Le patronat algérien veut s'impliquer dans un secteur où la jeunesse est grandement concernée. Le mardi 17 février 2015, une délégation du Forum des chefs d'Entreprise (FCE), conduite par son président, Ali Haddad, a été reçue par le ministre des Sports de l'époque, Mohamed Tahmi, au siège du département de celui-ci. A l'issue de cette rencontre, le patron des patrons algériens avait annoncé que les opérateurs économiques privés étaient intéressés par l'investissement dans le domaine du sport, notamment dans les infrastructures et les équipements sportifs. Mais il ne s'agissait là que de l'une des propositions du FCE qui avait fait part de son vœu de se placer en partenaire du ministère des Sports en vue de contribuer au développement et à l'épanouissement du mouvement sportif national. Les représentants du FCE avaient alors fait connaître ses recommandations et ses propositions en vue de concrétiser un tel projet sur le terrain ainsi que les décisions arrêtées à l'issue de leur rencontre avec le ministre des Sports. Nous nous sommes procurés le document dans lequel le FCE fait part de ses projets dans ce domaine. Groupes d'intérêt hostiles Pour le FCE, «l'investissement des entreprises dans le sport est un enjeu crucial pour le pays. Il allège la dépense publique, crée des emplois et de la richesse et pourrait représenter un soutien important à la stratégie de développement que conduit le ministère des Sports». Le problème est que le département ministériel est, depuis des années, confronté à des réticences au sein du mouvement sportif national où des groupes d'intérêt craignent de voir leurs privilèges fondre comme neige au soleil si le patronat venait à investir dans le sport. Pas un ministre, installé à la Place 1er mai, n'a réussi à mettre au pas ces groupes qui, il faut le dire, trouvent toujours une oreille attentive au niveau de certaines sphères du pouvoir quand ils se sentent en danger. On pense à quelques présidents de clubs de football, pour ainsi dire, indéboulonnables en dépit de toutes les critiques dont ils sont l'objet. L'entrée du FCE dans le domaine du sport est pourtant plus que nécessaire, connaissant les difficultés dans lesquelles il se débat. Cette entrée est surtout souhaitable dans le domaine des infrastructures sachant que le développement du sport ne saurait se réaliser sans des aires de jeu en nombre et en qualité. A ce sujet, le FCE a fait savoir que son souhait serait que l'entreprise algérienne bénéficie d'un maximum de confiance lorsque des projets de construction d'infrastructures sportives sont lancés. Il ajoute que «les entreprises algériennes peuvent, en outre, être d'un grand apport dans la gestion des grandes enceintes sportives dans le but d'augmenter les revenus, l'efficacité et garantir la pérennité de ces investissements. Il y a un besoin d'allègement des contraintes administratives pour les entreprises désirant investir dans le secteur du sport». Des droits audiovisuels à adapter Le FCE propose également une approche mieux adaptée aux conditions économiques actuelles en matière de sponsoring sachant que celui-ci est une source de financement non négligeable au monde du sport. Il souhaiterait, dans ce domaine, que l'on parvienne à «abroger les dispositions législatives relatives aux plafonds fiscaux liés aux montants consentis au titre du sponsoring qui ne correspondent plus à la réalité économique actuelle». Dans la foulée de cette proposition, il espère obtenir la révision de la législation régissant les contrats d'assurance destinés aux sportifs. Le Forum projette, d'autre part, de ne pas laisser en rade les anciens sportifs en les réinsérer dans le monde de l'entreprise mais aussi mettre en place un programme spécial d'incitation pour les investisseurs dans le sport. Dans le domaine de l'information, le patronat envisage d'encourager la presse à assurer une couverture médiatique de tous les sports et pas seulement le football, même si on sait que celui-ci est la discipline la plus populaire. Les sports dits mineurs ont besoin du soutien des médias pour se faire connaître et se développer. Il préconise, de surcroît, de «favoriser l'éclosion d'un marché des droits audiovisuels en Algérie et l'émergence d'investisseurs qui pourront, à terme, concurrencer les acteurs régionaux». En matière de marketing, le FCE souhaite amener les Fédérations sportives à avoir «des règlements clairs relatifs aux droits de diffusion et aux droits de marketing pour définir les paramètres reconnus aux différentes parties dans un principe d'équité et de solidarité». Il appelle à «impliquer davantage les entreprises de l'événementiel dans l'organisation des événements sportifs et à autoriser l'exploitation des infrastructures sportives dans l'organisation d'événements hors sport». Des clubs à prendre en charge Le FCE accorde également un important intérêt à tout ce qui touche à la formation et à la prise en charge des jeunes catégories en vue de construire et renouveler les élites sportives. A ce titre, il compte obtenir des facilités dans une opération visant à lancer des académies sportives puis à aider celles-ci dans leur mission de formation et d'éducation. Concernant le football professionnel, le FCE souhaite voir l'ouverture du capital des clubs aux investisseurs même étrangers si nécessaire. La patronat veut aussi apporter sa contribution au développement du professionnalisme dans le football en proposant une liste d'industriels et d'investisseurs algériens prêts à reprendre l'ensemble des clubs des Ligues 1 et 2. Un football bien géré et plus performant est capable de servir de locomotive à l'ensemble du mouvement sportif national. Lors de la réunion du 17 février avec Mohamed Tahmi, la plupart de ces propositions et recommandations avaient été accueillies favorablement par le ministre. Mais Tahmi n'est plus ministre depuis le 14 mai dernier et on ne sait pas ce qu'il est advenu des résultats de la réunion en question. Il est clair que l'Etat a les moyens de prendre en charge le sport algérien mais un partenaire aussi important que le FCE est de nature à lui apporter du soutien dans ce genre de mission. Les pouvoirs publics ont toujours encouragé les associations sportives, de quelque nature que ce soit, à diversifier leurs sources de financement. Il est plus que nécessaire qu'ils trouvent l'approche adéquate afin de faciliter aux investisseurs algériens leur intégration dans la grande politique visant à développer le sport au service exclusif de sa population.