Le fondateur du réseau des «porteurs de valises» durant la Révolution algérienne, Francis Jeanson, est décédé samedi à Paris à l'âge de 87 ans suite à une longue maladie. Portant le nom de «Réseau Jeanson», les «porteurs de valises» avaient pour rôle principal de collecter et acheminer des fonds au profit du FLN et organiser l'hébergement en France de responsables de l'organisation indépendantiste.Né en 1922, le philosophe français, Francis Jeanson, fuit l'Espagne en 1943 pour rejoindre l'armée française pendant la Seconde Guerre mondiale. Après la défaite du nazisme, il s'engagea en faveur de la décolonisation des pays et milita aux côtés des ouvriers. Après le déclenchement de la guerre de Libération nationale, et après la publication de L'Algérie hors la loi, Jeanson afficha sa grande sympathie pour le Front de libération nationale (FLN). En 1957, il fonda un réseau de soutien à l'action du FLN qui porta son nom de «Réseau Jeanson». Agissant sous ses directives, les militants français constituant le réseau apportaient leur soutien dans la métropole à l'action des militants du FLN. Il publia une revue de propagande, Vérité pour, destinée à expliquer le sens de son engagement. Malgré le démantèlement du réseau en février 1960, Jeanson poursuivit son combat jusqu'à l'indépendance de l'Algérie. Le 5 septembre 1960 démarra le procès des «porteurs de valises» devant le tribunal permanent des forces armées de Paris. Comme l'écrit Marcel Péju, «le gouvernement croit sans doute vouer les accusés à l'opprobre» et «pourfendre spectaculairement la trahison». Mais, au bout de quelques jours, écrit Marcel Péju dans son livre Le procès du réseau Jeanson, la situation se trouve renversée et le procès se transforme en arène politique : «C'est le gouvernement, l'armée, leur politique, c'est la guerre d'Algérie tout entière dont le procès commence. Accusés, témoins, avocats, débordant un tribunal stupéfait, transforment le prétoire en tribune de l'opposition.» Finalement, quinze des inculpés furent condamnés le 1er octobre à dix ans de prison, trois furent condamnés à cinq ans, trois ans et huit mois, et neuf furent acquittés. Dans une interview publiée en juin, il avait affirmé avoir découvert, après un voyage et une tournée en Algérie, «combien les Algériens étaient méprisés par les grands colons et la situation abjecte dans ce pays». «Quand j'ai pris position pour l'indépendance de l'Algérie, je me suis retrouvé à la tête d'un véritable réseau de soutien aux Algériens en 1957. J'ai été traité de traître à la suite de mes prises de position», avait-il souligné. Francis Jeanson a écrit plusieurs livres sur la guerre d'Algérie, notamment L'Algérie hors la loi, en collaboration avec Colette Jeanson (1955), Notre guerre en 1960, La Révolution algérienne problèmes et perspectives (1962) et Algéries en 1991. «D'âme et de cœur, nous ne pouvions laisser tomber ce peuple car, comme lui, nous étions Algériens», aimait répéter Francis Jeanson. D'âme et de cœur, nous ne pourrons t'oublier, car comme toi nous sommes des résistants.