C'est loin des considérations de difficultés financières, de conflits entre actionnaires et des raisons à l'origine de la crise qu'un sit-in a été organisé, hier, à la Maison de la presse Tahar-Djaout, en soutien aux travailleurs du journal La Tribune qui a cessé de paraître. Une action pour dire «non à la disparition de La Tribune», «non à la mise à mort de la presse» pour le droit du citoyen à l'information et pour la poursuite du combat». Près d'une centaine de journalistes, de fidèles au titre et d'anciennes plumes qui ont fait leurs débuts dans le journal qui a cessé de paraître depuis le 9 août dernier, ont participé au rassemblement initié par le Collectif des travailleurs. Ces derniers ont exprimé leur détermination à «résister pour défendre le titre qui a compté dans le paysage médiatique du pays». N'ayant pas pu retenir ses larmes, Hasna Yacoub, journaliste et représentante du-dit Collectif, a déploré le fait que «23 ans après, le journal ferme sur simple décision. «Bachir nous disait que La Tribune avant tout. Il nous rassurait que malgré la difficulté, il sera toujours là pour nous. Maintenant qu'il a disparu, nous devons continuer le combat», dira Hasna Yacoub. Ancien directeur de la rédaction de ce quotidien, Abdelkrim Ghezali lui emboîte le pas. «Ou on défend tous la Tribune, ou on disparaît», a-t-il assené. Suite à quoi, d'autres intervenants ont déploré «le manque de solidarité» au sein de la corporation, mais aussi «la défaillance» du syndicat représentatif. D'ailleurs, d'anciens journalistes n'ont pas manqué d'attirer l'attention sur «la précarité que vivent beaucoup de professionnels». «Une situation à laquelle on doit rapidement remédier en redynamisant le syndicat représentatif», a-t-on plaidé. Sauver «La Tribune» est, aujourd'hui, un devoir et une façon de rendre la monnaie à un titre qui n'a pas hésité un instant à secourir, dans le passé, un nombre important du personnel d'un autre titre qui venait de disparaître de la scène médiatique. Lors de la fermeture du Journal «Le matin» vers la fin 2004, «La Tribune» a recruté une bonne partie de ses journalistes mis au chômage. Présente au rassemblement, Mme Taous Ameyar, veuve de l'un des fondateurs de «La Tribune», Kheireddine Ameyar en l'occurrence, a exprimé son soutien aux travailleurs, annonçant sa «disponibilité» à relancer le journal, dans les plus brefs délais. «Les héritiers Ameyar sont actionnaire majoritaire avec 46% des actions», a-t-elle tenu à rappeler. Et d'ajouter : «Je peux bien monter pour rouvrir les bureaux. Mais, je préfère attendre que la justice de mon pays se prononce d'abord ». Mme Ameyar dit avoir introduit une intervention volontaire auprès du juge des référés afin de s'opposer à la liquidation de l'entreprise. C'est-à-dire la démarche qu'avaient initiée, le 9 août, les deux actionnaires minoritaires, Cherif Tifaoui (6%) et Djamel Djerrad (12%). Ces derniers avaient, rappelle-t-on, introduit en référé une demande auprès de la justice pour la cessation des activités de la SARL Ominium Maghreb Press, et par conséquent du journal. «Une décision unilatérale et arbitraire», dénonce le Collectif dans leur déclaration rendue public et lue à l'occasion. Quoi qu'il en soit, l'action de solidarité avec le Collectif du journal «La Tribune», malgré, faut-il le dire, «la faible mobilisation», aura été une énième sonnette d'alarme tirée dans un paysage médiatique dont les acteurs se battent au quotidien pour sauvegarder le droit fondamental à l'information. Parallèlement à l'affaire traitée au niveau de la justice, le Collectif ne compte pas baisser les bras, promettant de continuer à crier fort pour la sauvegarde du journal. Aux journalistes, tous titres, sites électroniques et chaîne de télévisions, de les rejoindre pour que la résonnance du cri soit plus forte.