Dans cet entretien, Merzoug Hamiane, membre fondateur du groupe Debza, nous parle de leur retour sur la scène culturelle, de leur parcours, et des difficultés rencontrées où l'ombre de Kateb Yacine plane encore sur les planches. Le temps d'Algérie : Le groupe Debza dont vous faites partie vient d'éditer un nouvel album ; pouvez-vous nous en parler ? Merzoug Hamiane : En toute franchise, le premier album a été réalisé avec précipitation et dans de mauvaises conditions. Certains problèmes subjectifs au sein du groupe ont eu des répercussions techniques sur le produit, tel que le cas de notre vocaliste ; alors nous avons choisi un autre, mais il n'a pas pu s'adapter dans l'immédiat à la manière dont chantait notre ancien vocaliste, en l'occurrence Saïd. Ajoutons à cela la mauvaise qualité de l'édition. Vous venez également d'organiser une rencontre à Tinebdar (Tizi ouzou) pour commémorer le 19 mai 1956. comment s'est déroulée cette rencontre ? En ce qui concerne le gala qu'on avait animé à Tinebdar, daïra de Sidi Aich, celui-ci rentre dans le cadre de la commémoration du 60e anniversaire 1956-2016, l'année où les étudiants de cette époque ont préféré quitter les bancs de l'université pour rejoindre le maquis. Cette date coïncide également avec le 35e anniversaire de l'incident qui a eu lieu le 19 mai 1981 à la fac centrale d'Alger où il y a eu un affrontement entre les militants de la mouvance culturelle berbère et les baâthistes, ainsi que les frères musulmans. Ces derniers voulaient empêcher les membres du groupe Debza de jouer une pièce théâtrale intitulée «Rta et la Boite à merveille» en dialecte algérien Sandouq Laâdjeb, et il n'y avait que le groupe Debza qui est témoin de cet événement qui pourrait éventuellement prendre part à cette activité. C'était une réussite devant un par- terre de fans du groupe. Ce spectacle a duré jusqu'à deux heures du matin. Vous avez beaucoup travaillé avec Kateb Yacine, notamment à Sidi Bel abbès. Qu'avez-vous appris avec ce grand homme de culture ? Avec Kateb, nous avons appris beaucoup de choses. Grâce à lui, je suis devenu un journaliste autodidacte dans la presse écrite, je suis également comédien, sans pour autant faire l'école d'art dramatique. En effet, Kateb Yacine est une grande école et son influence sur la littérature et le théâtre est énorme. Peut-on dire alors que le groupe Debza est la voix de Kateb Yacine ? Nous avons choisi sa méthode et sa vision dans le théâtre engagé, mais on ne peut pas être sa voix. Il reste tout de même une référence culturelle, voire un repère. Vous êtes connu dans le domaine du théâtre, mais aussi dans la musique. comment votre groupe a tenu malgré toutes les difficultés que vous avez rencontrées ? Cette question vient en son temps ; premièrement, le groupe est né dans un contexte de combat pour l'identité et les libertés démocratiques à une période où les gens avaient peur de parler de politique ou de faire une activité subversive. Ensuite, le mouvement pendant cette conjoncture était fort et engagé dans la lutte pour ce combat des causes justes aux côtés d'une mobilisation des étudiants et des travailleurs. Donc, le groupe était en quelque sorte le porte-parole de cette mouvance du printemps amazigh.