mer et cette odeur de la terre d'Algérie qui l'inspirent et lui donnent goût à la vie. Dans l'un de ses tableaux exposés au palais de la culture Moufdi-Zakaria, à l'occasion de l'année pour la culture de la paix, elle avait écrit avec des couleurs : «Mère Algérie, ton pays est une mosaïque de couleurs, prends-le dans tes bras, laisse l'oiseau de la paix s'envoler. Regarde l'olivier que ton père a planté, c'est l'ombre de la vie…» Son oeuvre est un poème Zoria se rappelle de sa jeunesse lorsqu'elle meublait son temps à lire des bandes dessinées et des livres, mais elle garde toujours en mémoire un ouvrage de Jean-Paul Sartre qui leur avait été interdit de lire dans un établissement religieux. «Mais j'ai trouvé le moyen de le lire en cachette», a-t-elle dit. La folie artistique, la belle folie ! C'est à partir de la jeunesse qu'on commence à «aiguiser» ses goûts artistiques. Zoria, qui visita avec son oncle le musée du Louvre à l'âge de 9 ans, resta longtemps à admirer La Joconde. C'est aussi ce qui éveille l'esprit artistique chez l'enfant. «Ici, nous dit-elle, il y a des musées et beaucoup de choses à découvrir en Algérie, mais les gens ne s'y intéressent pas. Quant à moi, je viens souvent au musée des beaux-arts d'Alger. Je me retrouve seule avec les âmes des artistes qui ont fait ces tableaux et les agents qui travaillent dans cet établissement. Je pense que ceux qui ont choisi le métier de conservateur ou de bibliothécaire, ce n'est pas pour rester seul.» Pour Zoria Odette Telaïche, «la vie n'est pas un long fleuve tranquille», comme disait un poète. L'œuvre de cette artiste est un poème dont chaque vers nous séduit par sa couleur, dont les rimes nous ramènent à l'essence de notre terre… beauté sincère, sans fard, nous touche au plus profond de notre être.