L'armée américaine affirme que sa coalition a mis fin à ces bombardements aériens contre ce qu'elle pensait être des positions du groupe armé Etat islamique (EI), après avoir été informée par la Russie que des véhicules et du personnel militaires syriens avaient certainement été touchés. Un responsable de l'administration américaine a dit que les Etats-Unis avaient exprimé leurs «regrets» à la Russie après la mort non voulue de militaires syriens dans des bombardements aériens de la coalition sous direction américaine. Ces frappes, qui ont permis aux combattants de l'EI de s'emparer brièvement de positions de l'armée syrienne près de l'aéroport de Daïr az Zour, fragilisent un peu plus la trêve parrainée par Moscou et Washington et entrée en vigueur lundi soir. A la demande de la Russie, qui soutient le président Bachar Al Assad dans la guerre complexe qui dévaste la Syrie, le Conseil de sécurité des Nations unies s'est réuni en urgence pendant une heure samedi soir. Américains et Russes se sont livrés à une nouvelle passe d'armes diplomatique, à l'issue de cette réunion. Jugeant que la Russie n'avait jamais manifesté pareille indignation pour tous les civils tués par le régime syrien, l'ambassadrice américaine, Samantha Power, a qualifié l'attitude russe de «cynique et hypocrite». Elle a accusé Moscou de faire preuve de «démagogie». Prié de dire si les bombardements de samedi marquaient la fin de l'accord russo-américain sur la trêve en Syrie, son homologue russe Vitali Tchourkine a répondu : «Il y a un très grand point d'interrogation.» Il sera très intéressant de voir quelle sera la réaction de Washington. Si l'attitude de l'ambassadrice Power aujourd'hui fournit la moindre indication de leur possible réaction, alors nous sommes face à de graves ennuis. Selon le ministère russe de la Défense, l'aviation de la coalition réunie par les Etats-Unis a tué plus de 60 militaires syriens lors de quatre raids menés par deux chasseurs F-16 et deux avions A-10 venus de la direction de l'Irak. Dans un communiqué diffusé par des médias officiels syriens, l'armée syrienne précise que ces frappes ont été menées à 17h, heure locale, sur Djebel Tharda, près de l'aéroport de Daïr az Zour. Pour l'armée syrienne, qui dénonce une «agression dangereuse et flagrante», ces frappes apportent la «preuve irréfutable» que les Etats-Unis et leurs alliés soutiennent l'EI. Le ministère russe des Affaires étrangères a lui aussi jugé qu'il ne faisait «désormais plus aucun doute» que «la Maison-Blanche défend le groupe armé Etat islamique». Difficultés de coordination Dans un communiqué, l'armée américaine souligne que la Syrie est dans «une situation complexe» et que «les forces de la coalition ne frapperaient pas délibérément une unité militaire syrienne identifiée». D'après l'agence Amak, l'organe de communication de l'EI, les djihadistes ont pris le contrôle de Djebel Tharda après ces frappes, ce qui leur aurait permis de dominer des zones de Daïr az Zour tenues par les forces syriennes. L'aéroport et certains quartiers de la ville sont entièrement encerclés par l'EI, depuis l'an dernier, l'aéroport fournissant aux assiégés leur seul lien avec l'extérieur. Les médias russes et syriens ont rapporté que l'armée syrienne avait par la suite reconquis les positions perdues. D'après l'OSDH, au moins 20 combattants de l'EI ont été tués dans d'intenses bombardements de l'aviation russe durant ces combats. Cet incident illustre les difficultés pour la Russie et les Etats-Unis à coordonner leurs frappes aériennes contre le groupe Etat islamique et d'autres groupes djihadistes actifs en Syrie, comme les deux puissances en ont exprimé la volonté. Il fragilise surtout un peu plus une trêve censée permettre l'acheminement d'une aide humanitaire aux populations prises au piège d'une guerre qui dure depuis cinq ans. Les différents belligérants s'accusent mutuellement et de plus en plus fréquemment de violations du cessez-le-feu. La Russie a ainsi jugé samedi que la situation se dégradait sur le terrain tandis que, dans l'autre camp, un chef de l'opposition armée à Alep, dans le nord-ouest de la Syrie, a prédit que la trêve «ne tiendra (it) pas».