A l'évidence, l'artiste fait un grand clin d'œil à Amedeo Modigliani D'emblée, lorsque l'on découvre l'exposition du plasticien Khaled Rochedi Bessaih, on est agréablement surpris par tant de couleurs et par ces attitudes et comportements aussi loufoques les uns que les autres ; ce sont des postures et des allures saugrenues et burlesques que met en valeur le plasticien dans toutes les compositions de son exposition qui se tient à la galerie Ezzouar 'Art du 21 mai au 9 juin. A l'évidence, l'artiste fait un grand clin d'œil à Amedeo Modigliani. Ces personnages femmes ou hommes sont, dans des postures drôles et hilarantes comme cette femme vêtue tout de verre qui s'entortille pour toucher son chat noir au long cou ou cette autre qui jaillit d'une guitare ou cette femme qui a le cou aussi long que le manche de sa guitare. Des toiles colorées à bon escient avec une prédominance de tons comme le vert, l'orange, le bleu et un tantinet de jaune. Ces personnages aux longs cous, souvent étirés à souhait plaident pour cette note d'espoir vers un idéal. «Plus les formes sont longues plus l'espoir et l'ambition d'atteindre son idéal sont grands», précise Rochedi. Pour l'artiste, l'attitude engendre déjà les prémices pour l'essence même du portrait auquel se greffe l'émotion et l'ambiance de l'œuvre. Chaque visage crée un émoi et génère des sentiments : la douleur, la peine, l'interrogation, l'inquiétude et le doute. Au-delà du cocasse… Ce sont des personnages tourmentés où leur mal être est d'une grande visibilité. Pour chaque tableau, le plasticien a inscrit un poème de son cru ; en voici un pour illustrer «Illumine mon cœur toi le vieux le plus sage, dissipe la brume de mon esprit, toi qui m'a vu toi qui m'a fait rire, toi qui m'a fait taire, les larmes restent tatouées sur ma pudeur dévoilée de ta voix ; on m'a déchu de mon Afrique perdue». Assurément, Rochedi a plus d'un tour à son arc ; la muse de la poésie le taquine également. Et sa poésie est aussi à son image authentique et vraie. De visu, cette galerie de portraits suggère une série qui raconte une sorte d'histoire. Sa prédilection à Modigliani se résume dans l'attachement à cet artiste peintre. «Le personnage est attachant par sa façon de peindre et sa manière de vivre avec ses cous longs ; lorsque j'ai vu le film sur cet artiste cela m'a marqué et j'ai dédié une toile sur son histoire d'amour avec Jeanne. J'aime son côté décalé, cette folie qu'il porte en lui», explique Rochedi. Faisant référence à la verticalité dont parle le plasticien : «Je l'exprime à travers la couleur qui interpelle le regard sur ces courbes et sur ces personnes mélancoliques et sombres», dit-il. Ces compositions originales qui de prime abord suscitent l'hilarité et le risible sont d'une grande profondeur d'analyse. Au-delà de l'aspect cocasse, c'est le tourment, la souffrance et l'affliction. La vie n'est pas aussi rose que l'on pense, semble dire le talentueux plasticien. Avec habileté et dextérité, l'artiste fait un mariage d'une harmonieuse palette chromatique qui attire l'œil avec ces tons ardents et vifs. Natif de Paris, il rentre au pays où une brève halte de trois mois à l'Ecole supérieure des Beaux-arts d'Alger puis après un passage d'une année à la faculté de droit, il reprend le large et retourne s'installer dans sa ville natale durant sept années. Par la suite, son retour à Alger est couronné par une belle rencontre avec l'artiste Farid Benyaa qui l'encourage et l'exhorte à la peinture, lui qui n'en voyait «qu'un art à consommer avec prudence et modération». En 2010, après l'obtention de sa licence ès-droit, il renoue avec ses premières amours, la peinture, et s'adonne à sa passion. L'ouverture de sa galerie d'art en février 2015 consacre pleinement ses choix pour la peinture et la musique. Cette superbe exposition mérite le déplacement. Alors, si vous avez apprécié l'originalité, le plaisir et le divertissement seront au rendez-vous.