A Ath Toudert, dans la région de Ouacifs, cette localité nichée au pied du Djurdjura, juste sous la «main du juif», la population est comme tétanisée. Un événement auquel personne ne s'attendait est venu bousculer la quiétude des habitants du village Ath Abdelouahab, qui d'habitude sombrait, comme d'autres villages de cette région montagneuse, dans la léthargie estivale. La disparition depuis cinq jours de la petite Nihal Si-Mohand, âgée de 4 ans, survenue jeudi vers 11h, a été comme un coup de tonnerre. Personne ne pouvait, l'ombre d'un instant, se douter qu'une petite enfant de ce village allait disparaître. Les enfants ont l'habitude de jouer dehors, aller à l'école et revenir seuls, sans que les parents se fassent de souci. C'est pourquoi personne n'a fait attention, en ce jeudi fatidique, qui a vu la disparition de Nihal, à peine arrivée d'Oran au village avec ses parents pour assister à une fête de mariage. Le père de Nihal est ingénieur en informatique et tient un commerce en matériel informatique dans la capitale de l'Ouest. Les recherches se poursuivent Juste après la disparition de Nihal, remarquée moins de trente minutes après son arrivée au village, les recherches ont été entreprises par les villageois qui ont tout simplement pensé qu'elle s'était égarée dans les méandres du village. Les parents décident de signaler cette disparition aux services de la gendarmerie. Aussitôt, des recherches ont été entreprises, mais sans résultat. De vastes territoires ont été passés au peigne fin. Toujours rien. Entre-temps, l'angoisse augmente. Selon le chargé de communication du groupement régional de la gendarmerie, le capitaine Lehbib Dahou, à l'heure où nous mettons en ligne, les recherches se poursuivent et la fillette est toujours portée disparue. Il a annoncé qu'un renfort de gendarmes a été appelé à la rescousse. Plusieurs éléments ont été réquisitionnés hier matin et acheminés du chef-lieu vers Ouacifs et les localités limitrophes. Cette mesure a pour objectif, dira-t-il, de faciliter les procédures de recherches qui sont en cours. Notre interlocuteur a fait savoir qu'après l'opération de recherches, il a été prévu d'aller vers une enquête dont l'objectif est d'élucider avec exactitude les circonstances de cet acte. Interrogé s'il pouvait s'agir d'un kidnapping, le capitaine Dahou s'est contenté de dire : «A l'heure actuelle, nous ne savons pas s'il s'agit d'un kidnapping. Mais nous allons nous prononcer sur cette affaire une fois l'enquête achevée. Ce que nous savons, poursuit-il, c'est que Nihal était en train de jouer avec les enfants du village Aït Abdelouhab». Vers une grève générale à Ouacifs Depuis l'annonce de cette disparition, la population de la région de Ouacifs s'est instantanément mobilisée pour retrouver la petite Nihal. Au moins vingt-huit villages participent aux opérations de recherche. On a appris que des éléments de l'unité marine de la protection civile de Tigzirt ainsi que des plongeurs d'Alger ont été mobilisés pour fouiller les puits et les points d'eau de la région. Même un chien pisteur et renifleur a été mis à contribution. Toujours rien. Depuis cinq jours, les recherches se poursuivent à la même cadence. Même s'il n'y a pour l'instant aucune demande de rançon ou prise de contact par d'éventuels ravisseurs, les parents de Nihal commencent à croire dur comme fer que leur enfant a été kidnappée. Rien d'autre ne peut justifier une telle disparition pour les parents éplorés par ce qui vient de leur arriver. Devant cette situation, l'idée d'un appel à une grève générale à Ouacifs commence à mûrir chez les représentants des comités de village de la région, avons-nous appris de sources locales. Il est question d'organiser une assemblée élargie pour discuter de cette action dans les prochains jours. La hantise des kidnappings Cette disparition remet au goût du jour la hantise des kidnappings qui ont tétanisé la wilaya de Tizi Ouzou ces dernières années. Depuis 2005, on a enregistré environ 80 cas d'enlèvements et de kidnappings. La peur était partout. Elle était là, à chaque virage, à chaque mètre. Les quatre coins de la wilaya n'ont pas été épargnés par ce phénomène qui sème la peur et la psychose au sein de la population en général et des gros commerçants, des entrepreneurs, des investisseurs et des personnes aisées, en particulier. De Tigzirt, au nord, à Yakourène, à l'est, de Aïn El Hammam, au sud, en passant par Tizi Rached et les hameaux de Larbaâ Nath Irathen à Ouacifs et Ouadhias jusqu'aux localités du sud-ouest, aucun coin n'a été épargné par ce phénomène aux conséquences dramatiques. Certaines localités étaient plus touchées que d'autres, à l'instar de Maâtkas qui vient en tête avec pas moins de dix cas enregistrés. A son apparition, la population était désarmée face à ce phénomène. Mais des sursauts citoyens ont vu le jour ici et là pour dire non à cette fatalité. Par le passé déjà, les Ath Ouacifs se sont mobilisés pour dénoncer les kidnappings et dire non à cette fatalité conçue comme un ogre qui empoisonne la vie et menace la sécurité des populations et que la présence fort remarquable des contingents de l'Armée nationale populaire et des autres corps des services de sécurité n'arrivent pas à éradiquer totalement. L'acte de résistance le plus édifiant reste celui qui est à mettre à l'actif de la tribu des Iflissen, en Kabylie maritime, qui s'est levée comme un seul homme pour exiger la libération du gérant d'un hôtel-restaurant enlevé le 31 octobre 2009. Les habitants de cette région ont investi les maquis à la recherche de l'otage, tout en menaçant les ravisseurs de leur déclarer une guerre totale. Quelques jours plus tard, il a été libéré sans le versement d'un dinar de rançon. Cet acte a fait tâche d'huile.