Un peu plus de 10 jours après sa prise de pouvoir, le président américain Donald Trump suscite l'indignation et l'angoisse de ses concitoyens, de la justice et de la société civile américaine. Ainsi, la résistance est en train de s'organiser pour faire annuler son décret interdisant l'entrée aux Etats-unis de ressortissants de sept pays musulmans. Les juges, les diplomates, les associations, les patrons, des sénateurs, les médias et les chefs de quelques Etats se battent pour l'annulation du décret jugé anticonstitutionnel et contraire aux valeurs des USA. Jamais un président américain élu n'a été autant contesté et n'a autant vu ses décisions controversées. Des manifestations monstres ont lieu chaque jour dans les aéroports et les principales villes du pays (devant la Maison-Blanche, à Washington, New York, San Francisco, Los Angeles…), dénonçant les mesures de la nouvelle administration US. Le décret signé vendredi par Donald Trump interdit l'entrée à tous les réfugiés, quelle que soit leur origine, pendant 120 jours, et interdit aussi l'entrée pendant 90 jours aux ressortissants de sept pays à majorité musulmane considérés comme pourvoyeurs de terroristes : Iran, Irak, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Yémen. Ce texte qui a «déchaîné le chaos», comme l'a écrit le New York Times, a mobilisé l'ensemble de la société américaine contre lui. Même la ministre par intérim de la Justice, Sally Yates, a refusé de défendre et d'appliquer le décret anti-immigration. Elle a été limogée sur-le-champ. Plusieurs diplomates américains ont protesté contre le décret, en utilisant un canal officiel dit de «dissidence». «Les employés du ministère ont le droit d'exprimer leurs opinions avec franchise et de manière confidentielle auprès de leur hiérarchie», a souligné le porte-parole de la diplomatie américaine Mark Toner. Mais la Maison-Blanche a peu apprécié : «Soit ils acceptent le programme, soit ils s'en vont», a déclaré Sean Spicer, porte-parole de Donald Trump. Le décret de Trump qui a provoqué la consternation à travers le monde a fait sortir de sa réserve l'ex-président Barack Obama. Saluant les manifestations contre les mesures «trumpiennes», Obama «est fondamentalement en désaccord avec la notion de discrimination contre des individus à cause de leur foi ou de leur religion», selon son porte-parole, Kevin Lewis. «Le fait que des citoyens exercent leur droit constitutionnel d'assemblée, de mobilisation et de se faire entendre par leurs élus correspond exactement à ce que nous voulons voir lorsque les valeurs américaines sont en jeu», a déclaré l'ex-président. Alors que la mobilisation se poursuit, Stephen Heifetz, un ancien responsable à la CIA, a déclaré au Washington Post : «je m'attends à ce que la confusion et le chaos se poursuivent pendant un certain temps». Avec son décret, Donald Trump a même semé la zizanie au sein de son propre camp, les Républicains. Plusieurs sénateurs qui n'ont pas été informés ou associés à cette action ont rompu avec lui. «L'ordre exécutif envoie un signal, intentionné ou non, que l'Amérique ne veut pas que les musulmans viennent dans notre pays», ont déclaré les sénateurs républicains John McCain et Lindsey Graham dans une déclaration conjointe. «L'ordre exécutif ne va pas améliorer notre sécurité mais plutôt inciter au recrutement terroriste», expliquent les deux sénateurs. Là aussi, la réplique de Trump a été très violente et donne un signe avant-coureur de ce qui tourne dans sa tête. «Les sénateurs devraient focaliser leur énergie sur Daech au lieu de chercher à déclencher une troisième guerre mondiale». Grave et dangereuse déclaration du président de la première puissance mondiale.