La Banque mondiale a prévu une chute drastique des réserves de change à l'horizon 2018, la Banque d'Algérie lui rend la monnaie de sa pièce. Dans une atmosphère économique et sociale sujette à spéculations, chaque institution monétaire y va de son pronostic pour prédire un lendemain plus ou moins incertain des finances algériennes. En donnant la réplique à la Banque mondiale (BM), qui avait dans son rapport de fin juillet 2016 prévu que l'Algérie sera appelée à vivre le vrai choc financier et économique en 2018, avec des réserves de change qui se situeront autour de 60 milliards de dollars, la Banque d'Algérie (BA) annonce d'emblée, dans un contre rapport diffusé via l'agence APS, que le niveau des réserves de change à fin 2018 sera «nettement supérieur» à celui des 60 milliards de dollars, sans pour autant se mouiller en avançant un chiffre moins dramatique. Le rapport de la BM «paraît quelque peu alarmiste et ne reposant pas sur des hypothèses probantes», avaient commenté les rédacteurs du texte qui critiquent la quasi-mauvaise foi de cette puissante institution mondiale. Selon la Banque centrale, la projection de la BM situant les réserves de change à 60 milliards en 2018 «fait l'impasse (omet) sur les évolutions prévisibles des différents indicateurs déterminant l'évolution des réserves de change de l'Algérie», ajoutant que la seule donnée est le prix du pétrole qui devrait osciller entre 41 et 60 dollars entre 2016 et 2018. Pour appuyer son analyse, l'institution de Mohamed Loukal puise dans les données du Fonds monétaire international (FMI) et de Sonatrach. Les dernières prévisions du FMI situent les prix moyens du pétrole à 36,6 dollars le baril en 2016, 42,8 dollars en 2017 et 46 dollars en 2018, rappelle la BA, qui affiche une note d'optimisme en se référant aux prévisions de Sonatrach qui a annoncé que les quantités d'hydrocarbures exportées sont croissantes. Autre argument avancé par la Banque centrale et visant à balayer d'un revers de la main un rapport tendancieux de l'institution de Bretton Woods est en lien avec la baisse des importations, enregistré depuis début 2015, chutant de 59,7 milliards de dollars en 2014 à 52,7 milliards en 2015, soit 7 milliards de dollars USD en moins. Plaider la cause du gouvernement Relevant encore une fois des prévisions «totalement improbables» prononcées par la BM, la Banque d'Algérie se met à défendre le «nouveau modèle de croissance» prôné par les pouvoirs publics, lequel est selon la BA, «fondé sur l'investissement marchand et non plus la dépense publique». Les projections de la BM «semblent tabler sur une totale inertie et absence de réactivité des pouvoirs publics». «Or, plaide la Banque centrale, un des axes importants de la problématique du nouveau modèle de croissance fondé sur l'investissement marchand (et non plus la dépense publique), annoncée par les pouvoirs publics, est la consolidation budgétaire sur la période 2017 à 2020». S'étalant sur la consolidation budgétaire, la BA explique que cela consiste à faire en sorte que l'Etat «ne dépense pas beaucoup plus qu'il n'a de recettes et devrait donc déboucher vers des déficits parfaitement soutenables, sinon vers un équilibre budgétaire». Ceci dit, justifie-t-elle, cette démarche «ne signifie pas qu'il y aura des coupes drastiques dans les dépenses publiques», mais aidera à «rationaliser les dépenses». Dans cet ordre d'idées, la BA nous renvoie à la base des données disponibles à fin juin 2016, où le FMI évalue le niveau des réserves de change à près de 122 milliards de dollars à fin 2016. Cette sortie inespérée de la plus haute institution financière du pays sonne comme une réplique technique à une situation socio-politique qui nécessite des assurances. Car avant les rapports des institutions financières et énergétiques internationale et algérienne, le Premier ministre Abdelmalek Sella s'était montré rassurant sur les réserves de change en déclarant le 14 juillet dernier à Oum El Bouaghi que quoi qu'il en soit, ces réserves ne baisseront pas au-dessous des 100 milliards USD. D'un ton d'assurance, le chef de l'exécutif était passé à la fermeté envers ceux qui, de l'intérieur ou de l'extérieur, tentent de nuire à la stabilité de l'Algérie, affirmant que l'Etat poursuivra sa politique économique et sociale.