C'est la montagne qui accouche d'une souris. Tant attendue au plan national et international, la réunion informelle de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) ne débouchera pas sur une décision de gel ou de réduction de la production de pétrole. C'est du mois ce à quoi a fait allusion hier le ministre iranien du Pétrole, Bijan Namdar Zanganeh, dans le cadre de la 15e édition du Forum international de l'énergie, expliquant que son pays souhaite que l'Opep, dont Téhéran est membre influent, ne se prononce pas définitivement sur la production. «L'Iran préférerait que la réunion de demain (aujourd'hui, NDLR) se limite à des concertations entre les pays membres de l'Opep sur la production de l'organisation et que la décision finale soit adoptée lors de la rencontre de Vienne (Autriche) en novembre», a indiqué le ministre dans une déclaration à la presse à l'occasion de l'ouverture du forum. Evoquant la production de son pays, le ministre iranien campe sur ses positions, en exprimant à nouveau le souhait de reprendre son quota de 4 millions de barils par jour, à court terme, pour retrouver le niveau de production d'avant les sanctions internationales. Au moment où le ministre iranien exprime franchement son opposition à céder aux pressions de geler la production, son homologue et opposé saoudien, Khaled Al-Faleh, préfère temporiser et laisser la balle dans le camp des autres. Interrogé sur la position de son pays lors de cette rencontre, le ministre a répondu que «l'Arabie saoudite soutient toute position qui garantit la stabilité des prix», tout en affichant son optimisme quant à la possibilité de rétablir l'équilibre du marché qui «connaît une amélioration de jour en jour». Pour étayer ses propos, Al-Faleh a cité les prévisions de hausse de la consommation mondiale ainsi que les indicateurs «positifs» sur le marché américain au cours des trois dernières semaines. Mieux encore, le ministre saoudien va jusqu'à évaluer le degré de rapprochement entre les uns et les autres sur cette question de l'offre et de la demande ainsi que de la nécessité de trouver un consensus. Les avis «commencent à se rapprocher» entre producteurs Opep et non-Opep en vue de préserver la stabilité du marché pétrolier, a-t-il dit avant de rejoindre le panel des ministres de l'Energie, réunis en session à huis clos dans le flambant neuf Centre des conférences internationales (CIC) d'Alger, situé à un jet de pierres de Club des pins. En réalité, ces déclarations contradictoires témoignent, d'une part, des divergences qui existent au sein du cartel. D'autre part, elles viennent balayer d'un revers de la main les déclarations «optimistes» du ministre de l'Energie, Noureddine Boutarfa, qui ne cessait de crier sur les toits que la réunion d'Alger ne saura être un échec. Si Boutarfa exhibe son optimisme quant à la réussite de la rencontre d'Alger, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a prévenu contre les conséquences néfastes d'un non-accord. Le spectre de la récession mondiale Donnant le coup d'envoi de la 15e édition de l'IEF, le chef de l'Exécutif a estimé qu'un non-accord sur un prix «juste» du pétrole entraînerait l'économie mondiale dans «un long cycle de récession». Pour éviter un scénario aussi catastrophique qui «ne sert aucun pays au monde (producteur ou consommateur d'énergie)», Sellal a appelé «les principaux acteurs énergétiques à aboutir à un accord sur les niveaux de production pour conforter durablement les cours». Entre optimisme et pessimisme, celle du SG de l'Opep se situe entre les deux. Interrogé sur un éventuel accord entre les membres de l'Opep, Mohammed Sanusi Barkindo a souligné que «cela dépendra des concertations en cours», ajoutant que ces dernières sont «sur la bonne voie». «Nous travaillons durement pour réussir cette réunion informelle», a affirmé le SG de l'Opep, expliquant que ces discussions faisaient partie d'un long processus entamé à Doha, lors de la réunion des grands producteurs du pétrole, tenue en avril dernier. Pour lui, il est «normal» qu'il y ait des divergences d'avis entre des pays membres sur les moyens de redresser les cours du marché. «Le processus engagé par les producteurs du brut progresse continuellement, et les concertations seront élargies après cette réunion aux pays producteurs non-Opep et aux pays consommateurs», a-t-il fait savoir. Questionné sur la déclaration faite par le ministre iranien du Pétrole, le patron de l'Opep a répondu qu'«en tant que secrétaire général de l'Opep, je ne peux pas commenter les déclarations de l'Iran». Consensus ou pas consensus, les membres de l'Opep s'accordent à dire que la réunion d'Alger n'est qu'une rencontre dans le processus de tentatives de rapprocher les points de vue. Quant à la décision finale, il faudrait attendre encore.