Le président Bouteflika s'est rendu hier en Suisse pour des contrôles médicaux, a annoncé la présidence de la République dans un communiqué. «Son excellence, Monsieur Abdelaziz Bouteflika, président de la République, a quitté le pays ce dimanche 24 avril 2016 pour une visite privée à Genève durant laquelle il effectuera des contrôles médicaux périodiques», indique la même source. Selon des sources concordantes, le chef de l'Etat aurait été admis à la clinique Genolier, dans la commune du même nom, non loin de Genève. Si les déplacements de M. Bouteflika à l'étranger pour des contrôles médicaux sont devenus ordinaires depuis son AVC du 27 avril 2013, son transfert en Suisse et non pas en France comme d'habitude, soulève des interrogations. Il confirme que le malaise entre les deux pays, depuis la visite du Premier ministre français, Manuel Valls à Alger, le 10 avril dernier, dans le cadre de la tenue de la 3e session du Comité intergouvernemental de haut niveau algéro-français, est bien réel. La visite de Valls, suivie de la publication d'une photo de lui avec Bouteflika, le montrant très affaibli, a provoqué une vague d'indignation chez les partis politiques et la société civile proches du pouvoir. Le choix de la Suisse ne laisse plus aucune place au doute : le malaise entre Alger et Paris depuis la publication de cette photo se confirme. Surtout que depuis le 27 avril 2013, où un AVC a terrassé le chef de l'Etat, ce dernier s'est fait hospitalisé en France et y faisait le suivi du moment que c'est dans ce pays que ses médecins exercent. Le dernier communiqué diffusé par la présidence de la République, le 3 décembre 2015, faisant état du transfert de Bouteflika pour des raisons médicales était clair : il était en France pour des «contrôles médicaux périodiques, sous la direction de ses médecins traitants». Que s'est-il alors passé pour que ces contrôles se fassent à Genève et non pas à Paris ? Pour les observateurs, la photo de Valls a provoqué une crise diplomatique entre les deux pays et de ce fait, il serait pour le moins insensé et inacceptable que le premier magistrat du pays se rende en France dans cette conjoncture particulière. Le geste de Manuels Valls a été sévèrement critiqué par les partis du pouvoir, et même en France. Ahmed Ouyahia, secrétaire général du RND et directeur de cabinet de la présidence de la République, l'a qualifié de «comportement abject de revanchards français». Mieux, Ouyahia a même cru avoir décelé un complot derrière la photo de Valls. La puissante organisation patronale, le FCE, et la centrale syndicale l'UGTA ont dénoncé «une campagne fallacieuse et malveillante» contre l'Algérie qui a atteint son paroxysme avec la publication de la photo du Premier ministre français et les «manipulations diffamatoires délibérément dirigées contre l'institution présidentielle». De même pour l'ancien patron de la DST, Yves Bonnet, qui avait qualifié le twitt de Manuel Valls de «geste indigne». L'UGTA et le FCE se sont dit «indignés par ces agressions irrespectueuses envers notre pays et ses institutions républicaines». C'est dire que le discours relatif à la construction d'une relation d'exception entre les deux pays n'est qu'une vue de l'esprit.