Chakib Khelil est revenu au pays jeudi. L'ancien ministre de l'Energie, qui avait fait l'objet d'un mandat d'arrêt international en 2013, ne pouvait espérer un retour aussi «revanchard» que celui qu'il vient d'effectuer. Un retour qui n'étonne pas outre mesure les observateurs notamment depuis que le secrétaire général du FLN, Amar Saâdani, s'est mis à plaider sa réhabilitation ainsi que celle des cadres qui seraient victimes des rapports du défunt DRS. Le retour de Chakib Khelil est une suite logique des évènements qui se sont enchaînés ces derniers temps. Les observateurs n'écartent pas le retour de celui qualifié par Amar Saâdani du «meilleur ministre que l'Algérie n'ait jamais connu» aux affaires, surtout que l'ex-ministre de l'Energie a bénéficié d'un accueil presque officiel à l'aéroport d'Oran où il a débarqué en provenance de Paris. Ayant défrayé la chronique depuis des années, Chakib Khelil dont le nom est souvent associé aux scandales Sonatrach est présenté aujourd'hui par certains partis au pouvoir, le FLN en tête, comme un homme «intègre» dont l'Algérie a énormément besoin de ses services. «Chakib Khelil a fait de Sonatrach une puissance. A son époque, Sonatrach était une entreprise forte, une place qu'elle a perdue depuis son départ», a déclaré le patron de l'ex-parti unique juste après la rentrée de l'ancien ministre au pays. Il ajoutera, dans une interview à un confrère, que Chakib Khelil a servi son pays et son secteur à travers ses compétences et son savoir-faire. Mieux encore, Amar Saâdani soutient que ce retour va rendre confiance aux cadres «injustement traités, injustement incarcérés et injustement écartés». Dans les déclarations de Amar Saâdani, il y a comme des annonces. Il avait plaidé pour le départ de général Toufik, il l'avait obtenu. Il avait réclamé la fin du «pouvoir parallèle» incarné par le DRS, il avait obtenu l'effacement du sigle. Il plaide pour la réintégration des cadres «injustement écartés» dans leur poste de travail, rien n'indique qu'il ne va pas l'obtenir. Un système judiciaire perverti Mais la grande victime dans cette histoire de fuite et de retour de Chakib Khelil reste, selon nombre d'observateurs, la Justice algérienne. Au moment où l'ancien ministre était voué aux gémonies, un mandat d'arrêt international a été émis contre lui, avant qu'il ne soit annulé «pour vice de forme», a-t-on soutenu. L'ancien ministre de la Justice, en poste au moment de l'émission du mandat d'arrêt, a été écarté du gouvernement. Même le procureur général de la Cour d'Alger qui a émis le mandat a été limogé. Aujourd'hui, la justice «a les mains attachées» et Chakib Khelil rentre comme si de rien n'était où, plus grave encore, son retour renvoie l'image d'une justice impuissante réduite à un simple instrument utilisé par les uns contre les autres. L'avocat Khaled Bourayou estime que le système judiciaire est perverti par le politique. Cela étant dit, le retour de Chakib Khelil au pays est différemment apprécié par les partis politiques. Si le FLN se félicite de ce retour et le considère comme une réparation d'une injustice, ce n'est pas le cas des partis de l'opposition. «C'est la logique du vainqueur au sein de cet Etat, ni plus ni moins», a commenté le président du MSP, Abderrazak Makri, en se demandant comment veulent-ils (les décideurs) que le peuple fasse confiance en ses dirigeants ? Pour le chargé de communication du RCD, Atmane Mazouz, le retour de Chakib Khelil en Algérie «interpelle en premier lieu ceux qui l'ont le plus souvent accusé ou protégé, mais cette affaire doit, en priorité, laisser place à la justice et à l'éclosion de la vérité sur des questions liées à des soupçons d'atteintes à l'économie nationale». «Espérons que la justice ne soit pas sacrifiée sur l'autel des règlements de compte entre les différents clans. Chakib Khelil est un justiciable comme tous les citoyens et il ne doit pas être au-dessus des lois ou servir de bouc émissaire», a-t-il ajouté.