Le ministre des Finances Abderrahmane Raouya a présenté jeudi à l'APN le projet de loi modifiant et complétant la loi relative à la monnaie et au crédit. M. Raouya a justifié le recours du gouvernement au financement non conventionnel, permettant d'éviter l'endettement extérieur en raison de ses lourdes répercussions sur le plan économique et social. «Il est vrai que la majorité des pays qui font face à des difficultés financières recourent généralement à l'endettement externe, mais notre ancienne expérience en la matière nous a poussés à privilégier l'endettement interne», a-t-il soutenu. Il a rappelé que le recours par l'Algérie à l'endettement extérieur dans le passé l'a conduite à supporter un service de la dette colossal, un déséquilibre de la balance des paiements avec des répercussions sur l'emploi, la consommation et l'investissement dans le sillage d'un programme d'ajustement structurel dicté par les institutions internationales. En plus, a-t-il poursuivi, le financement non conventionnel a été choisi comme solution après avoir épuisé tous les moyens classiques en matière de couverture du déficit budgétaire. Il a, à ce titre, cité les avances de la Banque d'Algérie au Trésor public, plafonnées jusque-là à 10% des ressources ordinaires, qui ont été de 276 milliards de dinars (mds DA) en 2016 et de 280 mds DA en 2017. Il y a aussi les bénéfices de la Banque d'Algérie versés au Trésor qui ont atteint 610 mds DA en 2016 et 919 mds DA en 2017. Mais le recours aux prêts directs de la Banque Centrale, autorisé pour une période transitoire de cinq ans selon le projet de loi, sera accompagné de réformes structurelles importantes portant sur le cadre institutionnel et fiscal avec la rationalisation des dépenses. Il a assuré qu'un suivi de la mise en œuvre de ce financement sur le terrain sera assuré à travers la création d'une cellule de suivi au sein du ministère des Finances. Le ministre a avancé que le programme de réformes structurelles économiques et budgétaires qui va accompagner la mise en œuvre du financement non conventionnel, conduira au rétablissement des équilibres du budget de l'Etat et de la balance des paiements au terme des cinq années prévues par le projet de loi. Le ministre a écarté aussi un dérapage inflationniste après la mise en œuvre de la planche à billets. Il s'est montré optimiste en affirmant que le taux d'inflation va baisser à 4% en 2019 et à 3,5% en 2020. Hier, au premier jour de l'examen du projet de loi complétant et amendant l'ordonnance relative au crédit et à la monnaie, des députés ont affirmé que la concrétisation des objectifs de l'article 45 bis, objet de l'amendement en cours pour l'activation du financement non conventionnel, reste tributaire de la mise en œuvre des réformes économiques et financières structurelles annoncées. Dans ce contexte, le député RND, Rahmani Khaled a mis l'accent sur l'importance d'une réforme profonde du système bancaire. Un avis partagé par Abdelkader Hadjoudj du parti FLN qui a estimé impératif de garantir un environnement économique propice à la consécration des nouvelles mesures financières sans tomber dans l'inflation. Le député Lakhdar Benkhellaf de l'Union Ennahda-Adala-Binaa, a émis, quant à lui, des appréhensions quant aux conséquences négatives du recours au financement non conventionnel notamment la hausse de l'inflation, l'érosion du pouvoir d'achat et la dépréciation de la monnaie nationale. Reprochant au gouvernement d'avoir opté pour «la solution de facilité», sans tenir compte de l'avis des experts concernant le projet de loi sur la monnaie et le crédit, il a fustigé également la relance de l'idée d'exploiter le gaz de schiste.De son côté, le député Karim Mohamed (TAJ) a mis en exergue la nécessité de promouvoir les secteurs prioritaires, à l'instar de l'agriculture, du tourisme et de l'artisanat, de créer des zones de libres échanges au niveau des régions frontalières afin d'exporter le produit local et d'élargir le réseau des banques aux wilayas déléguées. D'autres parlementaires ont relevé la nécessité d'orienter la masse monétaire vers l'investissement productif. Dans ce sens, ils ont plaidé pour la mise en place d'une institution de contrôle et d'évaluation périodique. Notons que les débats se poursuivront aujourd'hui et le vote du texte de loi est prévu demain.